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Protéger la nuit noire : entre préservation de la biodiversité et sobriété énergétique

La pollution lumineuse est un enjeu environnemental et sociétal de plus en plus prégnant. À Blois et dans le Loir-et-Cher, des actions concrètes se mettent en place pour limiter son impact. Christophe-Martin Brisset, membre de l’association Astronomie Blois-Saint-Gastronomie et correspondant de l’Association Nationale pour la Protection du Ciel et de l’Environnement Nocturne (ANPCEN), partage son expérience et ses réflexions sur ce combat pour préserver la nuit.

Un ciel à protéger, une biodiversité à préserver

L’association Astronomie Blois-Saint-Gastronomie, basée à Blois, dispose d’un observatoire à Fontaines-en-Sologne, dans une zone protégée de la pollution lumineuse. Cet emplacement, situé sur le périmètre du Grand Chambord, offre un environnement idéal pour observer un ciel de qualité. « Ici, nous sommes suffisamment éloignés des lumières urbaines pour profiter d’un ciel noir, un patrimoine que nous devons protéger », explique Christophe-Martin Brisset.

Mais les enjeux ne concernent pas seulement l’observation des étoiles. La pollution lumineuse affecte également la biodiversité nocturne. « Plus de 60 % des espèces animales sont actives la nuit. La lumière artificielle perturbe les cycles biologiques des insectes pollinisateurs, essentiels à la reproduction des plantes », rappelle-t-il avec Suzel Chauvin. Les papillons nocturnes, par exemple, sont particulièrement impactés par les éclairages blancs riches en spectre bleu, qui inhibent leur activité.

Des mesures locales pour réduire la pollution lumineuse

Dans le Loir-et-Cher, plusieurs communes ont adopté des politiques d’extinction de l’éclairage public pendant la nuit. « À Blois, par exemple, une grande partie du parc d’éclairage est coupée entre 23h et 4h30. Cela représente déjà un progrès significatif », souligne Christophe-Martin Brisset. D’autres communes, comme Vineuil, Saint-Gervais-la-Forêt ou Chailles, participent également à cet effort de sobriété énergétique.

Ces initiatives s’inscrivent dans un cadre national, marqué par les plans de sobriété énergétique. Selon Christophe-Martin Brisset, prolonger l’extinction de Blois jusqu’à 5h30 permettrait de réduire encore de 7 % la facture énergétique de la ville. « Ce serait une heure de plus pour protéger la biodiversité et économiser l’énergie. Un petit geste, mais un grand pas pour l’environnement. »

Dans le Grand Chambord, 15 des 16 communes pratiquent désormais l’extinction nocturne. Ces efforts permettent non seulement de limiter les nuisances lumineuses, mais aussi de promouvoir des actions locales reconnues par le label « Villes et Villages Étoilés », créé par l’ANPCEN en 2009. « Ce label valorise les collectivités qui s’engagent pour préserver la nuit noire et protéger la biodiversité », explique-t-il.

La lutte contre les enseignes lumineuses

Outre l’éclairage public, les enseignes commerciales et les publicités lumineuses posent un défi de taille. Avec le groupe créé à Blois, des vérifications nocturnes sont effectuées. « Beaucoup de commerces jouent le jeu et éteignent leurs lumières après leur fermeture, mais certains sont encore récalcitrants. Nous menons un travail de sensibilisation auprès d’eux pour leur rappeler leurs obligations, mais aussi les avantages qu’ils peuvent en tirer, comme une réduction de leur facture énergétique », indique Christophe-Martin Brisset.

Un projet de courrier type est en cours de réflexion. Il serait adressé aux nouveaux commerçants pour les informer en amont de leurs droits et devoirs en matière de nuisances lumineuses. « Il s’agit d’agir préventivement et non plus seulement curativement », précise-t-il.

Les nouvelles menaces : satellites et drones

La pollution ne se limite pas aux éclairages terrestres. Les satellites, en particulier les constellations comme Starlink, suscitent de vives inquiétudes parmi les astronomes. « Ces petits points lumineux qui se déplacent dans le ciel perturbent l’observation des étoiles. En période crépusculaire, ils sont particulièrement visibles, car ils reflètent la lumière du soleil couchant », explique-t-il.

Ce phénomène, qualifié de « pollution sidérale », pourrait s’aggraver dans les décennies à venir. « Aujourd’hui, nous n’en sommes qu’au début. Dans vingt ou cinquante ans, le ciel pourrait être envahi par des milliers de satellites, transformant notre vision du cosmos », alerte-t-il. À cela s’ajoute la problématique des débris spatiaux. Lorsqu’un satellite n’est pas désorbité, il reste en orbite, générant des risques de collisions et de nouveaux débris. « C’est un cercle vicieux : chaque impact crée de plus petits fragments, qui deviennent autant de dangers pour les satellites encore opérationnels », explique-t-il.

Un équilibre à trouver entre progrès et préservation

Christophe-Martin Brisset insiste sur l’importance de trouver un équilibre entre modernité et respect de l’environnement nocturne. « Si nos anciens, il y a 100 ans, revenaient aujourd’hui et voyaient le ciel, ils seraient choqués par cette quantité de lumière artificielle. Il y a un siècle, les nuits étaient noires, comme elles devraient l’être. »

Il reste toutefois optimiste quant aux avancées réalisées. « Les communes, les associations et les citoyens prennent de plus en plus conscience de l’importance de la sobriété lumineuse. Chaque geste compte, qu’il s’agisse d’éteindre une enseigne ou de repenser l’éclairage public. Ensemble, nous pouvons protéger la nuit noire. »

Préserver le ciel étoilé, ce n’est pas seulement une question d’astronomie. C’est un enjeu écologique, énergétique et culturel, qui nécessite la mobilisation de toutes et tous. À Blois et ailleurs, les étoiles peuvent encore briller, à condition de réduire notre empreinte lumineuse.

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