Les fantômes de l’Octroi à Blois
Dans une Europe contemporaine de libre échange, il est difficile d’imaginer que la France était jadis entravée par une multitude de frontières intérieures marquant l’entrée de chaque ville : les octrois. Leur histoire est particulièrement marquante à Blois, où des vestiges des anciens bureaux d’octroi sont encore visibles, témoins d’une époque révolue.
Les octrois, instaurés au Moyen Âge, donnaient à une ville le droit de lever certaines taxes sur les marchandises entrant sur son territoire. Bien que supprimés en 1791 pendant la Révolution Française, ils ont été réinstaurés en 1798 et n’ont officiellement disparu qu’en 1948, malgré un assouplissement dans les années 1930.
À Blois, des bureaux étaient installés à seize entrées de la ville. Les véhicules transportant des marchandises destinées à la consommation devaient s’arrêter devant l’un de ces bureaux et s’acquitter de droits. Ces droits variaient selon six catégories de produits, allant des boissons aux combustibles, en passant par les comestibles et les matériaux de construction. Le système était extrêmement complexe et détaillé, avec des tarifs distincts selon la nature et la qualité des produits.
C’est sous le mandat d’Eugène Riffault – maire de Blois de 1848 à 1870 – que les limites de la perception de l’octroi ont été redéfinies. Huit des seize bureaux ont été restaurés ou construits à neuf à cette époque.
Certains de ces bureaux d’octroi ont survécu aux transformations urbaines. Les plus remarquables sont ceux situés à l’entrée de l’avenue Gambetta, érigés en petits pavillons dans le style de la Renaissance par l’architecte Jules de La Morandière. Déplacés en 1888, ils sont un hommage à l’attention portée par Eugène Riffault à l’architecture de qualité, même pour les bâtiments les plus modestes.
L’octroi de la route de Saint-Dyé existe encore au 21 quai Henri Chavigny, une simple maison basse qui se fond dans le paysage urbain. D’autres, comme l’octroi de l’avenue de Paris ou celui de la gare des marchandises, ont été modifiés et sont plus difficiles à reconnaître.
Les octrois ont disparu depuis longtemps, mais leur héritage persiste parfois dans le paysage urbain de Blois. Ils rappellent une époque où chaque entrée de ville était une frontière fiscale…