
À Blois, jeudi, lors d’un afterwork au Saint James, organisé autour du thème « Jeunesse et entrepreneuriat », Mathilde Desjonquères, députée suppléante de la 1ère circonscription de Loir-et-Cher, et Damien Dumont, chargé de mission en entrepreneuriat et transformation numérique à l’INSA, ont donné le ton d’un débat sur les aspirations de certains jeunes qui font le pas d’entreprendre pour changer le monde. Cet événement qui a réuni plusieurs dizaines de personnes dans une idée de rencontre et d’échange, a mis en lumière un phénomène qui gagne en ampleur depuis quelques années, particulièrement après la crise du Covid : l’envie croissante des jeunes de devenir entrepreneurs.
Un élan entrepreneurial post-Covid
En introduction, Mathilde Desjonquères a partagé son expérience en tant que responsable des trophées Femmes de l’économie, soulignant son admiration pour celles et ceux qui, peu importe leur âge, se lancent dans l’aventure entrepreneuriale. « Ce sujet de l’entrepreneuriat, je le vois monter fortement depuis le Covid, et il questionne notre modèle de société à long terme. De plus en plus de jeunes veulent entreprendre », a-t-elle déclaré. Pour elle, cette nouvelle dynamique est révélatrice d’une évolution de la société, où l’entrepreneuriat est perçu comme un moyen de se libérer.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : selon une étude citée par Mathilde Desjonquères, près d’un jeune sur deux, âgé de 18 à 30 ans, souhaite créer son entreprise. Ce chiffre a augmenté de 5 points depuis le Covid. « Cela montre qu’il y a une véritable envie chez les jeunes de se lancer. Pour 65 % d’entre eux, l’important est de changer le monde. »
Un cadre d’accompagnement pour les jeunes entrepreneurs
Damien Dumont, quant à lui, a souligné l’importance de l’accompagnement des jeunes entrepreneurs. Impliqué dans le programme Pépite de la région Centre-Val de Loire, il a expliqué que ce dispositif permettait aux étudiants de se lancer dans l’entrepreneuriat tout en étant encadrés. « Pépite permet de bénéficier d’un accompagnement personnalisé par des experts, de rencontrer d’autres étudiants entrepreneurs et de créer un réseau. Aujourd’hui, nous ne leur promettons pas de devenir riches ou de créer une start-up à succès, mais nous leur donnons les outils pour acquérir des compétences essentielles pour leur avenir. »

L’importance de cet accompagnement se reflète dans les chiffres. En 2024, plus de 300 étudiants entrepreneurs étaient recensés dans la région Centre-Val de Loire, dont 70 à l’INSA, un record pour cette école d’ingénieurs. Damien Dumont a raconté son propre parcours, partageant son expérience du Startup Weekend : « J’ai décidé de participer en tant que simple candidat pour me confronter à ce que je faisais vivre aux autres. Nous avons travaillé sur une idée concernant une app d’organisation des obsèques, et c’était incroyable. Se laisser coacher, même en tant qu’expert, est une expérience très enrichissante. »
Le Startup Weekend
Le Startup Weekend, véritable laboratoire d’idées et de créativité, est un terrain fertile pour ceux qui souhaitent expérimenter l’entrepreneuriat. « C’est 48 heures pour entreprendre, pour tester une idée et résoudre un problème réel », a expliqué Damien Dumont. L’événement permet aux participants de créer des projets de manière collaborative, de les présenter à un jury et de recevoir des retours constructifs. Même si l’idée ne mène pas à la création d’une entreprise, elle permet de développer des compétences et de nouer des contacts précieux.
Lors de l’afterwork, Damien a encouragé le public à tenter l’expérience, rappelant que beaucoup d’anciens participants avaient créé leur entreprise après avoir testé leur idée lors de ces weekends. « C’est un moment de cohésion, où l’on apprend énormément. Vous vous retrouvez à travailler avec des gens que vous ne connaissiez pas, à être coachés, challengeés, et à pitcher devant une centaine de personnes. »
Le prochain Startup Weekend à Blois aura lieu les 15, 16 et 17 novembre (lire ici), et Damien Dumont y participera à nouveau, cette fois en tant que coach. Il sera accompagné de Ryan Abdellaoui, un ancien étudiant de l’INSA qui a également fait le choix de l’entrepreneuriat après ses études. « Ryan m’a confié qu’il ne sera jamais salarié. Il a trouvé sa voie dans l’entrepreneuriat et continue sur cette lancée. »
Encourager les jeunes femmes à entreprendre
Un autre point soulevé lors de cet échange a été la place des femmes dans l’entrepreneuriat. Malgré les progrès réalisés ces dernières années, Mathilde Desjonquères a souligné que les femmes restent encore sous-représentées dans ce domaine. « Il y a encore trop peu de jeunes femmes qui se lancent dans l’entrepreneuriat. Elles sont nombreuses à se mettre des barrières, souvent à tort », a-t-elle regretté. Des initiatives existent pour les encourager, telles que les Wom’Energy Days. « C’est l’occasion de booster les femmes qui hésitent encore à se mettre en avant. »
Gabrielle, une participante de l’afterwork, a apporté son témoignage à ce sujet, confirmant que les femmes ont tendance à moins se valoriser que leurs homologues masculins. « Il faut apprendre à se mettre en avant, à oser, car il y a de vrais liens à créer dans le monde de l’entreprise. »
Un changement de société en marche
Le débat – car les prises de parole se sont multipliées – s’est aussi orienté vers une réflexion plus large sur la place du travail dans notre société. « La génération Z, post-1997, a une vision différente du travail. Pour elle, ce n’est pas une fin en soi, mais un moyen d’accomplir des choses, de s’ouvrir au monde et aux autres », a observé Damien Dumont. Cette génération, plus flexible, cherche à trouver un équilibre entre vie personnelle et professionnelle, souvent en privilégiant l’entrepreneuriat ou des formes d’engagement plus libres, comme le freelance.
Ce modèle, encore peu répandu en France, existe déjà depuis longtemps au Canada, où les grandes entreprises financent des incubateurs de start-ups. « Les grandes entreprises savent que l’innovation vient des jeunes, et elles financent ces incubateurs pour travailler avec eux, sans les absorber. C’est un modèle vertueux qui commence à s’implanter en France », a ajouté Damien.
Si tout le monde ne deviendra pas entrepreneur, cette tendance devrait s’accentuer, avec un impact profond sur notre modèle économique et social. « L’entrepreneuriat des jeunes, c’est une manière de repenser la place du travail dans nos vies, de redéfinir le sens du travail et la valeur qui lui est attachée », a conclu Mathilde Desjonquères.