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Atelier Indigo et Shibori à Blois : Albane Daviaud initie à la teinture végétale

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Il est des gestes anciens que l’on pouvait croire oubliés. En ce premier samedi du mois d’août, dans le calme ordonné du jardin de Masato Fujisaki, à Blois, des mains plongent, trempent, nouent et déplient. C’est un atelier de Shibori, une immersion dans les arts textiles traditionnels japonais animée par Albane Daviaud et Sarah Fujisaki, sous l’égide de l’association Tinctoria Prima.

Ce jour-là, chacun est venu pour apprendre et réaliser un grand châle à son goût. Apprendre à dompter la couleur, mais surtout à la laisser apparaître, par réserve, par retrait, par dissimulation. Le Shibori, technique japonaise de teinture à motifs, se fonde sur le pliage, le nouage, ou la couture du tissu : autant de manières de créer des zones où la teinture ne pénétrera pas. C’est l’art de l’empreinte invisible, rendu visible à la faveur d’un geste maîtrisé — ou d’un hasard inspiré.

art du Shibori

Une couleur vivante, une teinture à part

« L’indigo est vraiment une teinture à part », explique Albane Daviaud. Contrairement aux autres plantes tinctoriales, dont les colorants sont généralement solubles dans l’eau, l’indigo nécessite une chimie particulière. Ce jour-là, c’est une cuve montée au henné, combinée à de la chaux, qui permet de réduire le pigment en une forme leuco-soluble. Ce composé, temporairement soluble, peut alors s’absorber dans la fibre textile, avant de se fixer à l’air par oxydation. Le montage de la cuve, rapide, précède un temps de repos essentiel. C’est alors que les participants entrent en scène.

Chaque motif, chaque teinte est le fruit d’un choix. Il faut plier, coudre ou ligaturer, puis tremper le tissu plusieurs fois, car l’indigo fonctionne par superposition : plus on trempe, plus la teinte s’intensifie. À la sortie de la cuve, le tissu, imprégné de leuco-indigo, apparaît verdâtre. C’est au contact de l’air qu’il s’oxyde et devient bleu. La magie opère à la lumière, par simple exposition à l’oxygène.

Shibori

Transmettre un savoir technique, accessible et reproductible

L’atelier est conçu comme une initiation, accessible à chacun. Le but n’est pas seulement de repartir avec un châle teint, mais de pouvoir reproduire la démarche. « On leur a appris comment faire la cuve, les différentes techniques de Shibori, et le fonctionnement de l’indigo », précise Albane. Des livres existent, certains filment, d’autres notent, mais c’est la répétition des gestes qui fera, peut-être, des amateurs du jour les artisans de demain. Les motifs simples cohabitent avec des créations plus audacieuses : un arashi Shibori (« arashi » signifie tempête en japonais) se dévoile, ondoyant comme un courant d’eau.

Shibori

L’aléatoire tient une place importante. Il faut parfois accepter de ne pas maîtriser. « Si on veut du très géométrique, très précis, c’est possible aussi », concède-t-elle. Mais pour Albane, l’instinct prime souvent : l’atelier s’ouvre à toutes les démarches, du rigoureux au spontané, de l’héritage à l’invention.

Shibori

L’association Tinctoria Prima : une démarche artisanale et sensible

Tinctoria Prima est une association qui organise des ateliers tout au long de l’année, autour de la teinture végétale sous toutes ses formes. Outre l’indigo, elle propose des ateliers d’ecoprint — impressions végétales où l’on travaille directement à partir de feuilles ou de fleurs, pour obtenir la couleur et le motif. On y explore aussi le nuancier végétal, les encres historiques et d’autres techniques de transmission, souvent adaptées aux lieux ou aux publics.

Albane Daviaud intervient dans plusieurs sites patrimoniaux, notamment les châteaux de Fougères-sur-Bièvre, de Châteaudun, et bientôt de Talcy. À la rentrée, la programmation reprendra chez Marie Wacquez à La Pensée Sauvage.

La démarche de Tinctoria Prima reste ancrée dans une éthique de la proximité. Dès qu’il est possible, les plantes sont cueillies localement ou cultivées, pour éviter les pigments importés. Même si certaines espèces, comme l’indigo ou la garance, ne poussent pas naturellement en Loir-et-Cher, l’objectif reste de travailler au plus près du vivant.

D’une passion d’enfance à une pratique ancrée

La relation d’Albane Daviaud aux plantes remonte à l’enfance. « Je créais des herbiers. Ma maman m’a transmis ce goût de la nature, ce goût des plantes. » De là, elle passe au médicinal : elle se forme en naturopathie. Puis vient la découverte de la dimension teintoriale des plantes, de leurs propriétés multiples, et d’un chemin créatif qui unit l’artisanat, la couleur, l’énergie et le soin. « Il y a toujours un lien entre les propriétés des plantes, la teinture, et l’énergie de la plante. »

Aujourd’hui, elle développe aussi sa propre marque, Banouschka, dédiée à l’art textile de plus grande échelle. Mais également des carnets, châles, trousses… certaines créations sont vendues sur des marchés ou lors d’expositions, parfois en collaboration — comme avec Tendre Papier.

Une esthétique de la douceur

Albane Daviaud préfère les formes douces, les rendus épurés, les monochromes. Elle travaille souvent autour du bleu indigo, du blanc, du noir, et évite ce qui est « bariolé ». Le motif peut exister, mais il doit dialoguer avec la matière, ne pas saturer. « Je cherche souvent à avoir des rendus assez monochromes, où on met vraiment la plante en valeur. » Là encore, l’aléatoire trouve sa place. Dans ses propres créations, elle privilégie ce qui n’est pas trop cadré. Il y a du végétal, bien sûr, mais aussi une attention à l’espace, à la texture, au silence du tissu. Elle relie les savoirs anciens à des pratiques actuelles, et donne à voir ce que l’on peut faire avec peu : une plante, un tissu, de l’eau, de l’air, de la lumière, du temps.

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