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Européennes 2024 : François Thiollet et les 100 jours pour une « vague verte »

Il y a actuellement 13 eurodéputés écologistes au Parlement européen. Deux d’entre eux sont bien connus en Loir-et-Cher, François Thiollet, conseiller municipal de Valencisse, et Claude Gruffat. Or, deux députés de Loir-et-Cher écologistes au Parlement européen, « cela arrive moins souvent que le passage de la comète de Halley », plaisante François Thiollet… Les deux hommes avaient donné rendez-vous à Blois dans la perspective des prochaines échéances électorales. Avec Marie Toussaint pour tête de liste écologiste aux Européennes 2024, l’objectif sera de faire au moins aussi bien qu’en 2019 avec Yannick Jadot : 13.47%.

Son expérience au Parlement européen

C’est par un concours de circonstances que François Thiollet est devenu eurodéputé. Brexit, départ de Yannick Jadot au Sénat, décès de Michèle Rivasi, ont fait que le Loir-et-Chérien (placé en 15e position sur la liste d’Europe Écologie Les Verts pour les élections européennes de 2019) devienne parlementaire. Il a présenté ce samedi matin à l’Hôte Bureau son travail en tant que député européen à Bruxelles, Strasbourg et dans le Loir-et-Cher. « Lors de mon arrivée, le débat sur l’immigration battait son plein à Paris. J’ai échangé par SMS avec Cyrielle Chatelain, présidente du groupe des écologistes, sur les différences marquées entre les interactions au Parlement européen et à l’Assemblée nationale française, souvent beaucoup plus conflictuelles, avec des insultes proférées, confie l’élu. Au Parlement européen, le travail est orienté vers la recherche de compromis, notamment lors des négociations. Par exemple, quand j’arrive il y a des discussions sur un texte d’urgence concernant les Massaï en Tanzanie, et la stratégie consistait à concéder un maximum à la droite (PPE) pour parvenir à un accord. Evidemment, j’étais surpris… Cela montre cette approche européenne qui vise à obtenir le soutien d’une majorité large, souvent composée de la droite (PPE), du centre (Renew) et des socialistes (S&D). En général, quand on fait passer des textes il y a des accords avec les écologistes (Verts/ALE) voire The Left. Et puis il y a des mauvaises majorités avec PPE, Renew et les groupes d’extrême-droite. » On comprend donc que le cap au Parlement européen est la recherche du dialogue et du compromis, loin de la culture franco-française parlementaire où le climat est souvent plus tendu.

François Thiollet poursuit ses explications sur le mode de fonctionnement : « Il y a le travail à Bruxelles. Les sessions à Strasbourg permettent de souligner les divergences, parfois nationales, sur certains sujets. Par exemple, sur la question des OGM, les écologistes ont voté contre, les socialistes français se sont opposés, tandis que les socialistes espagnols étaient pour… Malgré ces logiques nationales différentes, il existe de nombreux points communs avec nos collègues de la gauche, The Left et S&D, sauf sur les enjeux environnementaux, où les écologistes tendent à être plus exigeants. »

écologistes Européennes 2024

Les sujets

François Thiollet se concentre aujourd’hui sur les sujets qui étaient importants pour l’eurodéputée écologiste Michèle Rivasi, morte d’une crise cardiaque, en novembre dernier, à Bruxelles. C’est à dire plusieurs domaines clés, notamment la santé, la problématique des pesticides, le Nutri-Score (« qui représente un vrai combat contre les lobbies de l’industrie agroalimentaire ») et le secteur pharmaceutique. « Bientôt, nous examinerons le « paquet Pharma », un important cadre législatif européen dans le domaine pharmaceutique, touchant à la fois la santé, l’environnement et le développement industriel. Ce sera un des derniers textes votés », nous explique François Thiollet. « Un des sujets qui me passionne le plus, et que je découvre également, concerne la transparence des contrats, notamment en ce qui concerne ceux liés au Covid. Nous n’avons pas encore accès à toutes les informations concernant les accords qui obligent les États à acheter des vaccins jusqu’en 2027. Certains pays, comme la France, ne divulguent pas les quantités de vaccins détruites, ce qui soulève des questions de transparence. Par ailleurs, chaque État membre négocie individuellement les prix des médicaments avec les entreprises pharmaceutiques, sans qu’il n’existe une cohérence européenne. Nous tentons d’instaurer une certaine uniformité, bien que cela reste un défi majeur. »

