1.2.3... Les informationsVie locale

Collège Michel Bégon : un débrayage pour dénoncer délabrement, saleté, conditions de travail

Ce mardi 5 novembre, une partie du personnel du collège Michel Bégon, à Blois, a organisé un débrayage à partir de 10 heures. L’action, menée par des enseignants et autres membres du personnel éducatif, visait à alerter sur des conditions de travail et d’accueil qui ne cessent de se dégrader, tant au niveau des infrastructures que du climat scolaire.

Des locaux vétustes et dangereux

L’état de délabrement des locaux constitue l’une des principales revendications. Toilettes hors-service, faux-plafond décomposé, ascenseur hors d’usage… depuis des années, les infrastructures du collège sont en piteux état, et les promesses de réhabilitation tardent à se concrétiser. « Vous n’avez pas non plus la canalisation qui a explosé en juillet dernier, avec les matières fécales qui se sont déversées dans la cour. Voilà, on a des élèves qui vont aux toilettes à la lumière de leur portable, pourtant interdits dans l’établissement, donc ils sont obligés d’enfreindre cette règle », témoigne une enseignants consternée.

Elle évoque également la présence d’une benne imposante et non sécurisée au milieu de la cour : « Voilà, ça fait partie de toutes ces choses du quotidien qui sont inacceptables. Et on a également moins d’agents, donc c’est sale. Nos salles de classe sont sales ! Non pas parce que nos collègues ne font pas leur travail, mais parce qu’ils ne sont pas assez nombreux. »

Une responsabilité du conseil départemental

La gestion des locaux relève de la compétence du conseil départemental, et c’est bien cette collectivité que le personnel accuse de laxisme. « C’est lié au conseil départemental. Les locaux, c’est le conseil départemental. Ils sont au courant, ils ont la liste des problèmes, on le leur signale régulièrement, mais ça ne change pas », s’insurge un enseignant.

Des exemples concrets, ils en ont à la pelle : « Cela fait deux ans que nos élèves n’ont pas de lumière dans leurs toilettes. Deux ans ! C’est hallucinant… Maintenant, c’est pour les filles et les garçons, mais au début, c’était uniquement pour les filles. »

Les difficultés ne se limitent pas aux infrastructures. « Les chefs d’établissement ne sont pas plombiers, ils font ce qu’ils peuvent, mais voilà. » Ce désintérêt apparent de la part des autorités a un impact direct sur la perception des élèves : « On passe notre temps à leur dire que le respect va dans les deux sens. Là, c’est difficile de l’illustrer avec cette façade en si mauvais état. Et c’est la première chose que l’on voit en arrivant. C’est la réalité de l’état de notre établissement. Elle se dégrade depuis des années et rien ne change », déclare une enseignant, en soulignant la contradiction qui s’installe entre le discours des adultes et la réalité visible.

Collège Michel Bégon

Des effectifs qui explosent, un climat scolaire tendu

Outre l’état des locaux, le personnel dénonce un climat scolaire devenu particulièrement difficile. « Nos effectifs augmentent dans un établissement déjà saturé, qui est censé avoir des effectifs limités et encadrés. Ça ne cesse d’augmenter depuis 10 ans », explique un enseignant. En REP+, où les conditions d’apprentissage devraient être mieux encadrées, les classes sont pourtant surchargées : « On a des dispositifs d’inclusion avec des élèves allophones en UPE2A et des élèves en ULIS. Ces élèves font partie de nos classes, ils travaillent parfois avec leurs professeurs dans des dispositifs spécifiques, mais cela signifie que nos effectifs sont très importants. Faire de la différenciation pédagogique en REP+ dans des classes de 25 élèves est un défi énorme. »

La situation est d’autant plus préoccupante que de nombreux élèves ont des besoins particuliers, rendant l’enseignement encore plus complexe : « Comment prendre en charge correctement un élève allophone qui apprend le français depuis trois mois dans une classe de 25 ? C’est déjà compliqué, et ça se rajoute aux autres problématiques spécifiques à l’établissement. »

Le manque de moyens humains et matériels accentue les tensions : « Le climat scolaire se dégrade, car les effectifs augmentent, ce qui génère plus d’incidents à gérer et des mouvements d’élèves. Cela signifie plus de temps pour traiter ces incidents, et notre service de vie scolaire est constamment sous tension. Tout le monde fait de son mieux, mais on manque de moyens pour faire correctement notre travail », confie un membre du personnel.

Un manque de places en ULIS

La situation est particulièrement alarmante pour les élèves en situation de handicap. « Il y en a dans tous les collèges, mais il manque de places dans le département. Deux élèves ont été affectés il y a un mois, mais cinq autres élèves devraient également avoir une place en ULIS, et ils n’en ont toujours pas. » Et ce n’est pas un problème isolé : « C’est la même situation dans tous les collèges, avec des difficultés pour ces élèves, pour les professeurs, et pour tout le monde. Cela crée de mauvaises conditions pour tout le monde. »

Même si le rectorat semble envisager d’ouvrir de nouvelles places en ULIS, l’incertitude demeure : « Le rectorat envisage peut-être d’ouvrir de nouvelles places, mais avec quels enseignants, quels AESH, et dans quels collèges ? On n’en sait rien », déplorent les enseignants.

