Jérôme Demilly : « Je me suis senti désiré par le Loir-et-Cher »

Jérôme Demilly n’a rien d’un aventurier sans attaches. Et pourtant, c’est avec une légèreté presque tranquille qu’il raconte leur neuvième déménagement en famille, depuis le Nord jusqu’à Blois, à l’automne dernier. Loin de toute impulsivité, ce changement de région s’est fait au fil des circonstances et d’une conviction nouvelle : le Loir-et-Cher leur tendait les bras.
« C’est notre fils aîné qui a tout déclenché, explique-t-il. Il a intégré le lycée militaire de l’armée de l’air à Saintes, à 16 ans. Ça a remis en question notre implantation dans le Nord. » Avec son épouse, fonctionnaire dans le domaine de la Défense, ils décident alors de changer de région. Ce sera « la Loire », d’abord sans localisation précise. Tours est envisagée, Angers aussi. Mais c’est finalement dans le Loir-et-Cher que les choses s’alignent.
Au départ, l’objectif est clair : que son épouse trouve un poste avant lui. Elle décroche un entretien dans le Loir-et-Cher début septembre. Le lendemain, la proposition est confirmée. « Là, on a eu un petit moment de panique, se souvient Jérôme Demilly. On pensait que ça allait traîner jusqu’à janvier, et tout s’est accéléré. » Commence alors une course contre la montre. En quelques semaines, il faut tout quitter, chercher un logement et prévoir la scolarité du plus jeune de leurs deux enfants. C’est à ce moment-là que l’agence d’attractivité du département, Be LC, entre en scène. « J’ai eu Aurore au téléphone. Elle nous a présenté ce qui se faisait ici pour accueillir les nouveaux arrivants, notamment l’accompagnement des conjoints, les afterworks, l’aide pour la scolarisation. Franchement, c’est rare. On s’est sentis attendus. »
C’est cette sensation, inhabituelle pour des urbains rompus aux déménagements, qui fait basculer la décision. « On ne connaissait personne, on ne savait pas à quoi ressemblait Blois. Mais l’accueil a fait la différence. » Tours leur paraît trop vaste, trop proche d’un retour à Paris — où ils ont vécu cinq ans. Amboise, un moment envisagée, offre peu de logements. Blois, au contraire, regorge d’opportunités, tant immobilières que humaines.
Ils emménagent dans un appartement du quartier de l’hôpital, à deux pas du collège des Provinces, début octobre. « On a fait une visio pour visiter, et on a dit oui. Il fallait aller vite. » Le choc est net : plus de métro, plus d’embouteillages, tout est à dix minutes à pied. « C’est un autre rythme de vie. Mais on a mis du temps à décompresser, à sortir du stress permanent du Nord. »
Le quartier, inconnu jusqu’alors, leur plaît : proximité de la Loire, espaces verts, calme relatif. « C’est presque la campagne en ville. On voit des écureuils, on marche le long de la Loire, c’est agréable. » Leur quotidien change du tout au tout. Leur deuxième fils reprend ses activités de scoutisme à Montrichard, la famille visite régulièrement les châteaux et se rend au zoo de Beauval. « On a l’impression d’être en vacances le week-end. »
Pour autant, tout ne s’est pas déroulé sans heurt. Jérôme Demilly reste sans emploi jusqu’à fin février. « J’envoyais des CV, mais les retours étaient rares. C’est par le bouche-à-oreille que les choses ont avancé. » Une opération chirurgicale à l’oreille, début janvier, retarde aussi sa reprise d’activité. Il finit par rejoindre Aderim, une société d’intérim bien implantée dans le département, comme responsable d’agence (en face du Jeu de Paume). « Je reprends un réseau, je recrée des liens. Et au passage je me rends compte que la culture du téléphone est moins forte ici. Pourtant, moi, j’ai toujours fonctionné à la voix, à l’humain. »

Cette expérience en ressources humaines, Jérôme Demilly l’a acquise durant plus de vingt ans, dans le Nord et à Paris, en agences d’intérim, puis en cabinets de recrutement. À Blois, il décide de s’impliquer aussi dans le tissu local : le club Salamandre Blois Business, prochainement le Rotary. Et il participe aux afterworks organisés par Be LC. Le nordiste de 47 ans découvre également les codes locaux, les distances perçues autrement : « Pour nous, 30 minutes, c’est rien. Ici, on me dit parfois que Contres, c’est trop loin… » (rires)
En appartement, la famille projette désormais d’acheter une maison, dans un secteur bien desservi. « On cherche un compromis entre un peu de campagne et des transports pour notre fils. Ce qui nous manque actuellement, c’est un extérieur, après 15 ans en maison. » Ce qui les rassure, en revanche, c’est l’équilibre trouvé. La transition rapide a porté ses fruits. « On a quitté Lille, son bruit, ses embouteillages, ses frites aussi, plaisante-t-il. Mais on a gagné une qualité de vie. » Ils découvrent une ville à taille humaine, des événements culturels, un patrimoine accessible. Le souvenir des châteaux visités en 2021, à l’été encore marqué par le Covid, avait laissé une empreinte positive. Il s’est transformé en ancrage. « Ce territoire, on ne l’avait pas prévu. Mais c’est lui qui nous a choisis. Et ça, c’est fort. »
Pourtant, il y a un point sur lequel Jérôme Demilly ne transige pas : « Il n’y a pas de baraque à frites dans le coin ! » Le ton est léger, mais le manque bien réel. Lui qui vient du Nord, où la frite est presque une institution, n’a pas encore trouvé de véritable équivalent local. « Celui qui veut créer un petit business, je pense qu’il y a des parts de marché à prendre ! » (rires) Mais ces détails ne pèsent pas bien lourd face à ce que leur a offert le Loir-et-Cher. « En tout cas, on est vraiment contents d’être là. » Depuis leur arrivée, ils multiplient les découvertes, les sorties, les rencontres. Le territoire, ils ne l’ont pas seulement adopté ; il les a accueillis. Et ce sentiment, Jérôme Demilly le résume simplement, sans emphase : « On s’est sentis désirés. »