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Chez Sylvie Marc, tout commence par un mot

Installée au château du Guérinet, dans un écrin de nature où les chevreuils passent quotidiennement devant son atelier, Sylvie Marc est une artiste dont la peinture est à la fois introspective et engagée. À travers une peinture profondément personnelle et intuitive, elle questionne la condition humaine, la mémoire, et les émotions.

Sylvie Marc atelier

Lorsque Sylvie Marc a posé ses valises au château du Guérinet, elle imaginait d’abord un atelier dans une pièce blanche, parfaite pour mettre en lumière ses œuvres. Mais c’est une autre pièce qui l’a happée : une pièce dotée d’une terrasse donnant sur l’étang du Martinet, un lieu où la nature s’exprime avec douceur. « Je découvre cette pièce et je me dis : mais non, c’est ici que je dois être. Je vais m’adapter à cette lumière et à cette place. »

Une artiste d’intérieur, au croisement de la peinture et de l’écriture

Contrairement à de nombreux artistes qui se nourrissent des paysages en extérieur, Sylvie Marc revendique une pratique plus introspective. « Je ne travaille pas dehors. Je suis vraiment une peintre d’intérieur. » Elle compare son approche à celle d’un écrivain, construisant ses œuvres comme on rédige une histoire. « Je peins peut-être plus comme on écrit, que comme un peintre amoureux d’une technique pure. J’aime raconter des histoires. »

Pour Sylvie, chaque tableau est une aventure narrative qui commence devant une toile blanche. « Je pars en écriture automatique. Un premier dessin arrive, souvent travaillé à l’acrylique. Ensuite, je recouvre d’un film acrylique et je superpose parfois deux tableaux. Ce n’est qu’après que je travaille à l’huile. » Ce processus, à la fois structuré et intuitif, lui permet d’explorer des histoires qu’elle ne pourrait pas exprimer autrement. « Parfois, j’aime dire que je peins parce que je ne sais pas écrire. »

Pourtant, en parallèle de sa peinture, Sylvie Marc est également nouvelliste. Elle aime raconter des récits courts, où l’écriture et la peinture se rejoignent. « Je me raconte un début d’histoire, je me positionne devant ma toile blanche et hop, je pars. » Cette dualité entre écriture et peinture donne à son travail une profondeur narrative, où chaque tableau semble contenir les prémices d’un roman visuel.


Peindre, une lutte pour la liberté

Pour Sylvie Marc, peindre n’est pas une quête esthétique ou une recherche de reconnaissance. C’est un acte de libération, une lutte intérieure pour conquérir sa propre vérité. Cette lutte, elle la mène aussi contre les stéréotypes liés à son genre. « Depuis que je suis toute jeune, je travaille la puissance du trait. Je redoute qu’on dise : « Ah, ça, c’est une femme qui l’a fait ». Je cherche à dépasser cette perception d’un travail édulcoré qu’on pourrait associer à une artiste féminine. »

Ses traits sont donc empreints de force et d’intensité. Elle expérimente des plaintes, des déliés, des lignes qui accrochent, pour « gagner en force » et dépasser les clichés. Mais, loin de se limiter à la technique, Sylvie cherche toujours à toucher à l’essentiel. « Je cherche davantage à provoquer un impact direct, presque viscéral. »


Personnages et architectures : des histoires humaines

Les premières années de sa carrière étaient marquées par une fascination pour l’architecture. Inspirée par Roland Cat, elle peignait des univers désertés, des usines ou des villes abandonnées. Mais un jour, une silhouette est apparue dans son travail, et elle ne l’a plus quittée. « Cette silhouette est devenue une personne, puis l’architecture elle-même. Elle représente ce que nous sommes : nos peurs, nos angoisses, nos espoirs. Lorsque je fais émerger un personnage, je cherche à rentrer au cœur de ce qu’il est ou ressent. À ce moment-là, j’ai l’impression de toucher quelque chose de vrai, peut-être même d’essentiel. »

Aujourd’hui, ses tableaux sont peuplés de personnages, souvent inscrits dans des contextes oniriques ou introspectifs. Sylvie explore des thématiques profondes, comme la peur ou le savoir. Par exemple, dans une œuvre, elle représente une main transparente qui interroge la fragilité de nos connaissances. « Qu’est-ce qu’on sait ? Qu’est-ce qu’on ne sait jamais ? » Ces questionnements philosophiques traversent son travail, où chaque détail semble porter une réflexion sur l’humain.

La puissance de la couleur : le bleu et le rouge

Les couleurs jouent un rôle central dans l’œuvre de Sylvie Marc. Elle revient fréquemment au bleu et au rouge orangé, deux teintes qui s’opposent et se complètent. « Il y a un côté bleu et un côté rouge dans beaucoup de mes œuvres. C’est instinctif. Je ne peux pas y résister. » Elle décrit même son obsession pour le bleu comme un acte transgressif, en référence à l’époque où les teinturiers n’étaient autorisés à produire qu’une seule couleur. « J’aime dire que je commets le bleu. »


Une artiste à l’écoute des mots

Pour Sylvie Marc, tout commence par un mot. Qu’il s’agisse d’une phrase entendue dans la rue, à la radio ou lors d’une discussion, les mots déclenchent en elle un processus créatif. « Les mots, ce sont des facteurs déclenchants. Parfois, ce que je lis n’a aucun lien direct avec ce que je peins, mais cela libère une idée ou une émotion. » Un exemple marquant de cette influence littéraire est son travail inspiré par La trilogie new-yorkaise de Paul Auster. Après avoir lu cette œuvre, elle a commencé une série sur des bâtiments vides, explorant la solitude et l’absence. Cette approche, où la littérature nourrit la peinture, reflète son désir de transcender les frontières entre les discipline. Sylvie Marc est une artiste en mouvement, toujours en quête de nouvelles manières d’explorer et d’exprimer l’humain. À travers ses toiles, elle nous invite à plonger dans un univers où chaque détail est une porte ouverte vers l’imaginaire et la réflexion.

L'amour qui s'éprouve par Marc Alvarez

Son parcours, marqué par une quête constante de liberté et d’authenticité, fait d’elle une artiste profondément contemporaine, dont l’œuvre dialogue avec notre époque tout en restant résolument intemporelle.

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