
Chaque année, le 14 février marque la célébration de la Saint-Valentin, fête des amoureux ancrée dans les traditions occidentales. Pourtant, son histoire demeure enveloppée de mystère, oscillant entre faits historiques et interprétations plus tardives. Cette célébration trouve ses racines dans l’Antiquité romaine, période où plusieurs figures chrétiennes du nom de Valentin furent martyrisées. Toutefois, leur biographie est incertaine et leurs existences souvent confondues.
Deux personnages émergent de cette période. Valentin de Rome, prêtre chrétien, aurait été exécuté en 269 sous l’empereur Claude II le Gothique. L’une des versions les plus répandues prétend qu’il célébrait des mariages chrétiens en secret, défiant ainsi l’autorité impériale qui considérait que les hommes célibataires étaient de meilleurs soldats. Son arrestation aurait conduit à son exécution sur la via Flaminia. Une autre légende suggère qu’il aurait redonné la vue à la fille de son geôlier et lui aurait adressé un billet signé « Ton Valentin », ce qui aurait donné naissance à la tradition des lettres d’amour échangées lors de cette fête.
Le second Valentin, évêque de Terni, aurait lui aussi été persécuté et mis à mort en 273. Missionnaire actif dans sa région, il aurait œuvré à la conversion des populations au christianisme, provoquant la colère des autorités romaines.
Certains historiens considèrent que Valentin de Rome et Valentin de Terni pourraient être la même personne, leurs récits ayant fusionné au fil des siècles. Toutefois, l’Église catholique elle-même les distingue dans ses hagiographies. Les reliques attribuées à ces deux figures sont dispersées en plusieurs lieux d’Italie, notamment à Rome, Terni et Balsena, témoignant de l’ancienneté de leur culte distinct. Si ces deux figures ont été sanctifiées, aucun document contemporain ne permet d’établir un lien entre leur culte et l’amour courtois célébré aujourd’hui.
Une récupération chrétienne d’une fête païenne ?
Certains historiens avancent l’idée que la Saint-Valentin a été instituée pour remplacer une fête romaine païenne, les Lupercales, célébrées les 13, 14 et 15 février en l’honneur du dieu Faunus. Ces rites, marqués par des sacrifices d’animaux et des rituels de fertilité, étaient destinés à favoriser la fécondité et à purifier la cité. Lors de ces festivités, un tirage au sort associait jeunes hommes et jeunes femmes, formant ainsi des couples temporaires.
En 496, le pape Gélase Ier aurait interdit ces pratiques jugées contraires aux valeurs chrétiennes et instauré la célébration de Saint Valentin en remplacement de ces coutumes païennes. Toutefois, cette interprétation repose sur des recoupements tardifs et aucune preuve historique irréfutable ne vient confirmer que cette substitution ait été voulue et orchestrée par l’Église.
La transformation de la Saint-Valentin au Moyen Âge
Ce n’est qu’au Moyen Âge que la Saint-Valentin acquiert une dimension explicitement amoureuse. En Angleterre et en France, la croyance populaire voulait que le 14 février corresponde au début de la saison des amours chez les oiseaux. Cette observation a contribué à ancrer l’idée selon laquelle cette date était propice aux déclarations amoureuses. La noblesse s’empara de cette idée et développa la coutume des billets doux, où les amoureux échangeaient des poèmes et des déclarations manuscrites. L’une des plus anciennes traces écrites de cette pratique remonte à 1415 : emprisonné à la Tour de Londres, Charles d’Orléans – bien connu à Blois – adressa une lettre à son épouse, dans laquelle il exprimait son attachement en l’appelant ma très douce Valentinée.
L’essor de la Saint-Valentin comme fête populaire
À partir du XVIIe siècle, la tradition de la Saint-Valentin se répand plus largement, en particulier en Angleterre et en France. Au XVIIIe siècle, les billets manuscrits sont remplacés par des cartes imprimées, souvent décorées de cœurs, de cupidons et de vers romantiques. Avec l’industrialisation et le développement des techniques d’impression au XIXe siècle, la Saint-Valentin devient une véritable institution commerciale.
Les États-Unis jouent un rôle prépondérant dans cette transformation. Dès les années 1840, des entreprises spécialisées, notamment Hallmark, se lancent dans la production en masse de cartes de Saint-Valentin, facilitant la diffusion de cette tradition à grande échelle. Peu à peu, l’échange de lettres s’accompagne de cadeaux symboliques, tels que des bouquets de fleurs et des chocolats.
Une célébration mondialement adoptée et critiquée
Aujourd’hui, la Saint-Valentin est célébrée dans de nombreux pays, bien que son importance varie selon les cultures. En Europe et en Amérique du Nord, elle est devenue un moment clé du calendrier commercial, marqué par des campagnes publicitaires et des offres spéciales pour les couples. Au Japon, la fête a pris une forme particulière : ce sont les femmes qui offrent du chocolat aux hommes, tandis qu’un mois plus tard, le 14 mars, lors du White Day, les hommes offrent un présent en retour.
Logiquement, la Saint-Valentin n’échappe pas aux critiques. Nombreux sont ceux qui dénoncent son caractère mercantile, mettant en avant la pression sociale exercée sur les couples et la standardisation des gestes romantiques. Certains mouvements prônent un retour à des formes plus authentiques de célébration, insistant sur la valeur des attentions sincères plutôt que sur les obligations consuméristes.