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L’Observatoire de l’Économie et des Territoires : un outil unique en France

Trente ans après sa création dans le Loir-et-Cher, l’Observatoire de l’Économie et des Territoires (OET) s’est imposé comme un outil unique en France. Ni bureau d’études, ni organisme politique, il incarne une conception exigeante du service public de la donnée territoriale : mutualisé, rigoureux, accessible et, surtout, profondément ancré dans le réel. Jean-Luc Broutin, président de l’OET, Geneviève Baraban, vice-présidente, et le binôme de direction, composé de Christophe Lefert et Nathalie Carl, ont partagé sans détour la philosophie, les rouages et les ambitions d’un outil au service des collectivités, des acteurs économiques et de l’ensemble des habitants du département.


Parmi les quelque cent vingt structures adhérentes à l’OET, on retrouve des collectivités de toutes tailles, des départements (41, 28, 37, 45), la Région Centre-Val de Loire, l’État, des chambres consulaires, des établissements publics et des acteurs de terrain. Tous y trouvent un appui méthodologique, une expertise cartographique, et une capacité d’analyse dont la valeur tient autant à la qualité des données qu’à leur traitement. « Ce n’est pas parce qu’on a des chiffres qu’on a compris le territoire », glisse Jean-Luc Broutin. « Notre rôle, ce n’est pas d’additionner des fichiers Excel, mais d’apporter des analyses fondées, compréhensibles, utiles pour agir. » Tout simplement, des outils.

Une structure née d’un manque

L’histoire de l’OET commence dans les années 1990, au sein de l’agence économique du Loir-et-Cher, sur un constat alors partagé par l’État et les chambres consulaires : le territoire manquait cruellement de données économiques fiables. Rapidement, il apparaît que l’économie ne peut être comprise isolément. Pour l’analyser, il faut regarder aussi le logement, les déplacements, la santé, les dynamiques sociales. De fil en aiguille, l’Observatoire élargit son champ, intégrant toujours plus de thématiques. Trois décennies plus tard, il couvre presque tous les domaines de la vie territoriale.

Ce n’est pas un parcours linéaire. Il a fallu une volonté politique forte. Celle du Département, d’abord, qui a porté la structure dès ses débuts et a maintenu son engagement sans faille pendant trente ans. Celle aussi de ses dirigeants successifs, élus ou non, qui ont cru à l’utilité d’un outil fondé sur la rigueur, la mutualisation et l’intérêt général. « On n’est pas là pour plaire aux adhérents », résume le président. « Nos conclusions ne sont pas faites pour leur faire plaisir. On les publie parce qu’elles sont justes. »

Observatoire de l’Économie et des Territoires

Mutualiser, c’est plus difficile

Dans un paysage institutionnel souvent éclaté, où chaque structure a tendance à développer ses propres outils, l’OET est l’exception. Il ne travaille pas pour une collectivité isolée, mais pour l’ensemble du réseau adhérent. Cela suppose des arbitrages, des compromis, un travail de coordination permanent. Ce modèle mutualisé, s’il est plus complexe à piloter, a aussi une vertu : il favorise la comparabilité des données, leur mise en cohérence, leur lecture partagée.

Chaque année, un comité de programmation examine les propositions de sujets formulées par les adhérents. Après avis, le conseil d’administration de l’Observatoire arrête le programme annuel des travaux. Mais l’indépendance de l’analyse reste une ligne rouge. « Ce n’est pas un bureau d’études. Ce n’est pas du travail à façon. Ce que nous produisons appartient à tous les adhérents. » Cette culture du bien commun ne se décrète pas. Elle s’est construite au fil du temps, à mesure que les collectivités constataient l’utilité concrète des études et la fiabilité des diagnostics.

Une base de données des bases de données

L’OET dispose aujourd’hui d’environ 800 fournisseurs de données pour près de 500 bases. À cette matière brute, l’Observatoire applique une méthode. Il commence par territorialiser : les périmètres statistiques sont souvent inadaptés aux réalités locales. L’équipe redécoupe, affine, croise avec les données communales. Elle interroge les professionnels de terrain, lance des enquêtes, complète par du qualitatif. Elle ne se contente pas de chiffres. Elle les fait parler.

Au cœur du dispositif, une base de données… des bases de données. Un outil interne qui permet de tracer les sources, les dates d’actualisation, les échéances. Chaque chargé d’étude en est responsable dans son domaine – logement, social, tourisme, santé, etc.

