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Pierre-Gilles Parra : « Retrouver nos forces dans une tradition gaulliste »

Naviguant dans un paysage politique complexe où il se trouve coincé entre la majorité présidentielle et l’extrême droite du Rassemblement National (RN), le parti Les Républicains (LR) joue gros lors des élections législatives anticipées. Le gaulliste Pierre-Gilles Parra, trésorier de la fédération LR de Loir-et-Cher, est candidat* dans la 1ere circonscription, désigné par le Bureau et la Commission Nationale d’Investiture. « Il y a eu un concours de circonstances malheureux à cause du coup de force d’Éric Ciotti**, intervenu peu de temps après ma volonté de m’engager dans ces élections législatives. Il y a eu quelques turbulences, évidemment ; les choses ont été suspendues, ne serait-ce que pour 24 ou 48 heures. Puis, en fin de semaine, la commission d’investiture, le siège à Paris, a statué en faveur de ma candidature. Pour moi, il était clair de ne pas suivre Ciotti. »

La décision controversée d’Éric Ciotti, d’aligner le parti avec le RN contre la volonté de nombreux cadres est un sujet. Est-il toujours le président des LR ? « Dès le départ, il était clair que Monsieur Ciotti allait être exclu du parti, estime Pierre-Gilles Parra. Aujourd’hui, il se considère comme le président, mais il a agi dans le dos des cadres du parti, et des militants. Nous, en Loir-et-Cher, restons gaullistes et attachés aux valeurs démocratiques, sans avoir de leçons de patriotisme à recevoir. Sans oublier notre engagement pour les libertés économiques et la réalité économique actuelle, des domaines dans lesquels le RN est totalement décalé. »

Mais rien n’est simple en cette période. Patrice Martin-Lalande, député LR de Loir-et-Cher de 1993 à 2017, appelle en effet à voter pour Marc Fesneau (Ensemble) dès le premier tour dans la circonscription afin d’éviter une dispersion des voix qui bénéficierait « au RN et LFI ». Et il écrit : « Pour la raison qui l’emporte sur toute autre considération : Marc Fesneau est le candidat qui sert le mieux le Loir-et-Cher et la France que nous aimons. » De quoi plomber la candidature de Pierre-Gilles Parra. « Je me méfie des effets rhétoriques de ce genre de déclaration. La France que nous aimons… est-ce que Monsieur Fesneau est vraiment le bon candidat pour la protéger ? En tout cas, il a été très contesté concernant sa politique agricole. Pour moi, la France que j’aime, c’est aussi et surtout la France des territoires, la France de la ruralité, répond le candidat. Je crois que Monsieur Lalande se trompe lourdement. Ex-élu, il a le devoir de défendre la ruralité, notamment dans sa dimension agricole. Je ne comprends pas cette prise de position ; à mon avis, elle n’engage que lui. Il semble se mettre en opposition avec le parti Les Républicains qui a investi ma candidature de manière tout à fait légitime. Monsieur Lalande n’a pas de contingent de votes ; et ce sont les électeurs qui décident. La démocratie, ce ne sont pas réseaux que l’on jette dans la bataille. »

Dans une Assemblée nationale possiblement sans majorité, des alliances peuvent se créer. Député, avec qui Pierre-Gilles Parra pourrait s’associer ? « Si je suis élu député, je ferai partie d’un groupe parlementaire Les Républicains. Il y aura du travail à faire dans des commissions parlementaires sur des sujets cruciaux pour les Français, et c’est là l’essentiel. Pour l’instant, il n’est pas question de savoir quelle coalition ou alliance peut être formée, mais plutôt de se concentrer sur le travail parlementaire qui doit être effectué. »

Blois Capitale : Aujourd’hui LR propose dix mesures principales. A commencer par une réindustrialisation du pays. Mais comment ? Et que faire par exemple dans le cas de la fermeture de l’usine Poulain à Villebarou ?

Pierre-Gilles Parra : Pour commencer, nous allons prendre acte des problèmes auxquels sont confrontés les salariés, et étudier comment nous pouvons favoriser la profitabilité des sites industriels. Cela permettra d’éviter que les investisseurs ne décident de délocaliser simplement en consultant un tableau de bord. La délocalisation de l’usine Poulain est significative ; elle représente une part du patrimoine et de l’identité de notre territoire. Nous devons comprendre ce qui a conduit à cette situation. S’il s’agit d’un problème de productivité financière, ou si des contraintes administratives ont joué un rôle, nous devons le savoir. Notre département est reconnu pour son industrie agroalimentaire, avec des entreprises comme D’Aucy ou Saint-Michel illustrant bien les compétences et les atouts du Loir-et-Cher pour le développement industriel. Il est essentiel d’être bien informé sur ces questions. Par exemple, que s’est-il réellement passé chez Poulain ? Nous devons activement rechercher ces informations. Mais, je pense que l’industrie doit être ‘protégée’, c’est-à-dire accompagnée par les pouvoirs publics et soutenue de manière concrète. Nous devons examiner les possibilités de réduire certains impôts de production. Dans le programme des Républicains, nous remettons en question ces impôts qui sont beaucoup trop élevés en France, surtout comparés à d’autres, comme l’Allemagne. Nous devons nous poser les bonnes questions pour être compétitifs. Le politique est légitime pour discuter de finances et d’économie, et c’est là que l’orientation doit venir d’abord.

