Blésois ou Blaisois, telle est la question…
La question de savoir s’il faut écrire « Blésois » ou « Blaisois » a suscité des débats et les réponses varient selon que l’on se base sur l’étymologie, la philologie ou l’usage.
Du point de vue étymologique, il est nécessaire de remonter aux plus anciennes mentions du nom de Blois pour se faire une idée claire. Ces références remontent à l’époque mérovingienne. En 584, Grégoire de Tours mentionne les habitants du coin sous le nom de « Blesenses », mais il omet de donner le nom de la ville qu’ils habitent… Un siècle plus tard, au VIIe siècle, des monnaies mérovingiennes portent l’inscription « Bleso castro« . Certaines pièces de monnaie, créées selon le type monétaire de l’édit de Pîtres en 864, portent l’inscription « Blesianis castro ». Enfin, une charte datée de 903 situe une terre « in Blesis castro ». Naturellement, les textes médiévaux reprennent le même radical, que ce soit pour le château, « castello blesensi », ou pour les comtes de Blois, « Blesis comes ». Les premières chartes blésoises rédigées en français à la fin du XIIIe siècle ne mentionnent que les « habitants de Blois » sans les nommer de manière plus précise.
Au XIXe siècle, Touchard-Lafosse a voulu faire de « Castrum blesense » une déformation de « Castrum belsense », c’est-à-dire le château des Beaucerons, et Louis de La Saussaye a tenté de rapprocher « Blesia », l’ancien nom de Blois, de « Belsia », la Beauce. Ces étymologies sont tentantes mais invérifiables, juge Bruno Guignard dans « Blois de A à Z » (Alan Sutton). Qu’elles soient vraies ou non, il est indéniable que tous ces mots, Bleso, Blesianis, Blesis et leurs dérivés, s’écrivent toujours avec un « e » et non avec la diphtongue « ai ». Si l’on devait s’en tenir à l’étymologie latine, c’est bien la graphie « Blésois » qu’il faudrait adopter.
L’origine de la graphie « Blaisois » pourrait se trouver dans l’une des propositions faites par Louis de La Saussaye, qui pense que Blois peut venir du mot celtique « bleiz » ou de sa variante gaélique « blaiz », signifiant loup. Selon lui, cette étymologie justifierait la présence du loup dans les armoiries de la ville. Cependant, encore une fois, cette origine est difficile à vérifier et repose uniquement sur des suppositions.
La graphie « Blaisois » ne semble pas être attestée avant la fin du XVIe siècle, mais elle apparaît au XVIIe siècle sur plusieurs cartes géographiques du « Pays blaisois ». À une époque où l’orthographe française n’était pas encore bien fixée, peut-on considérer comme preuve la légende de cartes publiées à Paris par des marchands qui ne sont ni des géographes ni des philologues ?
La véritable discussion sur le plan philologique a commencé à la fin du XIXe siècle. En juin 1889, Adrien Thibault affirma que pour établir l’orthographe des mots qui dérivent directement d’un nom de lieu dans sa forme française, il n’est pas nécessaire de se préoccuper de l’origine de ce nom. Selon la méthode habituelle de formation, « Blois » aurait dû donner « bloisois ». Cependant, pour des raisons d’euphonie, de commodité de prononciation et de satisfaction de l’oreille, on a dit « blaisois ». Cette transformation de la diphtongue « oi » ou « ai » (ou « ei ») est très fréquente en français. Evidemment on peut rétorquer à l’encontre de cette démonstration que le véritable son de « ai » est « é » et non « è ». On prononce « Blésois ». Et puis, c’est « Blesenses » qui a donné « Blois ». Les « Blesenses » ont donné leur nom à la ville de Bles, où ‘e’ se traduit comme dans ‘rex’ par ‘oi’, ce qui donne Blois.
Quelle est la réponse finale ?
Finalement, c’est l’usage qui l’a emporté. Et il est maintenant d’usage d’écrire « les Blésois » pour désigner les habitants de la ville et « le Blaisois » pour désigner le secteur autour de Blois. Donc, les Blésois habitent le Blaisois.