Musicales 41
PolitiqueVie locale

Le Département au fil de l’effet ciseau

Les futurs professionnels de santé du Loir-et-Cher sont déjà parmi vos proches !

En ce jeudi la rentrée du Département a pris la forme d’un inventaire concret et d’un plaidoyer, dans une même respiration, où l’action se mesure à l’épreuve des chiffres, des chantiers visibles et des angles morts. Lors d’un point presse, son président, Philippe Gouet a d’abord tenu le fil par les solidarités, cette part massive du budget qui pèse, dit-il, 62% et dont le schéma 2024-2028 avance « bien ». La finalité n’a pas bougé : accompagner ceux qui traversent la difficulté ou la fragilité, leur ouvrir un accès lisible, sortir les acteurs du médico-social de leurs silos. Quinze actions prioritaires sont engagées en 2025 et le réseau des Maisons départementales des solidarités se redéploie en douze implantations complétées d’antennes, maillage qui doit rapprocher l’aide de la vie quotidienne.

Santé : un guichet unique pour atterrir sur le territoire

La santé, avec son plan « 41 en bonne santé », répond au même souci d’atterrir. Neuf axes pour attirer des professionnels, une agence d’attractivité – BeLC – en guichet d’entrée, et, en deux ans, 104 installations durables dont 45 médecins. L’accès aux soins n’est pas résolu, concède Philippe Gouet, mais il s’est amélioré, juge-t-il. À Paris, au Sénat comme à l’Assemblée, le président du CD41 dit porter pour Départements de France un schéma départemental d’organisation des soins qui territorialise la politique de santé, avec l’idée simple et obstinée d’un guichet unique capable d’accueillir ceux qui s’installent, d’accompagner leur projet de vie, d’encadrer correctement les stages des étudiants en médecine et des professions paramédicales.

Santé mentale et ASE : l’urgence des moyens

Dans ce paysage de rationalisation pragmatique, un point dur s’impose : la santé mentale. La visite du Président de la République à Pontlevoy, officiellement placée sous le signe du patrimoine, a permis d’en parler au détour de Stella Maris, structure qui accueille des jeunes en situation de handicap mental. Le sujet, annoncé hier priorité par Michel Barnier, s’est dissout.

La protection de l’enfance est en hausse : fin 2023, 384 900 jeunes bénéficient d’au moins une mesure d’ASE, dont 221 000 sont accueillis hors de leur milieu de vie habituel. Près d’un quart d’entre eux présentent des troubles psychiatriques ou psychologiques sévères. Or, vingt départements n’ont aucun pédopsychiatre ; trente n’en ont qu’un ; les délais oscillent entre six mois et un an. Le Loir-et-Cher en fait partie, avec un seul pédopsychiatre à Romorantin et la même attente d’un an. La scène est connue : un adolescent après une tentative de suicide, quelques heures d’hospitalisation, puis la sortie sans solution. La réponse proposée par Philippe Gouet est structurelle : former davantage d’infirmières en pratique avancée en santé mentale, créer un diplôme d’État de psychologue-clinicien pour harmoniser des pratiques aujourd’hui disparates.

Routes et mobilités : entretenir d’abord, étirer le calendrier ensuite

Lorsque la conversation glisse vers les mobilités, le ton ne quitte pas la même sobriété budgetaire. 3424 kilomètres de routes, 700 ouvrages d’art, et le pont Charles-de-Gaulle rénové pour neuf millions d’euros pris en charge par le seul Département. Dans le Loir-et-Cher, l’effort d’entretien est maintenu, « parce que différer coûterait plus cher demain » suite aux dégradations.

Le schéma départemental des mobilités promettait 107 kilomètres de liaisons douces à l’aube de 2030 ; l’horizon n’est pas renié, mais il sera peut-être étiré dans le temps, au rythme des contraintes budgétaires.

Sur la Loire, l’estacade de la future passerelle a surgi et inquiété les regards qui la prennent pour l’ouvrage définitif ; or elle n’est qu’une plateforme de chantier. Les piles seront consolidées, la charpente métallique – près de six cents tonnes – fabriquée puis assemblée, le tablier posé. Si tout va bien, l’inauguration interviendra fin printemps 2027. Le financement associe Région, État, Agglopolys et Département. L’usage est déjà esquissé : cyclotourisme de la Loire à vélo et ses deux millions de passages annuels, trajets domicile-travail entre Vineuil et La Chaussée-Saint-Victor évalués à environ 200 traversées quotidiennes.

Collèges : reconstruire, mais décaler si nécessaire

Dans les collèges, 26 établissements composent un chantier permanent. La rénovation et la construction avancent au prix de budgets lourds, 14 à 15 millions d’euros en moyenne pour un collège, avec la perspective d’éventuels décalages si la visibilité financière se brouille. Bracieux, Saint-Laurent, Montoire ont jalonné le chemin, Neung-sur-Beuvron est achevé ; les prochains devraient concerner Veuzain-sur-Loire, puis Saint-Amand-Longpré, puis Selles-sur-Cher. À Blois, le dossier Rabelais s’écrit dans le cadre de la cité scolaire Camille-Claudel pilotée par la Région : une extension, et non une surélévation devenue impossible techniquement, des fonctions communes mutualisées.

