Vie locale

« Pas d’Enfant à la Rue » exige une solution digne et urgente pour les familles

Le compte à rebours se poursuit à Blois, 76 enfants et 39 mamans doivent toujours se retrouver sans toit à compter du 1er avril 2024, date correspondant à la fin de la trêve hivernale. Le Conseil départemental n’entend plus financer leur habitat en se référant au cadre de la loi Molle (lire ici). Le collectif Pas d’Enfant à la Rue, en collaboration notamment avec la Cimade et le collectif de soutien aux sans-papiers, a une nouvelle fois tiré la sonnette d’alarme ce mardi 26 mars 2024 devant la Préfecture et le Conseil Départemental en rassemblant des Blésoises et Blésois.

Des mères isolées et leurs enfants étaient également présents. « Nous tenons à vous remercier d’être venus si nombreux afin de nous soutenir concernant cette initiative prise par le Conseil départemental de Loir-et-Cher, a déclaré la première maman. Je prends la parole pour souligner une situation particulière : parmi les 39 mères concernées, toutes se retrouvent dans une position délicate, ayant à charge 76 enfants. Nous demandons au Conseil Départemental de reconsidérer sa position. En effet, beaucoup d’entre nous se trouvent sans solution, vivant parfois dans une irrégularité, sans logement, sans ressources, sans emploi, et sans papiers. Faites quelque chose pour nous, et plus particulièrement pour ces enfants. Ils sont encore jeunes et le seul pays qu’ils connaissent, c’est ici, la France. Nous tenons à ce pays et souhaitons y rester. Pour cela, nous demandons la régularisation de notre situation, l’obtention de papiers, afin de pouvoir travailler et contribuer à la société française, plutôt que de rester inactifs. Nous voulons prendre soin de nos enfants et participer pleinement à la vie en France. Nous appelons le Conseil Départemental et la Préfecture à revoir nos situations. »

Une seconde mère a pris la parole afin d’exprimer ce souhait partagé de pouvoir travailler, d’intégrer la société française, et d’offrir un bel avenir aux enfants : « Nous faisons face à des situations difficiles et aspirons à une autre vie. Nous ne sommes pas venus en France pour vivre dans ces conditions. Nous avons quitté notre pays, poussés par la souffrance, dans l’espoir que la France pourrait nous offrir de l’aide, a-t-elle souligné. Cette souffrance est précisément ce qui nous a contraints à partir, à la recherche d’un soutien et d’une meilleure existence. Pourtant, ici, on nous dit qu’il faut repartir, sans savoir où aller, surtout avec nos enfants. Parmi nous, il y a des femmes enceintes et des mères avec plusieurs enfants, qui cherchent simplement un meilleur avenir pour eux, un avenir qu’elles n’ont pas pu sécuriser dans leur pays d’origine. Nous sommes venus en France pour travailler et contribuer à la société. Malheureusement, nous sommes confrontés à une situation difficile au quotidien, une incertitude constante. Elle pèse lourdement sur nous, surtout en pensant à nos enfants. Nous implorons votre aide. Nous ne sommes pas ici par choix mais par nécessité. Si la France ne veut pas nous soutenir, vers où pouvons-nous nous tourner ? »

manifestation

Ce désespoir trouvera peut-être une réponse en justice. C’est l’objectif de la Cimade, qui avec trois avocats, entend retourner la situation via une décision favorable du Tribunal Administratif d’Orléans.

sans papiers

Didier Richefeux, membre du Collectif de soutien aux sans papiers, a pris le micro pour exprimer son incompréhension suite à la décision du Conseil départemental de se cantonner au cadre de la loi sans percevoir son esprit. « Cette assertion n’a aucune légitimité face à la mise en danger d’êtres humains vulnérables, a-t-il lancé. Aucune législation ne peut justifier ni légitimer de telles atteintes intolérables aux droits fondamentaux des enfants. La France a signé la Convention internationale des droits de l’enfant, s’engageant à protéger les droits à l’hébergement, à l’éducation, à la santé, et le droit des enfants de vivre pleinement leur enfance. L’intérêt supérieur de l’enfant et la non-discrimination sont des principes juridiques supranationaux qui doivent être respectés par tous les États signataires de cette Convention. La vider de son sens pour des raisons bassement politiques, nationales ou financières, serait indigne et constituerait une violation du droit international. Les valeurs républicaines de fraternité et de solidarité ne peuvent être traitées comme des variables d’ajustement en fonction des caprices politiques antirépublicains de certains décideurs départementaux. Ces valeurs de fraternité et de solidarité ne peuvent être systématiquement réduites à un coût économique. C’est intolérable et encore moins acceptable. A combien estimez-vous la vie d’un enfant ? Ces propos sont innommables, honteux et désastreux. Quand considérera-t-on que tous les enfants représentent une richesse extraordinaire pour la France ? Quand les petits marquis locaux comprendront-ils que les enfants d’origine étrangère, déjà assis sur les bancs de nos écoles, contribuent à la richesse nationale par leur intégration sociale ? Pour quelle raison cette politique d’exclusion s’acharne-t-elle particulièrement sur les enfants étrangers, les condamnant d’emblée au double désavantage d’être né ailleurs et d’être enfant ? Rien n’est plus injuste et plus révoltant. Si nous devions mesurer le degré de la politique de protection des personnes vulnérables par les actions mises en œuvre, nous constaterions un gouffre insondable. L’État a certes transféré aux départements les compétences de l’aide sociale à l’enfance, mais il reste fondamentalement responsable de la qualité de la prise en charge des personnes vulnérables. Nous assistons manifestement à une quasi-absence de prise en considération des actions départementales en faveur des enfants. Comment accepter que 76 enfants et leur mère soient brutalement expulsés de leur modeste chambre d’hôtel sans aucune proposition de solution d’hébergement adéquate ? Dans cette histoire, la caravane passe et les enfants pleurent. Alors, que faisons-nous ? Nous demandons, pour notre part, de mettre fin à cette immoralité, à cette défaite idéologique et à cette logique financière, pour enfin permettre l’accès au marché du travail, nous en avons besoin aujourd’hui. Cela rendra leur dignité aux personnes, leur permettra de s’intégrer et de s’émanciper, et leur donnera une place dans notre société. Il est urgent de rejeter cette politique de la honte et de redonner un sens concret aux valeurs qui nous unissent : liberté, égalité, fraternité. Aucun être humain ne devrait être considéré comme illégal. »

