Musicales 41
1.2.3... Les informationsEconomieVie locale

Château de Blois : un joyau patrimonial à la gestion perfectible selon la Chambre régionale des comptes

Les futurs professionnels de santé du Loir-et-Cher sont déjà parmi vos proches !

La Chambre régionale des comptes du Centre-Val de Loire a publié le 24 juin 2025 un rapport d’observations définitives sur la gestion du château de Blois, dans le cadre de l’enquête inter-juridictions intitulée « Les collectivités face aux enjeux de leur patrimoine monumental ». Ce document, rigoureux et détaillé, couvre les exercices 2019 et suivants. Il dresse le portrait d’un site d’exception, pilier du rayonnement touristique et culturel de la ville, mais souligne également des lacunes persistantes dans son administration, son entretien, et sa valorisation patrimoniale.

Un site remarquable au cœur du Val de Loire

Classé monument historique depuis 1840, propriété de la commune depuis 1810, le château-musées de Blois constitue un ensemble architectural emblématique du patrimoine ligérien. Composé de trois ailes principales – Louis XII, François Ier et Gaston d’Orléans – il s’élève au cœur du centre historique de Blois, lui-même intégré au périmètre du patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2000.

Avec plus de 35 000 pièces, le château héberge également le musée des Beaux-Arts, installé depuis 1869 dans l’aile Louis XII. Il bénéficie de l’appellation « musée de France » depuis 2003. Le site est protégé par un secteur patrimonial remarquable (SPR), issu de l’ancien secteur sauvegardé défini en 1970. Ce périmètre est régi par un plan de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV), toujours en vigueur mais actuellement en cours d’audit.

Une attractivité réelle mais des handicaps persistants

La fréquentation du site a connu un rebond significatif après la crise sanitaire. En 2023, 359 000 visiteurs ont été accueillis, dont 67 000 pour le spectacle son et lumière. Le public est très majoritairement individuel et français, mais les groupes étrangers progressent fortement, représentant deux tiers des groupes adultes et une hausse de 22 % par rapport à 2022.

Le château, selon le rapport, « constitue un levier économique majeur pour la commune », captant près de la moitié des 1,3 million de nuitées enregistrées sur l’agglomération blésoise en 2023. Pourtant, des obstacles structurels nuisent à son plein développement : absence d’espaces verts, position centrale en zone dense, carence de l’offre hôtelière de moyenne gamme, concurrence des autres sites du Val de Loire.

Une gestion directe mais fragmentée

La gestion du château relève d’un budget annexe spécifique depuis 2019, englobant les recettes des boutiques, du son et lumière, de l’activité congrès (depuis 2020) et, depuis 2024, de la Maison de la Magie. Le site est administrativement rattaché à la direction de l’action culturelle (DAC), laquelle emploie 62 équivalents temps plein (ETP). Le service du château proprement dit mobilise 46 ETP : 36 pour l’exploitation et 10 pour la conservation.

La direction est bicéphale : un directeur, Bastien Lopez, nommé en janvier 2024, supervise la conservation et le patrimoine culturel de la ville ; un directeur d’exploitation, Daniel Pilon, gère les fonctions opérationnelles. La chambre note que « la commune devrait […] engager une réflexion en matière de redéploiements internes et de mutualisation des fonctions support ».

Entretien du bâti : un manque de stratégie

Si le château a bénéficié d’importants travaux de restauration jusqu’en 2008, le rapport observe qu’« aucun diagnostic sanitaire ni schéma directeur permettant de programmer les travaux de restauration n’a été élaboré ». L’entretien courant, assuré par une équipe technique dédiée, représente 489 243 euros entre 2019 et 2023. Les investissements patrimoniaux se sont élevés à 1,35 million d’euros, dont la moitié a concerné la mise aux normes sécurité incendie.

Un audit énergétique externe a été mené en 2022-2023. Il a conclu à une forte dépendance à l’électricité et au fioul, des conditions inadaptées à la conservation des œuvres, et l’absence de centrale de traitement d’air dans les réserves. En 2024, un recensement des travaux nécessaires a été réalisé, chiffré à 1,78 million d’euros, mais sans hiérarchisation ni programmation.

Sécurité incendie : des progrès mais des lacunes

Le château est classé ERP (établissement recevant du public) de 2e catégorie depuis 2023. Il dispose d’un service sécurité incendie composé de cinq agents SSIAP, renforcés par des prestataires externes. Un protocole de partenariat avec le SDIS 41 a été signé en mai 2024. Toutefois, la chambre constate que plusieurs recommandations des commissions de sécurité n’ont pas encore été suivies d’effets, notamment l’absence de protocole opérationnel, de calendrier d’exercices conjoints, et d’exercice d’évacuation en présence du public.

Accessibilité : retard préoccupant

La mise en accessibilité du château pour les personnes à mobilité réduite demeure insuffisante. La seule partie accessible du parcours de visite est le rez-de-chaussée de l’aile François Ier. Le rapport souligne qu’« aucun dispositif d’accès n’est prévu » pour les étages. La chambre recommande à la commune d’« étudier les modalités visant à améliorer l’accessibilité au site du château et à l’intérieur de l’édifice ».

château de Blois

Conservation des collections : obligations non remplies

Malgré son statut de musée de France, le château ne dispose pas à ce jour de projet scientifique et culturel (PSC), pourtant obligatoire au titre de l’article L. 441-2 du code du patrimoine. Le rapport note un « état préoccupant des collections », un suivi parcellaire et une traçabilité à parfaire. La conservation se fait dans des conditions climatiques instables, sans régulation d’humidité ni climatisation adaptée.

Comptes : un redressement en trompe-l’œil

Porté par la reprise de la fréquentation, le budget annexe affiche depuis 2023 des recettes d’exploitation qui couvrent les charges courantes. Les produits de gestion ont progressé de 6,9 % par an en moyenne sur la période contrôlée, contre +2,4 % pour les charges. Néanmoins, « l’absence de facturation par le budget principal ne permet pas de retracer la totalité des concours apportés par la commune ».

Par ailleurs, malgré plusieurs audits de la régie de recettes, des anomalies subsistent. Le dernier contrôle de novembre 2023 a été déclenché à la suite d’un signalement pour suspicion de fraude. La chambre appelle à « mettre en œuvre la totalité des recommandations du rapport d’audit […] dans un délai de 12 mois ».

Des investissements sous-financés et mal structurés

La politique d’investissement pour le château est portée par le budget principal, en contradiction avec les règles comptables applicables. Il n’existe ni plan pluriannuel d’investissement (PPI) ni plan pluriannuel d’entretien (PPE). Le rapport juge que « cette situation ne favorise ni la lisibilité ni le pilotage de la politique d’investissement ». Près des deux tiers des dépenses patrimoniales de la période 2019–2023 ont été financés par des partenaires extérieurs : État (513 000 €), région, département et mécénat (près de 260 000 €).

Neuf recommandations à mettre en œuvre

À l’issue de son contrôle, la chambre régionale a émis neuf recommandations. Parmi elles :

  • amélioration de l’accessibilité,
  • rédaction du projet scientifique et culturel,
  • mise en conformité de la régie de recettes,
  • valorisation comptable des concours du budget principal,
  • intégration des dépenses d’investissement dans le budget annexe,
  • élaboration d’un PPI et d’un PPE.

La chambre vérifiera la mise en œuvre de ces recommandations dans un délai d’un an, après présentation au conseil municipal, conformément à l’article L. 243-9 du code des juridictions financières.


Votre annonce sur Blois Capitale

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Bouton retour en haut de la page