Des « Arbres qui dansent » et qui font danser Paule Honoré

Le long couloir du Conseil départemental du Loir-et-Cher se transforme, cet hiver, en une forêt. Sur les murs d’une neutralité volontaire, une succession de toiles compose une traversée lumineuse : un chemin de sous-bois, de couleurs en mouvement. Les arbres de Paule Honoré, dressés, multiples, oscillants, accueillent, entourent, enveloppent. Inaugurée le 20 novembre 2025, l’exposition Arbres qui dansent, est ouverte jusqu’au 9 janvier 2026 à l’Hôtel du Département. On y trouve la dimension intime et spirituelle d’un travail né dans le silence des forêts.

« L’arbre devient une présence, un souffle, un mouvement »
C’est Tania André, vice–présidente du département de Loir-et-Cher qui a ouvert le vernissage en citant Victor Hugo : « Je ne puis regarder une feuille d’arbre sans être écrasé par l’univers », avant d’aller plus loin. « Chaque toile témoigne d’une observation précise et d’une émotion traduite avec sincérité. L’arbre devient, sous le pinceau de Paule Honoré, une présence, un souffle, un mouvement. »

« Ils dansent, mais c’est surtout moi qu’ils font danser »
La forêt de Russy, proche de Blois, où l’artiste se promène souvent avec son chien, a compté dans ce travail. La paix des bruits ténus, des gouttes, du mouvement lent. « On a l’impression qu’il ne se passe rien quand on se balade dans la forêt. Et en fait, il se passe énormément de choses… Il y a une grande joie qui se dégage de ces promenades en solitaire. » La série Arbres qui dansent est née de ce lien physique et intérieur au paysage, de la sensation d’être traversée. Les arbres, immobiles et pourtant vibrants, deviennent résonance.

Une découverte venue du temps long
En déménageant deux fois son atelier, Paule Honoré vide des caisses, retrouve des carnets, ouvre le passé. Vingt ans, trente ans en arrière, les arbres sont déjà là. Non pas comme motifs savants, mais comme dessins instinctifs : « des petits crobards sur un bout de papier », surgissant dans les moments de recherche ou de lâcher-prise. « C’était quelque chose de rassurant… d’introspection… des pensées qui s’enchaînent… et je me suis dit : pourquoi ne le ferais-tu pas ? » Ces gestes intimes du passé sont devenus peinture en 2025, année de réalisation de la majorité des toiles exposées.

La quête de la part invisible
En ce jeudi, dans le long corridor éclairé avec précision, le public s’attarde devant les couleurs vives qui se répondent. On reconnaît des explorations saisonnières, rouges flamboyants, verts profonds, bois d’hiver. La forêt est ressentie. Paule Honoré revient plusieurs fois sur l’idée d’un invisible, cette dimension du vivant que l’œil pressé ne voit jamais. « Nos arbres sont là, dressés, mais il y a une part invisible. C’est ce que j’essaie de saisir, et la couleur m’aide beaucoup dans cette espèce de sentiment de la vie qui est là. » Dans le couloir de l’Hôtel du département, les toiles témoignent de ce souffle invisible : coulures, vibrations, verticalités multiples, éclats roses, bleus, verts acides, jaunes. La peinture pulse, elle rend présent.

« J’aimerais que les arbres à perte de vue soient inscrits dans le monde où nous vivons »
La voix de l’artiste se brise brièvement lorsqu’elle évoque les arbres abattus sans nécessité, les forêts qui souffrent. Elle cite L’Homme qui plantait des arbres de Giono, parle de l’imaginaire collectif — Saint Louis rendant justice sous un chêne. Elle dit sa douleur devant la disparition. Et son espoir. Parce qu’ici, la peinture n’est pas décorative. Elle est mémoire, présence, résistance. Les arbres continuent de danser. Et ils font danser Paule Honoré.
Informations pratiques
🖼 Paule Honoré — Arbres qui dansent
🏛 Conseil départemental du Loir-et-Cher — Hôtel du Département, Blois
📅 Du 20 novembre 2025 au 9 janvier 2026


