Agglopolys cherche des volontaires pour former un jury de nez qui évaluera les odeurs

Agglopolys, les communes riveraines et plusieurs entreprises du site de Bel-Air lancent une étude participative inédite autour des odeurs. Objectif : mieux comprendre et prévenir les gênes olfactives ressenties par les habitants, grâce à un jury de nez recruté localement. L’enquête durera plus d’un an.
Démocratie olfactive
Les odeurs ne sont ni des gaz réglementés, ni des composés volatils mesurables à la simple lecture d’une station, mais elles affectent bel et bien la qualité de vie. À Fossé, c’est sur ce postulat que s’appuie la démarche engagée par Agglopolys, en partenariat avec Lig’Air, l’observatoire régional agréé pour la surveillance de la qualité de l’air, et les communes voisines de la zone d’activités de Bel-Air. Une expérience inédite de « démocratie olfactive » vient d’y être lancée, suite à une idée de Nicolas Orgelet, élu écologiste. « Il fallait que ça s’inscrive dans la durée, avec un tiers de confiance. Ce que je veux, c’est un protocole rigoureux et une méthode crédible pour objectiver les choses », souligne Christophe Degruelle, président d’Agglopolys.
L’objectif est simple : sortir du flou. Entre les craintes exprimées lors de l’enquête publique sur l’installation du méthaniseur Métha Blois Nord, les plaintes récurrentes concernant ValCompost, les odeurs de bitume parfois perçues en provenance d’Eurovia, les habitants évoquent un inconfort diffus mais rarement quantifié. La mise en service de Métha Blois Nord, en février 2025, a ravivé ces tensions.
Un jury de nez pour documenter les gênes
Dès le mois de septembre, un jury de nez – composé d’au moins trente volontaires habitant dans un rayon de 3 km – sera constitué sur les cinq communes concernées : Fossé, Marolles, Averdon, Saint-Bohaire et La Chapelle-Vendôme. Leur mission durera douze mois minimum. Chaque mois, pendant une semaine, ces riverains sentiront et consigneront deux fois par jour, matin et soir, leurs observations sur une application dédiée, Signal’Air. À cela s’ajouteront des « olfactions spontanées » : en cas d’odeur gênante, un signalement géolocalisé pourra être transmis à tout moment.

« L’idée n’est pas d’identifier des substances chimiques, ni de former les participants à la reconnaissance d’odeurs spécifiques. Ce qu’on attend, ce sont des évocations. Est-ce que ça sent le goudron ? Le compost ? Le soufre ? Quelle intensité ? Est-ce acceptable ou non ? », a précisé Amélie De Filippis, ingénieure d’étude qualité de l’air. Le protocole prévoit également deux visites de terrain, une au lancement et une à mi-parcours, ainsi qu’un bulletin mensuel de suivi.

L’intérêt est double : d’un côté, permettre aux habitants de s’exprimer, de manière encadrée et constructive ; de l’autre, offrir aux entreprises concernées un outil pour mieux comprendre les éventuels dysfonctionnements. « On a fait énormément d’efforts », a rappelé Christian Mary, président de Val’Eco. « On sait que les odeurs sont liées à l’humidité du compost. Parfois, le vent plaque les vapeurs sur les maisons. On veut comprendre pour mieux faire. »
Témoignages de terrain et retours d’expérience
Si les élus affichent leur soutien au projet, ils se montrent aussi prudents. Bernard Pannequin, maire de Saint-Bohaire, se souvient : « J’avais voté contre l’implantation du méthaniseur. J’avais beaucoup de craintes. Mais sur le plan olfactif, je dois dire : rien. » Isabelle Soirat, maire de Marolles, nuance : « Quand le vent est à l’est, il m’arrive de sentir une odeur de bitume. Mais pour le méthaniseur, personnellement, je ne ressens rien. À une époque, c’est ValCompost qui posait problème. Aujourd’hui, je n’en entends plus parler à la mairie. »

Perception, santé, et subjectivité
Au cœur du dispositif se trouve une distinction essentielle. Une mauvaise odeur n’est pas nécessairement dangereuse pour la santé. Mais elle peut être perçue comme insupportable, intolérable, envahissante. « Ce n’est pas parce que les seuils réglementaires ne sont pas dépassés qu’il ne se passe rien », note Lig’Air. « L’odeur n’est pas un polluant chimique, mais elle reste une nuisance.
Si le recrutement peine encore à atteindre les trente volontaires nécessaires, certains y voient un indice. « Peut-être que les odeurs ne sont pas aussi présentes qu’on le dit », observe Christophe Degruelle. « Peut-être que les nuisances sont davantage dans les têtes que dans les nez. Mais ce doute-là, il faut pouvoir le lever. » Dans cette idée, une station météo a été installée par Val’Eco, pour corréler les observations avec la direction des vents. « Parfois, une odeur est signalée, mais le vent souffle à l’opposé. Ça permet de rétablir les faits. »

Les personnes intéressées peuvent scanner le QR code (sur l’affiche) pour s’inscrire ou contacter leur mairie. Le recrutement se poursuit jusqu’à la fin du mois d’août. L’enquête, elle, se déroulera jusqu’à l’automne 2026. Puis viendra le temps du bilan au printemps 2027.