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La tribune de Gildas Vieira sur les Urgences et le système de santé

L’Hôpital est en France globalement en crise, et les Urgences en tension. Celles de Blois ont connu une augmentation astronomique du nombre de passages annuels : de 25.000 à 45.000. Face à cet afflux massif de patients des modifications importantes ont été instaurées en ce mois de juillet (lire ici). Ainsi des médecins de ville sont chargés des urgences non vitales dans un local voisin. En soirée, l’appel au 15 est obligatoire avant d’accéder aux urgences de l’hôpital. En fonction du niveau de gravité, les régulateurs pourront décider si le patient peut attendre jusqu’au lendemain ou non. Pour les urgences vitales, une prise en charge sera effectuée immédiatement.

Ceci étant précisé, nous vous mis en ligne ce jour un témoignage : l’expérience récente de Marjory Despres (32 ans) qui dénonce dans une lettre ouverte ce qu’elle a vécu au Centre Hospitalier de Blois. Avec ce témoignage, nous comprenons également à quel point les personnels de soin sont débordés, dépassés malgré eux.

C’est pourquoi nous avons interpellé Gildas Vieira, élu local au fait de ces questions et qui est notre intervenant lors de cette semaine politique. Directeur général de la FRAPS Centre-Val de Loire (fédération régionale qui regroupe des structures issues des secteurs médico-social, sanitaire, associatif, universitaire, mutualiste et hospitalier) et directeur général de l’Institut Renaudot qui promeut le développement des démarches communautaires en santé, il nous propose cette tribune:

La déchéance de nos urgences révèle simplement la crise de notre système de santé

Je dénonce depuis plusieurs années, régulièrement, cette situation critique qui date de bien avant la crise sanitaire, on a tendance à l’oublier. J’ai écrit plusieurs tribunes et programmes en faisant des propositions, dont certaines ont été reprises par le chef d’Etat. Nous sommes tous d’accord pour parler de contexte de crise. Et M. Macron a commandé, en mai 2022, une mission au président de SAMU-Urgences de France, François Braun, devenu aujourd’hui ministre de la santé, pour identifier des solutions opérationnelles. Il en résulte la mise en place d’une majoration de 15 euros pour les médecins acceptant d’accueillir rapidement des patients qui leur sont adressés par le 15 ou encore la possibilité de réguler les entrées aux services d’urgence, principalement via le SAMU. Il est mentionné dans l’arrêté que les établissements sont autorisés « à mettre en place une organisation permettant d’orienter les patients dont l’état de santé ne relève pas de la médecine d’urgence vers une offre de soins adaptée. » Réussite ou découragement des patients de se rendre aux urgences ? On notera que nous sommes nombreux à ne plus avoir de médecins traitants et à attendre des mois pour un rendez-vous médical dans la 7eme puissance économique mondiale.

Le ministre de la Santé et de la Prévention affirme aujourd’hui que la situation s’est améliorée. M. François Braun a estimé ce lundi que les difficultés rencontrées aux urgences cet été étaient « moindres » qu’en 2022, en dépit de certains « points chauds ». Les agences régionales de santé (ARS) « m’indiquent plutôt que les difficultés sont moindres que l’an dernier, même si des points chauds sont identifiés dans certains territoires ». Ce n’est pourtant pas ce que mes collègues du soin et moi-même observons. En effet, la population est découragée d’aller aux urgences. On n’a pas encore compris en France, qu’il est temps de changer entièrement notre système de santé, qu’il nous faut nous orienter vers la prévention, la promotion de la santé, dont la santé communautaire, et investir massivement dans notre système de santé sans saupoudrer.

Les infirmiers et j’en connais beaucoup, ne souhaitent plus travailler à l’hôpital et encore moins aux urgences. Les médecins d’hier qui travaillaient 24/24 n’existent quasiment plus. Le numérus clausus allégé ne résoudra pas le problème dans les années futures car les infrastructures de formation ne suivent pas, et les futurs médecins n’accepteront pas de travailler dans ces conditions dans certaines zones du territoire national.

On se retrouve à l’hôpital de Blois dans les conditions des hôpitaux de certains pays du tiers monde que je connais, à attendre toute une nuit avant d’être pris en charge, et pas forcément avec une qualité de soins. Les soignants sont épuisés, non accompagnée et par conséquent parfois désagréables voire au bord du burn out. Le cercle vicieux du mal-en-soins se perpétue avec la fermeture des lits, des effectifs réduits, la difficulté d’embauche et de nombreux arrêts de travail. Nous n’avons pas compris les leçons de la crise Covid. Tout notre système de soin est à repenser.

Quelques pistes :

  • Télémédecine;
  • communication positive et considération pour les métiers du soin;
  • revalorisation des salaires (parmi les plus bas d’Europe);
  • financement des centres de santé et incitation à la prévention et promotion de la santé;
  • valorisation des métiers du bien-être et de la médecine intégrative au sein des hôpitaux;
  • former sur un an les infirmiers pour faire les actes médicaux les plus demandés et changer leurs statuts;
  • inciter à une plus grande implication des élus et des maires dans les hôpitaux et EHPAD de leurs communes;
  • fin de la T2A (tarification à l’acte);
  • revitalisation de nos communes avec présence des centres de santé et/ou hôpitaux de proximité.

Il ne faut pas continuer à détruire notre système de santé.

Effectivement je rejoins cette femme dans sa plainte car elle n’est pas la seule. J’en reçois beaucoup de plaintes de l’hôpital de Blois comme élu local, et via les réseaux notamment. J’interpelle le maire et le directeur de l’hôpital qui font sans doute de leur mieux. J’ai même été plusieurs fois interpellé par la CGT du CHB sur les difficultés rencontrées. Faire remonter ces éléments en conseil municipal n’y a rien changé. La santé n’a pas de prix bien qu’elle ait un coût. Il faut en faire la première préoccupation, car beaucoup décèdent de cette situation.

C’est dans ce contexte qu’un médecin des quartiers nord de Blois est suspendu : Dr Thierry Marchand, pour des raisons très discutables, qui méritaient une autre sanction que la suspension longue, pour un médecin qui ne compte pas son temps. Cette situation laisse sur le carreau plusieurs patients avec pour certains des traitements lourds, donc des risques de décès, ou simplement celui d’inonder encore les urgences… on marche sur la tête en France, ça en devient inquiétant. Je suis triste pour mon pays.

J’interpelle de fait le maire de Blois mais surtout le Président de la République pour prendre leurs responsabilités.

Réveillons-nous !

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