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Nicolas Orgelet sur les mobilités : « Les choses bougent et l’ambition commune grandit »

La mobilité, l’une des pierres angulaires des transitions urbaines contemporaines, prend une dimension nouvelle à Blois. Qui de mieux placé pour en parler que Nicolas Orgelet, vice-président de l’agglomération de Blois à la transition écologique, co-président du groupe écologiste, et par ailleurs, conseiller municipal et ingénieur paysagiste ? Son double regard, à la fois professionnel et politique, lui permet de porter un éclairage sur la question des mobilités douces, l’avenir des centres-villes et la nécessaire métamorphose de nos manières de nous déplacer.

À l’heure où le débat sur les mobilités alternatives occupe une place de choix, Nicolas Orgelet nous livre sa vision sur le sujet. Entre convictions écologistes affirmées et une volonté de privilégier l’intérêt général, l’élu propose une réflexion profonde sur le futur des mobilités dans l’agglomération blésoise, et au delà.

Blois Capitale : Faut-il un second échangeur autoroutier et/ou un quatrième pont ?

Nicolas Orgelet : Comment pourrait-il raisonnablement être question d’accroître les échanges autoroutiers ? Nous savons qu’élargir la route, c’est augmenter son usage. Et cela nous a mené dans l’impasse qui est la nôtre. Alors que s’amorce enfin, et bien tardivement, un débat sur la relance du train, nous préférons réfléchir de ce côté-là et de celui de l’ensemble des mobilités alternatives. Notre souhait est plutôt de soutenir le financement de nos lignes TER régionales en pleine rénovation pour maintenir la qualité de service et raccourcir même, dans un terme à affiner, les temps de trajet.

Les élus écologistes régionaux ont contribué à un renouvellement de la flotte dont les effets sont déjà perceptibles. Là est l’avenir. Avoir plus de lignes du quotidien, une meilleure fréquence, des prix beaucoup plus bas couplés à des box vélos sécurisés 24h/24. Mais aussi développer des réseaux de bus efficaces là où le train n’est pas possible. Et toujours permettre aux passagers d’emmener leur vélo avec eux dans le train ou le bus par des dispositifs dédiés.

L’intermodalité doit permettre d’allier une qualité de déplacement accrue et plus économique pour les travailleurs, sans piétiner notre avenir commun comme nous nous y employons à chaque fois que nous tombons dans la facilité du tout routier. Il est utile de rappeler que les mobilités sont aujourd’hui notre principale source d’émission de gaz à effet de serre et d’usage des énergies fossiles sur Agglopolys. Et que si nous voulons les décarboner, c’est aussi aux pouvoirs publics de faire leur part pour donner aux citoyens d’autres possibilités de mobilité.

Pour ce qui est de ce que vous appelez un “quatrième pont”, nous avons jusqu’ici soutenu cette passerelle “mobilité douce”, car il y a une symbolique très positive de constater que nous sommes aujourd’hui prêts à investir fortement, non pas pour la voiture justement, mais pour les vélos, les piétons, les chevaux même, et pour un tourisme plus lent en lien direct avec la Loire et la nature qui nous entoure. Le coût de la facture de cette passerelle qui ne cesse de s’alourdir interroge toutefois (le montant étant passé de 12 à 19-22M€ dans les chiffrages le projet est en cours de révision, ndlr). En effet, s’il est pertinent d’oser enfin investir dans les modes de mobilités actives, faut-il le faire dans un équipement à destination majoritairement touristique ? Nous ne le croyons pas, où du moins pas pour un tel montant qui atteint les 20 millions d’euros et devient injustifiable. Il semble que là où nous sommes attendus par les citoyens dans tous les villes et villages, c’est d’abord de faciliter les mobilités du quotidien.

Les transports et l’isolation du bâti sont les deux principales sources de gaz à effet de serre, et dans ces deux domaines, massifier l’investissement apporterait aussi une amélioration significative de la qualité de vie des habitants. Si le département et Agglopolys décidaient de réorienter leur part du budget passerelle pour développer des voies cyclables sur l’ensemble du territoire pour relier les villes entres elles (et coupler cela au renforcement du soutien à l’amélioration de la desserte bus, du transport à la demande et de l’autopartage), l’impact sur nos mobilités et notre confort d’usage serait sans commune mesure avec celui de la réalisation de la passerelle.

Blois Capitale : Estimez-vous que l’avenir de l’hyper-centre est d’être réservé aux piétons ?

