Manolo Chrétien : l’émerveillement comme philosophie de vie et moteur artistique
Dans le cadre de notre consultation « Qui est la personne la plus cool de Blois ? », après François et Amélie, voici un nouveau portrait, celui de Manolo Chrétien, photographe plasticien, que nous avons pu contacter… dans le Finistère. En duo avec sa femme Céline Pia, il explore des territoires entre abstraction et figuration, dans une création empreinte de liberté. Retour sur une rencontre inspirante avec un artiste en perpétuel mouvement.
De Blois à la Bretagne : un retour aux sources
Manolo Chrétien, bien connu à Blois, est désormais souvent dans le Finistère Nord, à Santec, un village côtier proche de Roscoff. Ce déménagement, qu’il qualifie de « rêve devenu réalité », marque une étape importante dans son parcours de vie. Originaire de Bretagne, il est profondément attaché à cette région, où réside encore une grande partie de sa famille. « Ce sont des coins superbes. La région est parfaite pour les sports de glisse que j’adore, comme le windfoil. Blois, c’était bien, mais la Loire pour faire du kite, c’était… disons, expérimental ! Je me souviens de sauts entre le pont Jacques-Gabriel et le pont Charles-de-Gaulle. Un vrai défi ! »
Ce nouveau cadre de vie, entre mer et vent, semble parfaitement correspondre à l’esprit libre et aventureux de Manolo Chrétien. « Avec ma femme Céline Pia, nous avons toujours cherché un mode de vie simple, libre et connecté à la nature. Depuis que nos enfants, Thomas et Alice, sont grands, nous vivons à 110 % de notre art. C’est une chance inouïe, même si ce n’est pas simple économiquement, surtout depuis la Covid. Nous avons beaucoup voyagé dans un van avant de nous poser en Bretagne, un mode de vie qui nous a appris à apprécier chaque instant et chaque lieu. »
Une enfance bercée par l’aviation
Si la Bretagne occupe aujourd’hui une place centrale dans la vie de l’artiste, c’est l’univers de l’aviation qui a marqué ses premiers émois artistiques. Fils de Jean-Loup Chrétien, célèbre pilote d’essai et spationaute, Manolo a grandi au cœur des bases aériennes. « Mon père, pilote d’essai du Mirage F1, a marqué mon enfance. Nous vivions près de la piste de la base aérienne d’Orange, où les avions passaient en rase-motte au-dessus de notre maison. Ces souvenirs d’enfance m’ont profondément imprégné. »
En 1995, lors d’un passage à Châteaudun, il redécouvre cette fascination pour les avions. « En voyant les carlingues abandonnées sur les pistes, j’ai eu un déclic. J’ai commencé à explorer la lumière et les reflets de ces surfaces métalliques, ce qui m’a conduit à développer mes ‘Aluminations’. »
L’aluminium : un support signature
L’utilisation de l’aluminium est rapidement devenue la marque de fabrique de Manolo Chrétien. Ce matériau, qu’il décrit comme vivant et vibrant, sublime les reflets et la lumière dans ses photographies. « L’aluminium reflète la lumière de manière unique, donnant vie aux clichés. Que ce soit des carlingues d’avions, les façades métalliques de New York ou les vagues de Bretagne, tout prend un aspect presque holographique. Ce support sublime les reflets, comme une ‘peau de sardine’ sur les vagues, et apporte une intemporalité aux œuvres. »
Une quête de l’intemporalité
Pour Manolo, l’art est avant tout une quête de durabilité et de sens. « Mon ambition est de créer des œuvres qui traversent le temps, que les gens peuvent contempler quotidiennement sans s’en lasser. Je ne cours pas après les modes ; je vise une signature unique et une durabilité dans le regard. »
Un duo créatif avec Céline Pia
Manolo ne travaille pas seul. Avec sa femme Céline Pia, il partage une collaboration artistique intense et harmonieuse. Ensemble, ils réalisent des œuvres qui mêlent abstraction et figuration, dans un hommage à la nature. « Nous vivons dans un état d’émerveillement permanent. Cela ne nécessite pas de grands voyages : même près de chez nous, il suffit d’un regard neuf pour redécouvrir la beauté du quotidien. »
Leur processus de création est méticuleux, mais spontané. « Ça commence toujours par un morceau de musique que nous choisissons ensemble. Chaque œuvre est liée à une chanson ou à une musique. On a une playlist interminable, remplie de morceaux qui nous accompagnent depuis des années. Ensuite, je commence. Je suis un peu le fêlé du pinceau : je trempe mes outils dans la peinture, porté par le rythme de la musique, et je jette des traits sur la toile. Ce premier geste est instinctif, abstrait, presque irréfléchi. Une fois que tout est sec, Pia ajoute sa touche figurative, qui donne un sens végétal à mes gestes abstraits. On passe de l’abstraction à la figuration. De près, on distingue les coups de pinceaux, les mouvements bruts de la peinture. Mais de loin, des formes naturelles émergent : des feuilles, des algues, des gorgones. »
Cette complémentarité est essentielle à leur démarche. « Nous travaillons souvent ensemble sur cette deuxième étape. Cela nous permet de nous accorder sur le moment où il faut s’arrêter, quand nous considérons l’œuvre terminée. »
L’eau comme inspiration actuelle
Aujourd’hui, c’est l’eau qui nourrit principalement l’inspiration de Manolo Chrétien. Dans ses clichés grand format, il capture la texture métallique des vagues bretonnes, photographiées en contre-jour. « La mer, c’est un reflet du ciel. Dans nos régions ventées, avec leurs nuages permanents, on trouve des lumières incroyables sur l’eau. Mes clichés tentent de capturer cet effet métallique, cette ‘peau de sardine’ ondulante. »
Son travail sera présenté lors d’une exposition au printemps prochain, sur l’île de Ré, avec des formats allant jusqu’à 1,20 m x 2 m. « Plus on est grand, plus on ressent la puissance de la nature. C’est une façon d’honorer la force brute et la beauté intemporelle des éléments. »
Entre Blois et Bretagne : une vie en mouvement
Manolo Chrétien est un artiste complet, qui puise dans ses souvenirs, ses voyages et sa connexion avec la nature pour créer une œuvre universelle et intemporelle. Entre abstraction et figuration, lumière et matière, il nous invite à poser un regard neuf sur le monde qui nous entoure.
Bien qu’il vive désormais essentiellement à Santec, Manolo reste attaché à Blois, où Céline Pia continue d’animer des workshops. « Blois restera toujours une étape importante dans notre vie. Nos enfants y sont nés, et c’est là que nous avons commencé à construire notre parcours artistique. »