Près de 68 % des jeunes considèrent la société française comme injuste

Le Baromètre Égalité des Chances, réalisé par l’Ifop pour L’Ascenseur, dresse un portrait détaillé des perceptions, aspirations et obstacles auxquels font face les jeunes en France. Cette enquête, menée en octobre 2024 auprès de 2001 personnes âgées de 12 à 30 ans, met en lumière des fractures sociales et territoriales persistantes, mais aussi une volonté d’engagement citoyen forte.
Une perception d’injustice sociale marquée
Près de 68 % des jeunes interrogés considèrent la société française comme injuste, un chiffre en ligne avec l’ensemble de la population. Toutefois, cette perception varie selon les groupes. Les femmes (73 %) et les jeunes issus des quartiers prioritaires de la ville (QPV) (69 %) expriment un ressenti particulièrement aigu. Parmi les injustices principales identifiées, les inégalités de genre (49 %) occupent une place centrale, suivies par les inégalités salariales (54 %) et celles liées à l’emploi (31 %). Ces chiffres traduisent une sensibilité accrue aux discriminations systémiques, notamment dans les populations déjà fragilisées.
Des regrets liés à l’orientation et à la formation
Le système d’orientation scolaire suscite une critique importante : 35 % des jeunes estiment ne pas avoir bénéficié d’un accompagnement suffisant pour choisir leur parcours. Ce déficit se reflète dans les regrets exprimés, puisque 42 % des actifs et demandeurs d’emploi auraient souhaité changer de voie s’ils en avaient eu l’opportunité. Ce chiffre grimpe à plus de 50 % chez les jeunes issus des catégories populaires. Par ailleurs, 40 % des collégiens, lycéens et étudiants peinent à se projeter dans leur avenir académique.
Un paradoxe entre appréhension et insertion professionnelle
Les jeunes expriment des craintes importantes face au monde du travail : 78 % des collégiens, lycéens et étudiants anticipent leur insertion professionnelle avec appréhension. Pourtant, parmi les actifs, 75 % estiment que leur intégration s’est finalement bien déroulée, révélant un décalage entre perception et réalité. Cependant, cette apparente réussite masque des pratiques préoccupantes : 32 % des actifs et demandeurs d’emploi admettent avoir modifié des informations sur leur CV, une proportion atteignant 48 % dans les QPV.
Fractures territoriales dans l’accès à la culture et au sport
L’accès aux pratiques culturelles et sportives est profondément influencé par des inégalités territoriales. Ainsi, alors que 67 % des jeunes des grandes agglomérations jugent ces activités accessibles, ce chiffre tombe à 44 % en zone rurale. Le cinéma reste l’activité la plus démocratisée (82 % d’accessibilité perçue), mais le théâtre (58 %) et d’autres formes d’expression culturelle peinent à atteindre une large audience.
Inégalités de traitement et discriminations
Les discriminations sont un point noir majeur : 39 % des jeunes pratiquant des activités culturelles disent avoir ressenti des inégalités de traitement, avec des proportions plus élevées dans les catégories populaires (48 %) et les QPV (47 %). Les jeunes pointent des problématiques comme le manque de diversité dans les programmations culturelles ou des expériences d’exclusion directe. Ces discriminations s’étendent également au domaine sportif et professionnel, affectant davantage les publics fragiles.
Une volonté d’engagement citoyen contrariée par les inégalités
Malgré ces obstacles, 80 % des jeunes se sentent légitimes à s’engager dans une cause qui leur tient à cœur. Cependant, seuls 54 % pensent que « nous sommes tous égaux face à l’engagement », révélant des disparités dans les opportunités, telles que perçues.