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Alain Amiot : « Quatre projets vont transformer le paysage ligérien »

Depuis plus de trente ans, l’Observatoire Loire accompagne le territoire dans sa compréhension du fleuve, de ses dynamiques et de son évolution. Créée en 1992, cette structure d’éducation à l’environnement a d’abord mené un travail scientifique de collecte de données avant de se consacrer pleinement à la transmission et à la vulgarisation. Son rôle a évolué au fil du temps, au point d’en faire aujourd’hui une véritable vigie du fleuve, attentive aux transformations hydrologiques, aux risques d’inondation et aux usages du territoire. « L’objectif, c’était de faire connaître le fleuve comme un élément en mouvement et comme un élément vivant, » explique Alain Amiot, directeur de l’Observatoire Loire.

L’Observatoire Loire appréhende le fleuve dans toutes ses dimensions. La dynamique fluviale, la biodiversité, l’histoire du territoire et la gestion des crues sont au cœur de son action. « On parle des châteaux de la Loire, historiquement parlant, mais moi, je retournerais cette expression en évoquant la Loire et ses châteaux. C’est bien l’eau, cet élément fondateur, qui a permis de bâtir le Val de Loire, aujourd’hui inscrit au patrimoine mondial. On est parti de cette histoire-là, d’un fleuve qui passe et, ensuite, ce sont les hommes, les rois, qui se sont succédé et qui se sont servis du fleuve, selon leur époque, pour façonner le Val de Loire que nous connaissons. »

La structure a aussi pris une nouvelle dimension dans la surveillance du fleuve. Avec le changement climatique, la gestion du lit de la Loire devient une priorité. « Le climat change et la Loire change avec, constate Alain Amiot. Aujourd’hui, la gestion des îles, des bancs de sable, de la dynamique fluviale devient une question capitale. Nous travaillons en étroite collaboration avec la Direction départementale des territoires, l’Établissement public Loire et l’agglomération pour suivre ces évolutions. »

Un territoire en pleine transformation

L’Observatoire Loire ne se positionne pas comme un expert technique, mais comme un relais essentiel entre les différents acteurs. « L’État a une expertise, l’Agglo a une expertise, l’EPL aussi. Nous, nous sommes avant tout une vigie. Nous n’avons pas d’expertise hydraulique ou géomorphologique au sens strict, mais nous sommes en permanence sur l’eau. Nous voyons comment évoluent les bancs de sable, comment se forment de nouvelles îles, nous constatons l’impact des étiages et des crues. »

L’année 2025 s’annonce comme une année de transition complexe. D’un côté, plusieurs grands projets d’aménagement vont modifier durablement le rapport des habitants à la Loire. De l’autre, des coupes budgétaires drastiques imposées aux collectivités et aux associations compliquent la situation. Face à cette situation, l’Observatoire Loire doit revoir son fonctionnement. « On ne peut pas dire oui à toutes les sollicitations, participer à tous les événements. Nous allons réduire notre nombre d’animations, recentrer nos priorités et chercher de nouvelles sources de financement, sans pour autant brader nos valeurs. »

Dans ce contexte délicat, le lancement des travaux de la passerelle cyclo-piétonne en avril 2025 vient ajouter une contrainte supplémentaire. « On est en plein dedans. La passerelle va être construite à 50 mètres de chez nous, avec une emprise importante sur le site. On va perdre du temps en logistique, en circulation et en organisation des scolaires. Ce sont deux ans à gérer. »

La passerelle doit être achevée en 2027. Pour Alain Amiot, elle représente un tournant : « C’est un ouvrage qui va modifier en profondeur les déplacements et l’accessibilité au fleuve. Il ne s’agit pas seulement d’un équipement pratique, c’est aussi un produit touristique qui va changer notre manière de voir la Loire. À sept mètres de haut, la vue sur le fleuve et ses méandres sera exceptionnelle. On ne se rend pas encore compte de ce que cela va offrir. » Nous sommes dans une période charnière pour le territoire, avec des aménagements d’ampleur en cours qui vont modifier durablement le rapport des habitants à la Loire. « Quatre projets majeurs vont transformer le paysage ligérien dans les trois ans à venir », souligne le responsable.

Outre la passerelle, le Lac de Loire va faire l’objet d’une rénovation complète, incluant la remise en état du plan d’eau et la modernisation du restaurant. « C’est un site clé, avec un potentiel énorme, qui mérite d’être repensé pour mieux accueillir le public », explique Alain Amiot.

En parallèle, le parc des Mées va bénéficier d’une restauration complète, avec un réaménagement du ruisseau et une meilleure circulation des visiteurs. L’objectif est d’ouvrir davantage cet espace naturel et de le rendre plus attractif. « Il faut que les habitants puissent profiter de tout le parc, pas seulement du skatepark et de la zone de jeux. Le ruisseau sera réaménagé pour retrouver son rôle écologique, et les cheminements seront optimisés pour une meilleure accessibilité. »

Enfin, dans un ou deux ans, l’aménagement du site de la Bouillie, un secteur encore peu structuré, peut en faire un véritable espace de détente en bord de Loire. « Quand on regarde ces quatre projets dans leur ensemble, on se rend compte qu’on est en train de redessiner tout le rapport du territoire à son fleuve. C’est une transformation majeure, et c’est maintenant que tout se joue, insiste Alain Amiot. Ce qui est certain, c’est que les habitants vont s’approprier ces nouveaux espaces. Il y aura un avant et un après. »

Observatoire Loire

Une nouvelle approche du fleuve

Ces évolutions s’inscrivent dans une dynamique plus large de réappropriation du fleuve. L’Observatoire Loire, qui a toujours prôné une approche immersive du territoire, s’inscrit pleinement dans cette mutation. Depuis 1995, la structure dispose de bateaux pour permettre aux visiteurs de découvrir la Loire depuis l’eau. « Voir la Loire depuis la berge, c’est intéressant, mais depuis l’eau, c’est encore mieux, souligne Alain Amiot. Quand on est sur un bateau, on a un autre regard. Comment est construite la ville ? Comment les quartiers sont-ils reliés entre eux ? Quelles sont les artères commerciales ? Comment les ponts influencent-ils l’urbanisme ? »

Le bateau devient alors un outil de lecture du paysage. « Ce matin, nous étions sur l’eau avec des élèves de CM2. Nous nous sommes arrêtés et, simplement, nous avons regardé. On peut voir la ville se dessiner, comprendre l’implantation des quartiers, voir les différences de relief. Depuis la Loire, on perçoit l’histoire urbaine différemment. C’est une approche essentielle pour se connecter à un territoire. »

L’Observatoire Loire, confronté aux contradictions de l’époque – restrictions budgétaires d’un côté, grands projets d’aménagement de l’autre – doit s’adapter en 2025. Il n’y aura pas de grandes célébrations pour les 25 ans de l’inscription de la Loire au patrimoine mondial de l’UNESCO ou les 20 ans de la Loire à vélo. Mais de belles perspectives restent à portée.

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