Blois Capitale : Vous souhaitez une « maîtrise de l’immigration incontrôlée ». Vous souhaitez aller plus loin que la récente Loi Immigration ?

Pierre-Gilles Parra : Les Républicains ont été très efficaces concernant la loi sur l’immigration qui a été votée par le Parlement. Il est important de noter que, bien que 32 amendements aient été rejetés par le Conseil constitutionnel, nous avons été actifs sur ce sujet. Les Français attendent une immigration qui ne soit pas subie mais choisie et modérée, adaptée à nos capacités d’intégration. Actuellement, nous faisons face à une migration qui s’apparente davantage à du trafic humain qu’à une immigration économique traditionnelle, ce qui est inacceptable et dépasse nos capacités d’intégration. Nous sommes loin d’une immigration qui s’assimile après une vingtaine d’années. Nous nous retrouvons dans une zone grise où les populations ont du mal à s’intégrer économiquement et socialement en raison de l’excès. Il est crucial de reprendre le contrôle de l’immigration, un domaine régalien. Notre programme législatif aborde ces questions. La loi sur l’immigration a été amputée de plusieurs amendements votés démocratiquement au Parlement. Il est décevant de voir que ces amendements, rejetés constitutionnellement, n’ont pas été respectés. Cela soulève des questions sur la démocratie si on écarte ces décisions législatives, même si elles proviennent d’une autorité constitutionnelle. Concernant l’argument économique de l’immigration, il faut déterminer si notre économie en a réellement besoin. Il est essentiel de remettre les Français au travail et de rendre le travail plus attractif. Nous envisageons notamment de réduire les cotisations salariales sur les bas salaires pour augmenter le pouvoir d’achat et valoriser le travail, particulièrement pour les jeunes. Notre priorité doit être de fournir des emplois à ceux qui sont déjà ici et au chômage. Vivre à crédit n’est pas viable à long terme.

Blois Capitale : Vous souhaitez également la mise en place d’une « politique du logement plus efficace »

Pierre-Gilles Parra : Il est clair qu’il y a un effondrement de la production de logements. On parle de 42 % de baisse de la construction, qui fait suite à une baisse précédente de 28 %. Nous sommes donc dans une période noire pour le logement, pas une période grise. Il est essentiel de savoir que le niveau classique de production est de 350.000 logements par an, pour renouveler notre parc à hauteur de 1 % par an. Ce qui se passe aujourd’hui, c’est qu’on a arrêté cette dynamique qui devait être maintenue. C’est une situation extrêmement problématique pour l’offre de logements. En outre, il y a des aspects liés aux économies d’énergie, car les nouveaux logements ont réduit par cinq leur consommation énergétique par rapport à il y a 20 ans. Il faut donc construire des logements neufs, c’est crucial.

Blois Capitale : Dans le programme LR il est question de « soutien à l’assimilation et lutte contre l’islamisme »

Pierre-Gilles Parra : C’est un vrai sujet car l’intégration est un processus qui commence dès lors qu’on accepte que des gens viennent chez nous. L’assimilation est l’étape où les gens intègrent tous les aspects sociétaux d’un Français classique. La machine à intégrer est en panne, avec des problèmes de communautarisme notamment. Je ne comprends pas pourquoi, aujourd’hui, le communautarisme est plus marqué chez certains jeunes, y compris ceux que l’on appelle parfois les immigrés de deuxième ou troisième génération. Ils se tournent vers des représentations, des tropismes fantasmés du Maghreb par exemple, ce qui est surprenant. Je crois qu’il faut aller à la rencontre des quartiers pour expliquer ce qu’est la laïcité, une loi commune qui n’est pas anti-religion, mais qui permet aux différentes confessions de coexister dans le respect des règles communes. Localement, la situation est peut-être un peu moins problématique qu’ailleurs, sans les forts communautarismes comme on peut le voir en Île-de-France. Si on n’intervient pas localement, si on n’est pas présent pour promouvoir un autre modèle auprès de la jeunesse, alors le risque est réel. Il est crucial que tous les Français, quelle que soit leur origine, adhèrent totalement à la République et prennent en considération l’histoire de France, qui commence bien avant la Révolution de 1789, dès le baptême de Clovis en 476. Enseigner l’histoire est très important. C’est notre patrimoine et il doit être partagé par tous, y compris ceux issus de l’immigration.

