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« Ça ne tient plus ! » — À Blois, les associations se rendent visibles pour ne pas mourir

Place Jean-Jaurès, un samedi d’octobre baigné de lumière et de Rendez-vous de l’Histoire, sous une grande structure métallique, une banderole rouge proclame « Ça ne tient plus ! ». Près des tentes, des assemblages de bois forment des sculptures précaires, comme un écho matériel à l’équilibre fragile du monde associatif. La mobilisation a été décidée « dans la précipitation », expliquera plus tard Anaïs Saillau, de la Ligue de l’enseignement 41. Elle répond surtout à un constat, repris par toutes les voix présentes : la situation se dégrade, et le silence n’est plus tenable.

« Notre combat est essentiel pour la République »

Le propos va droit au but : « Les associations que nous sommes répondent aux besoins sociaux. Sans nous, dans différents domaines — le sport, la culture, l’éducation, l’environnement, le handicap, la défense des droits — ce serait difficile. » L’adresse est directe : « Il est temps que les élu·es de la Nation, aujourd’hui dispersé·es, nous entendent. Notre combat est essentiel pour la République. »

La parole est alors transmise à Anaïs Saillau pour « dresser un état des lieux ». La déléguée générale lit la lettre de Claire Thoury, présidente du Mouvement associatif : « Nous sommes 20 millions de bénévoles, 1,8 million de salarié·es. Nous nous engageons dans nos associations pour permettre à 67 millions de Françaises et de Français d’accéder au sport, à l’éducation, à la culture, aux droits. Nous luttons contre la précarité, contre l’isolement. Nous défendons l’environnement. Nous sommes partout et agissons dans tous les territoires, du premier au dernier kilomètre, dans toutes les sphères du quotidien. Et pourtant, nous traversons une crise sans précédent. Depuis plusieurs années, la situation du monde associatif se dégrade dangereusement, dans un silence assourdissant, malgré nos alertes répétées. Les besoins ne cessent d’augmenter : 2,4 millions de personnes sont concernées par l’aide alimentaire. 2 159 enfants dorment à la rue, dont 503 ont moins de 3 ans. Le taux de pauvreté augmente pour la première fois depuis 1996. Dans le même temps, les moyens diminuent. En quinze ans, la part des subventions a baissé de 41 % dans le budget des associations et près d’un tiers déclare revoir les activités à la baisse pour survivre. Malgré cela, 70 000 associations se créent chaque année. Qu’importe l’inflation, la diminution des financements des collectivités, la suppression des emplois aidés, la diminution du nombre de volontaires en service civique, les budgets qui s’effondrent ou les menaces sur les libertés associatives, les associations continuent de faire preuve d’une résilience remarquable. Affaiblir les associations n’a pas de sens. Elles offrent du pouvoir d’agir, construisent des solutions concrètes directement pensées par les populations, renforcent les liens sociaux, donnent du sens, permettent de faire collectif. Elles sont un remède à la crise démocratique et méritent mieux que du mépris ou de la défiance. Notre tissu associatif est un bien commun qui ne doit pas être sacrifié par les coupes budgétaires. »

À Blois, la question posée en miroir des Rendez-vous de l’Histoire (avec pour thème « La France ? ») était volontairement simple et radicale : « Que serait la France sans associations ? Qui serions-nous ? »

Un geste commun

Le rassemblement avait initialement imaginé un die-in — se coucher au sol pour symboliser la mort des associations – comme dans d’autres mobilisations en France. Dans le Loir-et-Cher, un autre choix a été fait : « vivre un moment de fraternité et d’espoir ». Les bras se sont levés, les applaudissements ont résonné pour « dire que nous sommes là, en mouvement, et que nous interpellerons pour que les associations ne meurent pas ».

Ça ne tient plus !

« Faire entendre notre voix tant qu’il reste un peu d’énergie »

Le témoignage de Pascal Le Strat — administrateur à l’ASLD, à la Fédération des Acteurs de la Solidarité (FAS) et à Respire — ancre le débat dans le concret des structures de solidarité. Selon une enquête récente, « entre 20 % et 40 % » des associations de ce champ « risquent d’être en cessation de paiement au mois de décembre », affirme-t-il.

Il identifie trois ressorts de la crise telle qu’elle est vécue par les structures : hausse des charges, en particulier pour l’hébergement ; effet du Ségur qui a relevé les rémunérations sans compensation suffisante ; baisse ou stagnation des subventions malgré l’augmentation des coûts. Il précise que, dans l’hébergement d’urgence, « les besoins pour 2026 sont évalués à 5,1 millions d’euros » au niveau régional quand « l’État dit : 3,5 millions ». Il mentionne également des retards de versement.

Ça ne tient plus !

Le mécanisme est « en cascade » : la région Centre-Val de Loire « fait ce qu’elle peut », mais subit des baisses de dotations ; les conseils départementaux « serrent la vis ». D’où la nécessité, dit-il, de « faire savoir que les associations sont au bout du rouleau » tant qu’il reste « la capacité et l’énergie pour faire entendre notre voix ».

Le « muscle » du bénévolat fatigue

Pascal Le Strat décrit la tension dans ce qu’il appelle « le muscle du bénévolat » : une fatigue profonde, visible dans le vieillissement des conseils d’administration, la difficulté de renouvellement, la concentration des mêmes personnes dans plusieurs instances. Il insiste sur un point jugé non négociable : dans des associations qui travaillent « avec de l’humain », les bénévoles ne peuvent pas remplacer les salarié·es qualifié·es. Ils et elles agissent « en périphérie du travail du salarié », mais « cette périphérie n’est pas extensible ».

Ça ne tient plus !

La même question revient comme un fil : « Qu’est-ce qui fait tenir le corps social ? » Les arbitrages budgétaires, rappelle-t-il, sont politiques. Il cite un exemple : dans le Loiret, la réduction d’une subvention au bénéfice de Cultures du Cœur. Ce samedi, il ne s’agissait pas d’un défilé ou d’un mot d’ordre de parti, mais d’une manière d’énoncer ce que les associations font chaque jour et ce qu’elles ne pourront plus faire si l’érosion continue.

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