Une étude de The Lancet évalue à 41% la sous-estimation des décès à Gaza
Dans un contexte de guerre entre Israël et le Hamas, une étude publiée le 9 janvier 2025 par la prestigieuse revue médicale britannique The Lancet révèle une sous-estimation significative de la mortalité à Gaza. L’étude, réalisée par une équipe internationale de chercheurs dirigée par Zeina Jamaluddine de la London School of Hygiene & Tropical Medicine, estime que le nombre total de décès dus à des blessures traumatiques entre le 7 octobre 2023 et le 30 juin 2024 atteint environ 64 260 personnes, soit 41 % de plus que les 37 877 décès officiellement rapportés par le ministère de la Santé palestinien (MoH).
Méthodologie : une analyse par capture-recapture
Pour parvenir à cette estimation, les chercheurs ont utilisé une méthodologie de capture-recapture, fréquemment employée en épidémiologie et dans les zones de conflit. Cette technique consiste à combiner plusieurs sources de données indépendantes afin d’identifier les cas recensés dans chacune et d’estimer les décès non rapportés. Les chercheurs ont travaillé à partir de trois listes principales : les rapports des hôpitaux transmis par le ministère de la Santé palestinien; une enquête en ligne lancée par le MoH en janvier 2024, qui a collecté des données rétrospectives sur les décès depuis octobre 2023; des avis de décès publiés sur les réseaux sociaux, issus de plateformes telles que Facebook, Telegram et WhatsApp. Après avoir éliminé les doublons et standardisé les données, l’équipe a appliqué des modèles statistiques log-linéaires pour estimer le nombre de décès non enregistrés sur ces trois listes.
59 % des victimes sont des femmes, des enfants et des personnes âgées
L’analyse révèle que 59,1 % des victimes recensées étaient des femmes, des enfants de moins de 18 ans et des personnes âgées de plus de 65 ans, des groupes particulièrement vulnérables dans les conflits armés. Parmi les 28 257 décès pour lesquels des données démographiques étaient disponibles, 37,2 % étaient des femmes et 33,3 % des enfants.
Le taux de mortalité annuel lié aux blessures traumatiques est estimé à 39,3 décès pour 1 000 personnes, soit un ratio de 14 fois supérieur au taux de mortalité toutes causes confondues enregistré en 2022. Ces chiffres traduisent une intensité exceptionnelle du conflit, notamment lors des trois premiers mois (octobre à décembre 2023), période durant laquelle les bombardements aériens ont été les plus intenses.
Comparaison des chiffres officiels et estimation finale
Alors que le ministère de la Santé palestinien rapportait 37 877 décès au 30 juin 2024, l’estimation finale de The Lancet s’élève à 64 260 décès, avec un intervalle de confiance de 95 % allant de 55 298 à 78 525 morts. Si l’on inclut les personnes portées disparues mentionnées dans l’enquête en ligne mais non confirmées comme décédées, le total pourrait atteindre 68 662 morts.
L’étude met en avant les difficultés rencontrées par le MoH pour enregistrer les décès en raison de la destruction des hôpitaux, des coupures de communication et du chaos causé par les frappes aériennes. Ces conditions ont conduit à une collecte de données fragmentaire et géographiquement biaisée, particulièrement dans le nord de la bande de Gaza, initialement la zone la plus touchée.
Les résultats de cette étude illustrent la gravité de la crise humanitaire à Gaza et l’ampleur des pertes civiles. Les auteurs appellent à une enquête indépendante sur les violations potentielles du droit international humanitaire et à la mise en place de mécanismes robustes de suivi de la mortalité pour mieux documenter les conséquences des conflits armés.
Dans ce contexte, l’Inter-organisations 41 organise un nouveau rassemblement « en solidarité avec la Palestine » à Blois, Place Lorjou, dimanche 12 janvier 2025, à 11h.