slogans

Dans une volonté d’enfoncer le clou, Julien Colin, s’est exprimé au nom du collectif « Pas d’enfant à la rue 41″en s’adressant nommément à Xavier Pelletier, Préfet de Loir-et-Cher, et à Philippe Gouet, Président du Conseil Départemental de Loir-et-Cher. « Messieurs, le collectif « Pas d’Enfant à la Rue » de Blois, soutenu par des citoyens ordinaires qui transcendent tout clivage politique, se concentre uniquement sur un principe fondamental : la dignité. La dignité qui exige de respecter la Convention Internationale des Droits de l’Enfant, ratifiée par la France en 1990, assurant à chaque enfant un droit au logement. La dignité de ne pas laisser sans solution d’hébergement 39 mères et 76 enfants, prévenus par un courrier de la fin de prise en charge 15 jours à l’avance. La dignité d’héberger ces familles, ces enfants, ces nouveau-nés dans des conditions dignes, dans des logements décents. Mesdames et Messieurs les conseillers départementaux, une question nous interpelle : êtes-vous tous en accord avec cette interprétation de la loi, constamment évoquée par votre président, en ce qui concerne la protection de l’enfance et la prise en compte des besoins fondamentaux des enfants ? »

Julien Colin a cité les soutiens politiques dans le combat du collectif : « De nombreux élus, de divers horizons politiques, soutiennent notre action citoyenne. Les élus de la Ville de Blois, de la Région Centre-Val de Loire, du CIAS, ainsi que ceux de Vineuil, de Saint-Gervais-la-Forêt et de La Chaussée-Saint-Victor, se sont notamment montrés ouverts au dialogue et à la collaboration. Les instances de l’Éducation Nationale cherchent également à établir une cohérence entre tous les acteurs concernés par cette problématique, a expliqué le membre du collectif. Il est bien connu que l’hébergement d’urgence est coûteux, extrêmement cher. Nous sommes d’accord, Monsieur le Président, sur le fait que financer des nuits d’hôtel pour des familles, certaines depuis trois ans, est onéreux. À contrario, financer des logements pérennes serait beaucoup moins coûteux. Il n’est pas trop tard pour adopter ce type de solution. » Le budget consacré par le Département à cette prise en charge a été de 3,6 M€ en 2023.

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Florence Doucet, vice-présidente chargée de la solidarité liée à l’action sociale, à la famille et à la protection de l’enfance, a fait savoir ces derniers jours que « les mères relevant toujours du dispositif seraient bientôt accueillies avec leurs enfants dans de meilleures conditions d’hébergement au sein de la résidence Rocheron, à Blois, animée par l’association ASLD ». En outre, « courant 2025, elles seront accueillies dans la nouvelle résidence intergénérationnelle Lumière, à Blois, en cours d’aménagement ». Ce projet représente 1,4 M€ d’investissement pour le département. « Nous saluons cette initiative, mais le site Lumière ne sera prêt qu’en 2025, il ne constitue donc pas une solution immédiate, réagit Julien Colin. En revanche, « le Centre De Formation Pompiers 41, à Vineuil, vide depuis sa construction, pourrait servir à accueillir de nombreuses familles. Face aux coûts d’hébergement d’urgence évoqués, qu’en est-il du coût de cet équipement public restant inutilisé ? »

Enfin, Julien Colin a interpellé le Président du Conseil Départemental : « Vous êtes le seul interlocuteur à n’avoir pas encore rencontré personnellement le collectif pour échanger. Nous restons disponibles pour une rencontre dans les jours à venir, période qui s’avèrera décisive. » Et il a prévenu : Le collectif Pas d’Enfant à la Rue, avec le soutien de la Cimade, de la Ligue des Droits de l’Homme, et d’autres, n’hésitera pas à appeler à des actions et mobilisations nécessaires pour atteindre un objectif unique et crucial : aucun enfant à la rue. »

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