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La Maison de la BD fête ses 10 ans monstrueusement !

Inaugurée en février 2015, la Maison de la BD de Blois fête cette année ses dix ans. Cet anniversaire est l’occasion de revenir sur une décennie de projets, d’initiatives et d’engagement au service du neuvième art. Pour comprendre les ambitions et les défis de cet établissement unique en son genre, nous avons rencontré Bruno Genini, directeur de la structure.

Une initiative politique et associative

La genèse de la Maison de la BD ne réside pas, comme on pourrait le penser, dans les ambitions de BD BOUM, le célèbre festival de bande dessinée organisé à Blois. « Ce n’est pas une initiative de BD BOUM », clarifie Bruno Genini. « C’est une idée du maire de Blois, Marc Gricourt, qui, avec Jean-Pierre Baron, alors président de l’association BD BOUM, nous a proposé de réfléchir à un projet. » Cette volonté politique s’inscrivait dans une logique plus large de développement culturel et touristique de la ville. « L’objectif était de créer un lieu vivant et dynamique, qui compléterait l’offre culturelle de Blois », explique Bruno Genini. Le projet a nécessité près de trois ans de travail, marqué par des réflexions collectives sur le contenu, la vocation et même le nom du lieu. « Tout le monde l’appelait déjà la Maison de la BD, donc on a décidé de garder ce nom », se rappelle le directeur.

Maison de la BD de Blois

Une structure sans modèle préexistant

Ce qui distingue la Maison de la BD, c’est son caractère unique. « Il n’y avait pas de modèle », souligne Bruno Genini. Contrairement à Angoulême, où le musée de la bande dessinée se concentre sur la conservation, la Maison de la BD se veut un lieu de création, d’éducation et d’expositions. « Nous ne sommes pas conservateurs (sourire). Donc nous avons dû tout imaginer, sans référence. » Aujourd’hui, la structure repose donc sur trois piliers principaux : les expositions, l’éducation et la création. Ce modèle hybride, à mi-chemin entre musée, centre éducatif et incubateur artistique, est le fruit d’une vision et d’une adaptation aux besoins.

Expositions : mettre en lumière la richesse du 9ᵉ art

Depuis 2015, la Maison de la BD a accueilli des dizaines d’expositions, consacrées aussi bien à des auteurs renommés qu’à des thématiques originales (Posy Simmonds, Joost Swarte, Edith, Emile Bravo, Nicolas de Crécy, Etienne Davodeau, Annie Goetzinger, Emmanuel Lepage, Mezzo, René Pétillon, Patrick Prugne… ou des personnages comme Bécassine, Rahan, Tom-tom et Nana, Yakari). « On sait faire des expositions, c’était une évidence pour nous », confie Bruno Genini. Le lieu dispose de deux salles pour des expositions temporaires, et d’un espace permanent dédié à l’histoire de la bande dessinée. « Les expositions sont souvent l’occasion de partenariats avec d’autres structures. »

Maison de la bd

Éducation : transmettre une passion aux jeunes générations

L’éducation est un autre axe majeur de la Maison de la BD, qui accueille chaque année des milliers de scolaires. « Nous avons développé des modules pédagogiques adaptés à tous les âges, autour du scénario, du dessin d’actualité ou encore de la découverte de la bande dessinée », explique Bruno Genini. Ces ateliers peuvent durer une demi-journée, une journée entière ou s’inscrire dans des projets au long cours. Depuis son ouverture, la Maison de la BD a reçu plus de 18 000 élèves, et ses actions éducatives se sont diversifiées au fil des années. « Ce lieu nourrit les ambitions des futurs auteurs et contribue à former de nouveaux lecteurs », se réjouit le directeur.

Création : un soutien concret aux artistes

L’un des aspects les plus novateurs de la Maison de la BD est son engagement en faveur de la création. L’atelier Kraft, situé dans les locaux, offre un espace de travail aux autrices et auteurs, tandis que les résidences permettent d’accueillir des artistes venus d’horizons variés (Evergreen Yeh, Stellina, Alain Frappier, Frédéric Debomy, Elodie Durand, Brigitte Luciani, Micaël, etc.). « Nous avons des partenariats avec Taïwan, Meknès et d’autres structures. Ces collaborations permettent d’accueillir des artistes étrangers et de favoriser les échanges », détaille Bruno Genini. Environ trois à quatre résidences sont organisées chaque année, avec des dispositifs spécifiques pour les artistes taïwanais et marocains. « Ces résidences enrichissent notre programmation et renforcent notre ancrage international. »

Un impact culturel et territorial

En dix ans, la Maison de la BD s’est imposée dans le paysage culturel blésois. Avec 136 000 visiteurs cumulés, elle contribue également à l’attractivité touristique de la ville. « L’objectif était d’intégrer la Maison de la BD dans un circuit culturel plus large, aux côtés du château, de la Maison de la Magie, de la Fondation du Doute et du Muséum », rappelle Bruno Genini. Mais son impact dépasse le cadre touristique. « Des auteurs se sont installés à Blois après avoir travaillé ici. Cela montre que la Maison de la BD joue un rôle dans la dynamisation du territoire », souligne le directeur.

Les défis du secteur

Mais quid de la santé de la bande dessinée dont cette Maison est la gardienne ? « Il y a une féminisation de la profession, ce qui est une bonne chose », observe Bruno Genini. Cependant, les éditeurs indépendants souffrent. « Certains déposent le bilan, et même les grands groupes ressentent une baisse des ventes. » La saturation du marché est un autre problème. « Aujourd’hui, 6 000 titres sont publiés chaque année, contre 600 ou 700 il y a 30 ans. Cela fragilise l’écosystème. » La Maison de la BD s’efforce de soutenir les petits éditeurs, notamment en leur offrant une visibilité lors du festival BD BOUM.

Une décennie et des perspectives

Pour célébrer son dixième anniversaire, la Maison de la BD propose une programmation axée sur les monstres, avec un colloque, des expositions et des ateliers tout au long de l’année. Au printemps, la presse satirique sera également mise en lumière. Une conférence De la Caricature à Charlie Hebdo avec Yves Frémion, écrivain et iconologue, se tiendra dès le jeudi 6 février à 18h30.

Dans le cadre des événements du Bicentenaire de Victor-Auguste Poulain, une exposition Poulain en images (4 février – 1er mars) sera proposée. Organisée en partenariat avec la Ville de Blois, les bibliothèques de Blois – Agglopolys, le Club des amis de Victor-Auguste Poulain, et l’Association Pontlevoy Patrimoine – Art et Culture, elle mettra en lumière l’histoire des célèbres chromolithographies Poulain. Ces images colorées, initialement conçues pour les adultes avant d’attirer les enfants, sont devenues emblématiques de la marque grâce à leur richesse visuelle : dorures, gaufrages, découpes et tissus.

Sur un plus long terme, Bruno Genini reste réaliste sur les défis à venir. « L’économie culturelle est instable, et il devient difficile de se projeter. Une personne supplémentaire dans l’équipe serait essentielle pour développer des missions comme la recherche de mécénat. » Face aux contraintes budgétaires, la culture est face à des challenges. En attendant, sans trop dépenser, la Maison de la BD va fêter ses 10 ans… monstrueusement !

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