Le département inquiet face à des « temps durs et incertains »

Ce jeudi matin se tenait la session plénière du Conseil départemental, il a été question entre autres sujets de finances, de solidarités et d’engagement de l’Etat. En premier lieu, ce sont les coupes budgétaires pointées par le gouvernement qui inquiètent fortement les élus départementaux.
Philippe Gouet : « L’Etat doit prendre ses responsabilités »
L’examen des orientations budgétaires pour 2025, initialement prévu lors de cette session, a été reporté. Philippe Gouet, à la tête du département, a expliqué ce report par la nécessité de stabiliser les prévisions financières, dans un contexte où le projet de loi de finances (PLF) est encore en discussion au Parlement. Il a évoqué « des annonces incertaines et des changements continus » justifiant ce délai.
Le président du Conseil départemental a également alerté sur la dégradation des finances publiques. La dette publique française atteint désormais 3 228,4 milliards d’euros, soit 112 % du PIB, et le gouvernement prévoit d’emprunter 345 milliards d’euros en 2025. Philippe Gouet a souligné un fait inquiétant : « La France emprunte désormais à des taux plus élevés que la Grèce, ce qui marque un tournant symbolique et préoccupant. »
Des économies qui pénalisent les départements
Le projet de loi de finances 2025 prévoit des économies de 60 milliards d’euros, dont près de 5 milliards pour les collectivités territoriales. Pour le Loir-et-Cher, cela se traduirait par un prélèvement de 7,7 millions d’euros sur ses recettes. « Ceci est purement inacceptable », a martelé Philippe Gouet, dénonçant la pression accrue sur les collectivités locales.
D’autres mesures prévues, comme le gel des recettes de TVA ou la réduction du fonds de compensation pour la TVA (FCTVA), risquent d’accentuer les difficultés du département. Le manque à gagner pourrait s’élever à 1,46 million d’euros pour le Loir-et-Cher, selon les projections.
Un système de financement social à bout de souffle
Le président a également rappelé le rôle crucial des départements dans la gestion des dépenses sociales. « Le vrai problème, c’est l’absence de compensation de l’État des dépenses sociales obligatoires déléguées aux départements », a-t-il affirmé. La compensation par l’État pour les allocations individuelles de solidarité (AIS) est passée de 70 % à 40 % en dix ans, une situation intenable pour de nombreux départements. « En 2025, 85 départements pourraient ne pas boucler leur budget », a-t-il averti, appelant à une réforme urgente du financement des dépenses sociales.
Philippe Gouet a évoqué un « vrai motif d’inquiétude », en raison notamment de la chute continue des droits de mutation à titre onéreux (DMTO), qui pourraient encore baisser de 17 % en 2024 après une chute de 22,3 % en 2023.
Un appel à l’État pour une véritable prise de responsabilité
Dans son allocution, Philippe Gouet a lancé un appel direct à l’État, l’exhortant à prendre ses responsabilités face à cette crise budgétaire. « L’État centralisateur pénalise les acteurs des services publics du quotidien les plus efficaces, et ce faisant, il pénalise tous les Français », a-t-il conclu. Il a insisté sur la nécessité de réformer en profondeur le financement des collectivités et de compenser les dépenses sociales pour garantir la viabilité des départements.
Malgré les incertitudes économiques, le président du Conseil départemental a affirmé sa détermination à défendre l’échelon départemental et les services publics du Loir-et-Cher, « car il en va de l’avenir des Loir-et-Chériens et de notre beau territoire. »
Le vote du budget 2025 est donc décalé à février, avec une possible révision des orientations budgétaires en janvier, afin de prendre en compte les évolutions de la situation économique et les décisions du gouvernement. « Nous avançons aujourd’hui pas à pas, mais les temps sont durs et incertains », a-t-il prévenu. Un discours offensif visant donc les carences de l’Etat centralisateur. Catherine Lhéritier, 1ere vice-présidente du Conseil départemental, a abondé : « Une telle ponction nuirait à coup sûr aux investissements et aux services. »
Des inquiétudes partagées
Cette perte potentielle de neuf millions d’euros de ressources inquiète logiquement globalement. Ainsi Stéphane Baudu a souhaité « qu’un large consensus » se crée autour du budget 2025. « Notre porte est ouverte, nous sommes à ta disposition » a lancé le maire de la Chaussée Saint-Victor. Car « les années à venir seront extrêmement difficiles pour les départements ». Le vice-président du Conseil départemental, Pascal Bioulac, a rebondi en appelant à se serrer les coudes. « Nous avons une équipe d’agents dévoués et passionnés. Ils sont motivés et se donnent entièrement à leur mission. Ils ont appris à faire plus avec moins, constamment. »

Benjamin Vételé : « Il ne faudra pas que les collectivités se tirent dans les pattes »
Les restrictions budgétaires imposées aux territoires auront des conséquences directes auprès des citoyen.nes. De quoi inquiéter à tous les niveaux de la vie locale, mais aussi un motif de se fédérer, comme l’a souligné Benjamin Vételé. « Il y a beaucoup de brutalité dans cette situation, et une méconnaissance totale de la réalité budgétaire des collectivités. D’un côté, on entend des experts dire que les collectivités dépensent beaucoup trop, et de l’autre, on nous demande de maintenir tous les efforts en matière d’investissement, que ce soit en politique sociale ou éducative. Le bloc communal est en première ligne, a observé l’élu de gauche. Je pense qu’il est essentiel de s’adapter pour toutes les entités territoriales, qu’il s’agisse des départements, des régions ou du bloc communal. Nous devons avancer ensemble. Dans ce contexte, les orientations budgétaires ou les réductions doivent être gérées avec soin. Nous continuerons à soutenir cette répartition, tout en étant à vos côtés pour demander à l’État de maintenir ses engagements financiers. »
Guillaume Peltier veut « supprimer l’immigration et l’assistanat »
Guillaume Peltier, élu d’extrême droite identitaire, a proposé son discours habituel dans une volonté de faire du tapage. Celui a utilisé ses leviers : immigration et assistanat. « Les discussions ne portent souvent pas sur les véritables causes des problèmes, a lancé l’ancien Zemmouriste. Prenons un exemple : l’immigration, qui a coûté 54 milliards d’euros par an au cours des 30 dernières années. Cette question n’est presque jamais abordée. Oui, il s’agit d’une question importante, mais il y a d’autres problèmes. Beaucoup de gens ont souffert des abus du système social, que ce soit par le RSA, les arrêts maladie ou les arrêts de travail injustifiés. Ces dépenses s’élèvent à 800 milliards d’euros. » Un discours qualifié de « caricatural » par Michel Contour et Lionella Gallard.