Autre sujet, il concerne le développement international. « Je me suis récemment rendu en Angola pour un sommet entre l’Union Européenne et les pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique. Bien que cette assemblée ne soit pas décisionnelle, elle offre une plateforme précieuse pour l’échange et la discussion. Un sujet particulièrement important pour moi est celui des matières premières critiques. L’Union Européenne a adopté un accord visant à relocaliser, mais cette démarche est souvent perçue comme étant motivée par des intérêts économiques à court terme… L’accord récent signé avec le Kenya, par exemple, permet l’exportation de haricots verts et de fleurs – avec beaucoup de pesticides – vers l’UE, ce qui peut être préjudiciable tant pour les agriculteurs européens que kényans. Cette spécialisation dans l’exportation nuit à l’agriculture locale et crée des déséquilibres régionaux. Ceci doit être voté jeudi prochain, et malheureusement on n’est pas majoritaires sur ces sujets. »

En matière d’énergie, l’actualité est aussi chaude : « Nous allons présenter une étude sur les petits réacteurs modulaires nucléaires (Small modular reactors ou SMRs), c’est la nouvelle proposition des partisans du nucléaire car quand rien ne marche il faut inventer à nouveau ! C’est la pyramide de Ponzi du nucléaire. L’ouverture de Flamanville est imminente, au printemps, malgré les problèmes rencontrés, car les retards pourraient nécessiter de nouvelles procédures administratives. Le Green Deal ne prévoyait pas le nucléaire. L’inclusion du nucléaire dans les financements européens, soutenue par la France, suscite des controverses, notamment parce qu’au delà du danger elle détourne les investissements sur les énergies renouvelables et la sobriété, essentielles pour répondre à l’urgence climatique. Il va falloir continuer le combat car l’ouverture d’un premier SMR est prévu pour 2035. »

Enfin, autre sujet abordé par François Thiollet, la transparence financière car il est impliqué dans une commission qui examine les dépenses de l’Union Européenne. « Et nous constatons des choses pas très claires, comme dans les relations entre l’UE et l’industrie du tabac, ou le Qatar Gate, impliquant des députés influencés par le Qatar. Il est crucial pour nous – pro-européens – de mettre en lumière ces problèmes afin d’améliorer la démocratie au sein de l’UE, car c’est un grand espace démocratique pour tous les européens. »

Le risque d’une Europe ingouvernable

Mais ce grand espace démocratique est-il menacé à l’aune des prochaines élections en juin 2024 ? « L’inquiétude réside dans la montée significative de l’extrême droite en Europe, notamment en France et en Allemagne, où les sondages montrent une avance notable, observe François Thiollet. Actuellement, la majorité au sein de l’Union Européenne est formée par les socialistes, les libéraux et la droite. Pour contrer l’extrême droite, une coalition allant du PPE aux écologistes pourrait être envisagée. Cependant, la véritable question de cette campagne est de renforcer la résistance à l’extrême droite partout en Europe, en offrant des alternatives qui inspirent espoir aux citoyens, non seulement par le vote contre l’extrême droite mais aussi par la proposition de solutions concrètes. Les politiques actuelles semblent s’orienter vers la droite, délaissant les priorités écologiques au profit d’intérêts nationaux. Ceci pourrait conduire, pour la première fois, à une majorité au Parlement Européen opposée au modèle actuel de l’UE. »

Les enjeux seront donc importants lors des prochaines Européennes. Les écologistes ont l’intention de générer une « vague verte » avec 100 jours de campagne sur le terrain à compter du week-end prochain.

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