Une augmentation des effectifs sans ouverture de nouvelles classes

L’augmentation des effectifs est une autre source d’inquiétude majeure. « Le collège a accueilli 80 élèves de plus ces dernières années, mais sans ouvrir de nouvelles classes. Cela fait quatre élèves supplémentaires par classe en quatre ou cinq ans. » Les conditions d’enseignement se détériorent, d’autant plus que les besoins particuliers se multiplient. « Les conditions ne sont plus les mêmes, d’autant plus qu’il y a davantage d’élèves à besoins particuliers. C’est difficile de travailler correctement. On a des gens de bonne volonté ici, des personnes compétentes, mais quand on n’a pas les moyens, c’est extrêmement frustrant. Et ce sont les élèves qui en pâtissent », conclut un enseignant.

Collège Michel Bégon

Une situation intenable

Pour le personnel du collège Michel Bégon, cette mobilisation était l’occasion de mettre en lumière une réalité intenable : des locaux vétustes, un climat scolaire dégradé, et des effectifs en hausse sans ressources suffisantes pour assurer un enseignement de qualité. Toutes et tous s’accordent à dire qu’il y a urgence à agir pour le bien-être des élèves et des équipes éducatives, et ils attendent désormais des réponses concrètes des autorités compétentes.


Aurélia Stedransky : « Un état de vétusté inacceptable »

Aurélia Stedransky, déléguée départementale du SNES-FSU, revient sur cette mobilisation et ses enjeux.

Blois Capitale : Aurélia Stedransky, quels échanges avez-vous avec la direction et le Conseil départemental suite à ce débrayage ?

Aurélia Stedransky : En tout cas, moi, j’ai compris qu’il y avait des rendez-vous, au moins téléphoniques aujourd’hui. Et demain, trois personnes du Conseil départemental vont venir dans l’établissement pour, enfin, se rendre compte de la situation sur place. Hier, la DASEN a précisé que lors de l’audience de la semaine prochaine, seules les questions relevant strictement de l’Éducation nationale seraient abordées, et non celles qui dépendent du Conseil départemental. Par conséquent, une demande d’audience spécifique pour le Conseil départemental sera envoyée dès ce soir. Ce sont des problématiques qui durent depuis longtemps, le Conseil départemental ne peut plus les ignorer. Le problème, c’est qu’il n’y a pas de veille systématique sur les travaux à effectuer. En plus, on constate que l’éducation prioritaire n’est pas mise en haut de la liste des priorités du Conseil départemental, malheureusement. Cela a déjà été le cas pour le collège Rabelais, que le Conseil voulait carrément fermer. C’est pareil pour Léonard de Vinci et à Romorantin. Cela fait des années que nous alertons sur l’état des bâtiments, et rien n’est fait. Des équipes viennent parfois pour des petits travaux, mais jamais pour des rénovations d’envergure. Pendant dix ans, quasiment rien n’a été fait dans le département. Le Conseil choisit ses priorités, et c’est seulement quand il faut tout refaire de A à Z qu’ils se mobilisent, pas pour des réaménagements intérieurs.

Blois Capitale : Qu’en est-il des agents d’entretien ?

Aurélia Stedransky : Il y a une vraie problématique liée au personnel d’entretien. Le vieillissement des agents, combiné à un recrutement au ralenti, pose de gros soucis. Il y a une politique d’économie sur le nombre d’agents, qui ne tient pas compte de ce vieillissement. Les agents techniques ont de plus en plus de travail, ils vieillissent, tombent malades plus facilement, et quand ils sont remplacés, c’est souvent par des agents dont le temps de service est réduit. Cela entraîne des dégradations supplémentaires. Et on sait qu’en éducation prioritaire, plus un établissement est sale, plus il se dégrade. Cela crée des effets boule de neige dévastateurs.

Blois Capitale : Cela a un impact sur les élèves ?

Aurélia Stedransky : Bien sûr. Les collègues, eux, sont très impliqués pour maintenir un minimum de propreté, mais quand cela dure depuis des années, c’est compliqué. Les lieux ne sont pas respectés, parce que personne ne les respecte derrière. L’hygiène est primordiale, et vous avez entendu parler des toilettes : ne plus avoir de lumière, ce n’est pas possible. On ne peut pas traiter ainsi une population déjà socialement fragile. C’est indigne. Certains élèves rentrent chez eux pour retrouver des conditions similaires, avec un habitat dégradé. Quelle image donne l’État de l’éducation française en traitant les enfants comme ça ? C’est insupportable.

Blois Capitale : Les effectifs posent aussi problème ?

Aurélia Stedransky : Oui, c’est insupportable. Les effectifs augmentent de manière globale, mais aussi au sein des classes, ce qui rend la différenciation pédagogique très compliquée. Le Collège Bégon fait pourtant un travail formidable : il y a un accueil spécifique des élèves de 6e, des projets financés par l’État, et une SECPA pour les élèves en difficulté. C’est un établissement qui se bat pour ses élèves, avec un collectif pédagogique très engagé. Mais tout cela est tenu à bout de bras, et à un moment, on ne peut plus compenser.

Blois Capitale : L’état d’esprit est-il plutôt à la mobilisation ou au découragement ?

Aurélia Stedransky : À la mobilisation, sans aucun doute. Il y a des échanges intenses, une colère qui s’est exprimée collectivement. Les collègues ont fait une liste des problèmes, des tours de vigilance, et il y a une grande solidarité entre les personnels de vie scolaire, les enseignants et les agents d’entretien. On n’est pas opposés à la direction, on travaille ensemble, mais tout le monde est touché par cette situation délétère. Nous devons tous faire pression pour obtenir les moyens nécessaires. L’objectif est d’obtenir des résultats pour que l’année scolaire se termine dans de meilleures conditions qu’elle n’a commencé. C’est indispensable.

Votre annonce sur Blois Capitale

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Bouton retour en haut de la page
Blois Capitale

GRATUIT
VOIR