Les Contes de pierres : un livre collectif qui relie

Jeudi soir, au café-librairie Liber’thés à Blois, les mots de Sophie Orava ont trouvé un public attentif. Entre les tasses, les livres et les regards, elle a lu son recueil à paraître, Les Contes de pierres. Ce moment intime venait clore un long chemin : celui d’une écriture mûrie tardivement, d’un projet collectif qui rassemble textes, illustrations et artisans du livre, et d’un rêve devenu réalité grâce à la ténacité de son autrice.
Si le désir d’écrire remonte à l’adolescence, c’est en 2021 que l’acte d’écriture s’impose vraiment. Un challenge la pousse à rédiger chaque matin. Elle partage alors ses textes avec une amie installée au Canada : « Le midi, je lui lisais, et avec le décalage horaire elle l’avait pour son café. » Les encouragements de cette lectrice lointaine lui donnent confiance. D’autres amis l’invitent à franchir de nouvelles étapes : podcasts, lectures publiques, puis l’idée d’un livre. « Je crois que c’est un cheminement naturel. Mais il fallait ces petits déclics. Toute ma vie, des gens m’ont dit que je devrais écrire. J’avais besoin de ces voix pour oser. »

Des histoires de femmes et de pierres
Les textes rassemblés dans Les Contes de pierres ont été écrits entre 2022 et 2024. Ils reposent sur une contrainte : associer chaque récit à une pierre semi-précieuse de lithothérapie et à une femme à un moment charnière de son existence. « Je suis partie de ce qu’on dit sur les pierres. Certaines sont guérisseuses, d’autres symboliques. C’est une hypothèse, un jeu d’écriture qui ouvre des possibles. » Neuf histoires composent le recueil. Toutes sont inventées, mais nourries d’expériences et de confidences reçues. « Mes textes sont nourris des rencontres féminines de toute ma vie. » Chaque récit se situe dans un temps volontairement indéterminé, mais lié à un lieu réel, celui où la pierre est produite. Chacun est traversé par un même mouvement : partir de l’ombre, parfois dramatique, pour cheminer vers la lumière. « J’ai envie que ce soit des textes qui fassent rêver et qui redonnent de l’espoir. Pas en niant la dureté de la vie, mais en montrant qu’il est possible de se reconstruire. »
La sororité comme fil conducteur
Dans la bouche de l’autrice revient souvent l’idée de sororité, qu’elle élargit à l’adelphité : « Je pense qu’il faut qu’on se serre tous les coudes, qu’on s’écoute les uns et les autres. C’est de l’humanité, simplement. » Pour elle, ces récits portent une bienveillance assumée. Ils s’adressent à tous les adultes, sans limite d’âge, et trouvent un écho aussi bien chez les lectrices que chez les lecteurs.
L’alliance des mots et des images
Dès le départ, Sophie Orava voulait que ses textes soient accompagnés d’illustrations. Elle a laissé aux artistes la liberté de choisir l’histoire qu’ils souhaitaient interpréter. « Ils ont choisi en fonction de ce qui leur parlait. Aucun n’a voulu la même. C’était génial. J’ai seulement imposé un texte, La Femme Lave, à Pierre Champion, parce que je voulais son style. » Au fil des rencontres, neuf illustrateurs rejoignent l’aventure : Annie Bouthémy, Ambroise Creich, Afuro Pixe, Rachel x.x.x., Margaux Breton, Vanessa Barbary, Géraldine Moine, SoSo Art et Pierre Champion. « Ils m’ont livré des illustrations magnifiques qui m’ont émue aux larmes. »
Une édition collective, sans éditeur
Les Contes de pierres ne sort pas par le biais d’une maison traditionnelle. Le livre est autoédité*, soutenu par une campagne de financement participatif lancée sur Ulule (ici). L’objectif est fixé à 2600 euros. Le tirage prévu est de 400 exemplaires, vendus 16 euros. Des contreparties proposent cartes postales illustrées et lots de neuf pierres en lien avec le livre. « On est une bande de perfectionnistes. On veut que le livre nous ressemble, qu’il soit beau, agréable à offrir, et que ce soit une production locale. »
C’est dans cette logique de partage que s’inscrivent les lectures publiques. Sophie Orava les pratique depuis 2024. « C’est du pur plaisir. On écrit un texte, il ne nous appartient plus. Chacun le reçoit à sa façon. Lire en public, c’est voir comment les gens réagissent, comment ils se l’approprient. C’est magique. J’aime bien dire que je suis une troubadouresse, une troubadour au féminin. »
Vers bd BOUM et après
La campagne Ulule doit s’achever le 21 octobre 2025. Si elle atteint son objectif, le livre sera disponible dès novembre et présenté au festival bd BOUM, sur le stand des éditions Un Poil Bleu. Ce sera l’occasion pour Sophie Orava d’offrir aux lecteurs ce premier volume, en cadeau de fin d’année. D’autres projets se dessinent déjà : une série de textes intitulée Ombre et lumière, une autre sur le langage des fleurs, les Contes fleuris. « J’aimerais beaucoup aller les lire chez les fleuristes. »
>> Lien vers le financement participatif : https://fr.ulule.com/les-contes-de-pierres/
*Autour de l’autrice, une équipe assure la qualité de l’ouvrage : correction par Christelle Gigot (Correc’Chris), graphisme par Étienne Pouvreau, couverture en risographie par Judith Braesch (Das Mädchen), impression à Blois chez ISF, et façonnage artisanal par Guillaume Dugast (Tendre Papier), avec une reliure réalisée sur une machine à coudre des années 1960.