Sofia Bataille comme un souffle nouveau dans le funéraire
Sofia Bataille n’avait pas prédestiné sa carrière aux pompes funèbres. Aujourd’hui, elle est à la tête de Memorys, une entreprise funéraire qu’elle a fondée après une reconversion marquée par une réflexion profonde sur la mort et l’accompagnement des familles endeuillées. Dès l’ouverture de sa première agence à Blois en janvier 2021 (désormais 3 Boulevard de l’Industrie), suivie par celle de Vendôme en 2022 et de Saint-Laurent en avril 2023, elle a mis en place une approche novatrice dans le domaine du funéraire.
Sofia Bataille a un parcours pour le moins atypique. Après une formation initiale en tant qu’assistante de direction et plusieurs années passées dans l’administration publique territoriale, rien ne semblait la diriger vers le domaine funéraire. Pourtant, c’est ce secteur qui est venu à elle, comme elle le dit elle-même.
« Ce n’était pas une vocation initiale », avoue-t-elle. « J’ai accompagné une amie très proche durant sa maladie, et cela m’a amenée à réfléchir sur des questions profondes concernant la mort et la manière dont nous nous préparons à celle-ci. » Cette expérience personnelle, combinée à une rencontre marquante avec une professionnelle du funéraire, a ouvert une nouvelle fenêtre dans sa vie. Cette personne, forte de 45 ans d’expérience, lui a fait découvrir un univers qu’elle ne connaissait que du point de vue des familles endeuillées.
Encouragée à en savoir plus, Sofia Bataille a suivi les formations obligatoires pour entrer dans le secteur, un parcours rigoureusement encadré, avant de décider de faire le grand saut. Elle quitte alors la fonction publique pour se consacrer à sa nouvelle vocation. « J’ai bien fait, car j’ai découvert un métier riche en humanité, qui, contrairement aux idées reçues, ne se concentre pas uniquement sur la mort, mais surtout sur l’accompagnement des vivants. »
Sofia Bataille commence par travailler dans une structure familiale, dans le Loir-et-Cher, avant que celle-ci ne soit rachetée par un grand groupe. C’est alors que le Covid-19 frappe, bouleversant la perception du métier de pompes funèbres, autant pour les professionnels que pour le public. « La pandémie a fait émerger une prise de conscience générale. Nous étions très impactés et avons été très présents aux côtés des familles quand il le fallait », explique-t-elle. Pourtant, après cette période, elle ne se retrouve plus dans la nouvelle organisation de son entreprise. « Cela ne correspondait plus à mes valeurs, alors j’ai décidé de créer ma propre structure, Memorys. »
Un supplément d’âme avec Memorys
Avec sa société, Sofia Bataille poursuit le métier qu’elle a choisi, mais en y intégrant des valeurs éthiques qu’elle estime essentielles. « Ce métier a une part d’humanité qu’il ne faut jamais perdre. De grandes structures ont accaparé les parts de marché. Les pompes funèbres étaient un commerce de proximité, il ne peut pas être industriel. Nous devons accompagner les familles dans ces moments difficiles, les écouter, et ne pas standardiser les services. Chaque accompagnement est particulier, on ne peut pas faire du copier-coller ! »
Nouvelles tendances
Au fil de son parcours, Sofia Bataille a constaté l’évolution des besoins des familles, notamment avec l’essor des cérémonies civiles et des crémations personnalisées. « La mort nécessite un accompagnement sur mesure. L’approche religieuse a changé, il y a un mélange de cultures, tout cela il faut le prendre en compte. La société évolue, nous devons nous adapter aux besoins. On va de plus en plus vers les cérémonies civiles et les crémations. Le deuil est un processus long, parfois toute une vie, et nous devons être justement présents avant et après les obsèques. »
Sofia Bataille met également l’accent sur l’impact écologique des pratiques funéraires. D’autant plus qu’il y une demande. « De plus en plus de gens souhaitent des solutions respectueuses de l’environnement, comme les cercueils en carton ou les inhumations en pleine terre. Mais le cadre légal reste très strict, et il n’y a qu’un seul fournisseur de cercueils en carton en France. »
Elle appelle à une évolution des pratiques funéraires, qui pourraient inclure des technologies comme l’aquamation, une méthode déjà utilisée au Canada et aux États-Unis pour dissoudre les corps dans l’eau. Bien que cette pratique ne soit pas encore légale en France, Sofia Bataille espère que le débat mènera à une législation plus ouverte. « Les élus sont souvent réticents à aborder ces sujets, on le voit avec les débats sur la fin de vie, mais il est nécessaire de faire évoluer notre manière de penser la mort et ses rites. »
L’entrepreneure croit fermement à l’importance de l’innovation dans le secteur funéraire, tout en restant ancrée dans les traditions. « Le funéraire, c’est une histoire, c’est notre passé. Mais il faut aussi avancer avec les innovations, tout en respectant ce passé. » Elle cite l’exemple des start-up qui proposent des QR codes à apposer sur les sépultures pour retracer l’histoire du défunt. « C’est formidable. Et aujourd’hui, on peut également organiser une cérémonie et la retransmettre à l’autre bout du monde. On vit avec notre temps. »
Lever le voile sur la mort : un engagement sociétal
L’un des principaux défis que Sofia Bataille et son équipe doivent relever est la persistance des tabous autour de la mort. Bien que la mort soit une partie inévitable de la vie, en parler ouvertement reste difficile pour beaucoup. « On voit encore aujourd’hui une certaine réticence à aborder le sujet, comme si parler de la mort était anormal », constate-t-elle.