Blois Capitale : Vous parlez dans le programme de la « promotion d’une écologie respectueuse du mode de vie rural », pas l’inverse ?

Pierre-Gilles Parra : L’agriculture en France est aujourd’hui probablement malmenée par des impulsions technocratiques excessives. Les Républicains ont toujours défendu l’agriculture, notamment au Parlement européen. Cependant, il est évident qu’il reste encore beaucoup à faire. Il semble que, à l’exception des spiritueux, l’agriculture française ait une balance commerciale déficitaire, important plus qu’elle n’exporte. C’est un vrai problème. Les agriculteurs français souffrent d’un excès de réglementation qui les empêche de vivre convenablement. Je vais rencontrer les gens de la FNSEA pour discuter de tous ces enjeux. L’écologie est la relation entre l’homme et l’environnement. Ce n’est pas une sacralisation de la nature. Si nous préservons nos campagnes, c’est pour maintenir un paysage qui est le fruit millénaire de l’interaction entre l’homme et la nature. L’écologie ne doit pas devenir un tabou ni une religion. Il est crucial de ne pas se tromper sur l’essence de cette question. Cela suppose qu’il existe une harmonie entre les agriculteurs et les terroirs, une osmose naturelle entre les éléments qui composent notre environnement.

Blois Capitale : L’assainissement des comptes publics est une autre de vos thématiques.

Pierre-Gilles Parra : Je défends une gestion en bon père de famille des comptes publics. Aujourd’hui, la dette excessive de 3.100 milliards d’euros représente 110 % du PIB, contre 60 % pour l’Allemagne. Nous sommes dans une situation problématique pour notre avenir car, si plus personne ne veut nous prêter de l’argent en raison de cet endettement délirant, nous ne pourrons plus financer des équipements essentiels, notamment dans la santé. Il est donc impératif de revoir notre politique budgétaire et de limiter les dépenses publiques. La réduction du nombre de fonctionnaires est inévitable car nous avons vécu à crédit pendant des années, ce qui ne peut pas durer indéfiniment. De plus, les allègements de charges pour les entreprises sont cruciaux car ils conditionnent la performance économique. Il est nécessaire de libérer l’économie française.

Blois Capitale : Diriez-vous que vous êtes inquiet pour la France à compter du 7 juillet ?

Pierre-Gilles Parra : Vous me demandez si je suis inquiet quant à l’issue des élections et des conséquences qui pourraient en découler. La situation que nous a laissée Macron est telle que, en l’absence d’une offre politique sérieuse, les gens ont le choix entre la continuité d’une politique qui a été inefficace sur une série des sujets comme la sécurité et l’immigration, et le chaos proposé par d’autres partis. Ce dont nous avons besoin, c’est d’une autre voie, celle de la responsabilité et de l’ordre républicain, notamment en ce qui concerne nos rues, nos frontières et l’éducation. Il est crucial de prendre en compte les enjeux économiques. Je ne crois pas qu’un gouvernement qui a généré 1.000 milliards d’euros d’endettement supplémentaires, soit crédible sur ce sujet.

Blois Capitale : La vice-présidente des LR Florence Portelli a appelé, ce vendredi matin, sur Franceinfo, à un « Congrès d’Epinay » pour son parti afin de le régénérer. Qu’en pensez-vous ?

Pierre-Gilles Parra : Oui, je crois que nous devons retrouver des forces, et que ces forces se puisent dans une tradition gaulliste, une droite qui reste fidèle à ses principes, une droite qui préconise un modèle solidaire et non pas ultralibéral, une droite proche des citoyens.


Michel Pillefer

Michel Pillefer, secrétaire départemental de LR, juge que Patrice Martin-Lalande joue un double jeu en appelant à voter au premier tour pour Marc Fesneau, fort de son statut d’ex-député LR qui pourrait laisser croire qu’il parle au nom du parti Les Républicains. « Il a franchi la ligne rouge et comme à l’accoutumée, il se range derrière le ou la candidate du centre », observe Michel Pillefer. « Il doit choisir son camp, LR ou pas LR mais pas un pied dans chaque camp. »


*Sa suppléante est Anne-Sophie Aubert-Ranguin. /**Éric Ciotti a présenté 62 candidats soutenus par le RN, mais conteste la catégorisation faite par le ministère de l’Intérieur, qui décrit son alliance avec le Rassemblement national comme « l’union de l’extrême droite ».

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