Un nouveau site web

Inaugurée en mars, la Cité du numérique déploie 2000 mètres carrés pour former, informer, expérimenter. L’école de codage y signe une deuxième promotion ; presque tous les jeunes de la première ont trouvé un emploi, parfois en Loir-et-Cher où la demande est forte. On y travaille l’illectronisme, on y construit des ateliers de prévention sur les cyberattaques et le cyberharcèlement, pensés pour protéger les adolescents. L’agence d’attractivité BeLC s’y est installée, manière d’incarner une modernité assumée. Le site web du Département a basculé sur une version plus fluide et interactive, avec un chatbot au service des usagers, des dépôts en ligne pour les demandes des citoyens et des maires. La fibre, elle, a couvert 98% du territoire ; restent des raccordements complexes, techniquement et financièrement, à résoudre d’ici 2026 avec le SMO, dix millions d’euros à boucler en lien avec l’État pour tenir la promesse initiale partagée avec l’Indre-et-Loire.

Compensations de l’État : l’équation nationale qui manque

À plusieurs reprises lors de ce point presse, la contrainte financière a été le grand sujet. L’effet ciseau n’a pas desserré son étau, entre recettes en berne et dépenses sociales qui gonflent. Les DMTO refrémissent avec +15% en 2025, mais en partant de la base la plus basse après une chute de plus de 35% sur trois ans. L’épargne nette s’est amenuisée de 80% en trois exercices, au point qu’il faudra éviter qu’elle ne devienne négative en 2026.

L’investissement visé l’an prochain reste cependant à haut niveau, 58 millions d’euros, 10% de moins qu’en 2025 mais comparable aux années 2019-2021, au prix d’un recours à l’emprunt qui grimpera vers 35 millions d’euros, record triste pour le Département. Les mots prennent alors une autre texture : il manque douze milliards d’euros au niveau national sur la compensation des aides individuelles de solidarité, qui couvraient 70% il y a dix ans et plafonnent désormais à 40%.

La visibilité nationale est brouillée. L’an dernier, deux milliards d’économies avaient été ponctionnés sur les collectivités, dont près d’un milliard pour les départements. Depuis seize jours est en place un nouveau Premier ministre, et les ministres sont démissionnaires. Donc pas de cadrage budgétaire précis. Départements de France a alerté pour éviter l’asphyxie d’un échelon : les collectivités réalisent 70% de l’investissement public local. « Si l’on serre trop, les travaux publics et le bâtiment, déjà éprouvés, casseront vite », annonce Philippe Gouet. La demande est simple et réitérée : compenser intégralement les dépenses nouvelles imposées, du RSA au Ségur.

Sur le RSA, la hausse de 1,7 % a été appliquée par la CAF, le Département a provisionné, mais il réclame une année blanche 2026 et, au fond, une logique de dialogue en amont plutôt que des annonces par voie de presse. En Loir-et-Cher, plus de 7000 bénéficiaires pour un coût annuel de cinquante millions d’euros.

À ces forces qui compriment, se superpose une conjoncture qui menace de remonter le nombre d’allocataires. Le chômage rebondit légèrement, 6,4 % au deuxième trimestre 2025 (7,5 % au national). Les défaillances d’entreprises s’accumulent. La sous-traitance automobile inquiète, l’avenir du site Bosch à Vendôme reste incertain, quand d’autres filières – aviation, armement, pharmaceutique, cosmétique – tiennent mieux la mer.

Dans la préparation budgétaire, la prudence s’impose : le vote est reporté à février comme l’an dernier, l’objectif est de neutraliser l’évolution des dépenses de fonctionnement, et l’effort se jouera sur le lissage des opérations neuves, qu’il s’agisse des sections cyclables ou de certaines reconstructions de collèges. Les routes et les ouvrages d’art, eux, continueront d’être entretenus, parce que l’économie de court terme finit toujours par coûter davantage. Les aides aux communes sont maintenues, douze millions d’euros annoncés pour 2026, dont cinq millions et demi au titre de la dotation départementale de solidarité rurale (DDSR), dotations très attendues, souvent décisives dans les projets de patrimoine qui, pour beaucoup de villages, prennent la forme d’une église à sauver.

Au milieu de cette géographie des priorités, un dernier trait s’esquisse sur la fiscalité des cartes grises. Le réseau routier départemental est le plus étendu du pays ; les Régions bénéficient du produit d’un impôt dont elles ne portent pas la charge. « Une part pourrait revenir aux Départements pour l’entretien des chaussées et des ponts », estime Philippe Gouet.

Votre annonce sur Blois Capitale

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Bouton retour en haut de la page
Blois Capitale

GRATUIT
VOIR