Pourtant, de plus en plus de personnes prennent des dispositions pour organiser leurs propres obsèques, même si cela continue de surprendre leurs proches. « Les gens disent souvent : ‘Il ne faut pas y penser !’ Mais en réalité, c’est une étape importante pour alléger la charge émotionnelle de leurs proches. »
Elle insiste sur le fait que les funérailles ne sont pas nécessairement synonymes de tristesse. « Il y a des familles qui, bien qu’endeuillées, souhaitent célébrer la vie de leur proche avec joie, parce qu’elles ont partagé tellement de souvenirs heureux avec lui ou elle. Il faut savoir s’adapter à cela. »
Le deuil blanc : anticiper pour mieux accompagner
L’un des concepts clés mis en avant par Sofia Bataille est celui du « deuil blanc ». Il s’agit d’un travail de deuil entamé avant même que le décès ne survienne, notamment dans les situations de fin de vie annoncée. « C’est un accompagnement essentiel », souligne-t-elle. « Cela permet aux familles de faire face à la situation de manière plus apaisée, même si cela reste très difficile. »
Elle insiste également sur l’importance d’une organisation des obsèques qui commence bien avant la disparition du défunt, en coordination avec les soins palliatifs et les équipes médicales. « Le corps médical a beaucoup travaillé là-dessus, pour que tout se passe de la manière la plus douce possible, tant pour le défunt que pour la famille. »
Crémation vs inhumation : des coûts proches
Sofia Bataille observe également une évolution des coûts dans le secteur funéraire, notamment en ce qui concerne la crémation. « Autrefois, la crémation était considérée comme une option plus économique que l’inhumation. Mais aujourd’hui, avec l’augmentation des coûts, notamment à cause du prix du gaz, cet écart se réduit. »
En 2024, Memorys a pu constater une légère baisse du coût de la crémation, une bonne nouvelle pour les familles. Cependant, Sofia prévient : « Même si la crémation reste moins coûteuse, les prestations annexes peuvent rapidement faire grimper la facture. L’année dernière, juste la crémation, c’était 908€ TTC. En 2024, c’est 874€. »
Accompagner les vivants : une mission primordiale
Au-delà des aspects financiers, ce qui distingue vraiment Memorys, c’est l’accompagnement des vivants. Sofia Bataille met un point d’honneur à guider les familles dans les méandres administratifs et émotionnels du deuil. « Nous prenons le temps d’expliquer les droits des familles, de les informer sur des questions cruciales comme le déplacement d’un défunt ou la dispersion des cendres. Nous avons pris l’engagement de ne pas arrêter notre accompagnement à la cérémonie elle-même. Nous sommes formés à gérer le deuil, à comprendre les étapes par lesquelles passent les familles, et à adapter notre approche en fonction de leurs besoins. »
Un regard philosophique sur la mort
Bien que très sensible, Sofia Bataille n’a jamais eu peur de la mort, même si elle admet qu’elle n’était pas préparée à en parler ouvertement avant de se lancer dans le secteur funéraire. Pour elle, la mort fait partie de la vie, elle peut intervenir à chaque seconde, et c’est en l’acceptant que l’on peut vraiment vivre. « La mort, ce n’est peut-être qu’une fin, ou peut-être le début de quelque chose d’autre. En parler, c’est se libérer de ses peurs et avancer. D’autant plus qu’en avançant avec l’âge on est confronté à des décès de proches. »
Créer des espaces de parole : une nécessité
Consciente de l’absence d’espaces dédiés à l’expression du deuil, Sofia Bataille a également pris l’initiative de créer des lieux de parole. Elle a lancé le « Café Mortel », un espace sous la forme d’un petit déjeuner durant lequel les gens peuvent venir partager leurs expériences et parler de la mort sans tabou. Cette initiative fait écho à celle de l’association « Happy End », fondée pendant le Covid, qui organise des événements comme l’« Apéro de la mort ». Et si certaines personnes ont pu être choquées par les formulations utilisées pour ces rendez-vous, la fondatrice de Memorys assure que la mort reste sacrée. « Pour avancer, il faut parfois heurter. Quand ça marche, on devient plus ouvert d’esprit. Ces espaces sont essentiels pour aider les gens à surmonter leur deuil. Il y a une demande réelle, et il est crucial d’y répondre », insiste Sofia.
Sofia Bataille est la fondatrice et dirigeante de Memorys, une entreprise indépendante de pompes funèbres située à Vendôme, Saint-Laurent-Nouan et Blois. Ayant débuté dans le secteur funéraire en 2019, Sofia a rapidement développé une approche centrée sur l’accompagnement éthique et personnalisé des familles en deuil. Memorys se distingue par son indépendance, n’appartenant à aucun groupe ni franchise, ce qui permet à Sofia Bataille et son équipe d’offrir des services funéraires personnalisés, avec un cap de pratiques durables et responsables.