L’équipe, les outils, les usages

L’Observatoire emploie 18 personnes réparties en deux pôles. Le pôle études, piloté par des chargés d’études épaulés par des assistants, produit plus d’une centaine de travaux chaque année. Le pôle technique réunit deux informaticiens, un data analyst, trois géomaticiens, et les outils cartographiques les plus avancés. « Un élu n’a pas le temps de lire un rapport de 10 pages. En revanche, une carte bien faite, il la comprend tout de suite », souligne Jean-Luc Broutin.

C’est toute la force des WebSIG développés en interne. L’OET a récemment modernisé ses outils pour gagner en performance et en clarté. Des modules spécifiques ont été conçus pour la gestion des réseaux d’eau potable, des zones d’activités économiques, ou encore le suivi du foncier. Ce sont des outils métiers, utilisés par les développeurs économiques, les techniciens des collectivités, les gestionnaires de réseaux.

En parallèle, le site internet a été entièrement refondu pour les 30 ans de l’association. Plus lisible, plus intuitif, il donne accès aux publications, aux indicateurs, aux cartographies. Mais encore faut-il que les acteurs le connaissent. « On a besoin que tout le monde s’en empare. Que ce soit un réflexe. »

ADELE41 : les services publics dans la poche

Autre développement majeur : ADELE41, un portail partenarial né du croisement entre les besoins des usagers et les attentes des professionnels. Il regroupe plus de 2 400 adresses de services à la population (santé, social, numérique, enfance, logement…) et les rend accessibles via une carte interactive.

Il ne s’agit pas de dupliquer ce que d’autres font déjà : ADELE41 renvoie vers les sites officiels, les permanences locales, les structures référentes. Mais il les rend visibles, repérables, centralisés. « Une assistante sociale ne doit pas passer une demi-heure sur Google à chercher une info fausse. ADELE41, c’est là pour ça », explique Geneviève Baraban.

Mis à jour chaque année via une enquête participative, le site est aussi alimenté au quotidien par la veille, les retours terrain, les échanges avec les partenaires. N’importe qui peut signaler une erreur ou un changement : l’Observatoire vérifie, corrige, et remet à jour.

De la donnée à l’action publique

Les études réalisées par l’OET touchent à tous les domaines : éducation, logement, santé, transition écologique, mobilité, culture, conjoncture économique ou artisanale. Certaines donnent lieu à des publications, d’autres à des présentations orales ou à des flashs thématiques.

Et toujours cette même rigueur : croiser, contextualiser, rendre lisible sans appauvrir. En outre, l’Observatoire ne se limite pas à constater. Il alerte aussi. « Quand on a vu la population du Loir-et-Cher s’inverser, on a immédiatement lancé une analyse fine pour comprendre », se souvient Christophe Lefert.

Cet éclairage factuel permet aux élus de ne pas décider à l’aveugle. L’exemple souvent cité est celui d’un adjoint municipal, fraîchement élu, qui voulait fermer une école primaire. Grâce aux données de l’OET, on a vu que le quartier était en train de se rajeunir. L’école a été maintenue. « C’est fondamental. L’Observatoire permet de savoir de quoi on parle. »

Une exception française

Pourquoi ce modèle n’a-t-il pas essaimé ? Parce qu’il suppose une vision à long terme. Parce qu’il coûte. Et parce qu’il repose sur une culture du partenariat peu répandue. « Beaucoup de territoires veulent faire pour eux-mêmes. Ce qu’on fait ici, c’est compliqué, mais c’est durable », observe le président de l’OET.

Il a fallu du temps. Il a fallu une volonté. Celle de Roger Goemaere, président du Département au moment de la création, celle de l’État, partenaire dès l’origine, celle des acteurs économiques, convaincus par le manque criant de données. Aujourd’hui, le Loir-et-Cher est le seul département à disposer d’un tel outil. Les autres peuvent s’en inspirer, mais aucun ne peut reproduire en quelques mois ce qui a mis trente ans à se construire. « Il faut du tissu, de la confiance, des interlocuteurs, et du temps. Il a fallu une vraie volonté politique, un esprit maison, du travail, de l’indépendance, une équipe stable, un savoir faire » conclut Jean-Luc Broutin. Un observatoire ne se décrète pas : il se tisse, patiemment, au croisement de la méthode, de la fiabilité et du temps long.

Pour aller plus loin : pilote-oet.fr et adele41.fr

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