Nicolas Orgelet : Je ne sais pas si c’est l’avenir de l’hypercentre d’être réservé aux piétons, car je ne suis pas certain qu’il faille copier l’exemple de toutes les villes françaises où le centre est piéton, mais où la voiture reste reine pour tous les autres espaces. Pour penser Blois demain, il faut avoir conscience de l’histoire de ses quartiers, chercher à développer la mixité et l’équité sociale dans l’aménagement de la ville.​ A mon sens, ce n’est pas spécifiquement l’avenir de l’hypercentre d’être réservé aux piétons, mais plutôt l’avenir des différentes centralités de la ville dans ses quartiers. De la même manière que nous sommes tous blésois mais tous différents, nous avons tous une manière d’habiter la ville qui est particulière. Un travail de concertation avec les habitants pour redéfinir ensemble des espaces apaisés et sans voitures dans chaque quartier, pour favoriser des commerces, des jeux pour enfants, des espaces verts sans véhicules proches des différents espaces de vie quotidiens des blaisois me semblerait plus pertinent.

Parallèlement à cela, je suis convaincu que cette transition doit être conviviale. C’est pourquoi je suis assez favorable à des journées sans voiture qui soient pensées avec les commerçants pour favoriser leurs activités, mais aussi la flânerie dans la ville, au bord de l’eau ou ailleurs. Je crois que pour que cela entre dans les habitudes et les mœurs, il faut instaurer une certaine régularité, rendre le centre-ville entièrement piéton une fois par mois par exemple. Il existait aussi à Blois par le passé une fête populaire où les habitants décoraient leurs vélos avec des fleurs, ça me plairait aussi de la réhabiliter.

Blois Capitale : Quelle part doit être accordée aux mobilités douces, et à l’autopartage ?

Nicolas Orgelet : Cette question s’inscrit dans la réflexion sur la décarbonation de nos déplacements. Telle que la société est organisée aujourd’hui, il est difficile de se passer de la voiture au quotidien. Pour que ce soit possible, il faudrait permettre aux gens de sortir d’une part de la mobilité subie en favorisant le retour à l’accès aux services publics, à la culture, aux activités commerciales, au petit artisanat, au sport dans les quartiers de la ville et dans la ruralité. Pouvoir faire sa carte grise ou ses papiers administratifs dans la mairie la plus proche, c’est réduire son usage de la voiture. Il faut à mon sens rééquilibrer la métropolisation, décentraliser ce qui doit revenir en proximité. C’est aussi une manière de remettre de l’humain dans les territoires et de faire en sorte que la transition écologique permette un renforcement du lien social par le renforcement des services publics. Concentrer les industries et les zones d’activités dans la ville-centre pour éviter l’éparpillement fait sens mais le reste doit être mieux réparti. Ce premier objectif de réduire notre dépendance aux mobilités étant identifié, il restera toujours un besoin de mobilité pour les moyennes et grandes distances et pour exercer de nombreux métiers. Et en cela l’autopartage et les mobilités douces ont toute leur place dans le mix de solutions à mettre en œuvre.

L’autopartage, qui permet de mutualiser nos véhicules, est vraiment intéressant. Sortir d’une économie de la possession pour une économie du partage où l’on mutualise des biens réduit évidemment notre impact. Cela peut permettre à des foyers avec deux voitures de n’en avoir plus qu’une, à des personnes sans emploi de louer une voiture pour aller à des entretiens, à des entreprises d’utiliser un parc de véhicules préexistant, au parc de la puissance publique de mettre ses voitures à disposition des citoyens le week-end, etc.

De même le développement des mobilités actives (ou mobilités douces, mais cela à une connotation plus touristique) est un vrai enjeu. En plus de répondre à un enjeu climatique par la décarbonation du transport, c’est aussi un enjeu de santé par l’activité physique dès l’enfance, de renforcement de notre lien à notre environnement et d’équité sociale (tout le monde n’a pas les moyens d’avoir une voiture).

Nous avons ainsi validé un plan de mobilités actives pour avoir un réseau de lignes cyclables qui relie Blois aux autres communes de l’agglomération sur le modèle des lignes de métro. Mais cela ne doit pas être pensé que par rapport à la ville-centre, et doit aussi s’accompagner d’ateliers de vélo-école (apprendre le vélo, même adulte, peut aussi être un​ moyen d’émancipation pour des publics en précarité, souvent féminins, qui retrouvent ainsi une plus grande liberté dans leur vie quotidienne), d’un budget pour l’entretien de ces voies, etc..

De manière plus générale, c’est l’ensemble des mobilités en ville qui doit être repensé, y compris les bus et le transport à la demande. Généraliser l’usage des zones 30, sécuriser les abords des écoles, accroître la part réservée aux circulations actives en centre-ville, en privilégiant piétons et 2 roues, renforcer l’accessibilité de l’espace public aux personnes à mobilité réduite, tout cela doit être mené parallèlement.

Nous le faisons en ce moment rue du Bourg neuf. Et bien sûr, il faut penser tout cela en même temps que les autres sujets d’aménagement : l’eau, la végétalisation, le mobilier, etc. C’est ce travail que nous avons engagé avec la majorité et dont je me réjouis. Même si j’aimerais parfois que ça aille plus vite et plus fort, les choses bougent et l’ambition commune grandit.

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