Ciclade : comment récupérer les fonds d’un compte ou d’une assurance vie oubliés

Au 7 août 2025, la Caisse des Dépôts et Consignations gère encore plus de sept milliards d’euros issus de comptes bancaires, de produits d’épargne salariale et de contrats d’assurance vie inactifs, non réclamés par leurs titulaires ou ayants droit. Ces sommes, transférées en application de la loi Eckert du 13 juin 2014, sont théoriquement récupérables. En pratique, elles ne le sont que très rarement. Une procédure pourtant gratuite, Ciclade, permet d’en faire la demande, mais elle demeure largement méconnue. Si rien n’est entrepris, ces avoirs tomberont progressivement dans les caisses de l’État, au terme d’un processus légal bien encadré.
Une épargne sans visage
La majorité des fonds transférés à la Caisse des Dépôts provient de comptes ou contrats dont les titulaires sont décédés ou restés injoignables, ou encore de livrets d’épargne ouverts puis négligés. Les situations varient : assurance vie oubliée par le bénéficiaire désigné, plan épargne logement ouvert par un aïeul, livret A ancien jamais clôturé, bon de capitalisation détenu sans instruction précise. À cela s’ajoutent des contrats d’épargne retraite perdus de vue après plusieurs changements d’employeur, ou encore des comptes clôturés sans que les soldes aient été transférés aux clients concernés.
Ces oublis sont parfois dus à un simple déménagement ou à un changement d’état civil, parfois à une méconnaissance totale du lien contractuel. Le plus souvent, l’existence même du contrat ou du compte est ignorée par les bénéficiaires potentiels. C’est dans ces interstices administratifs que s’accumule un patrimoine silencieux, en attente d’un détenteur légitime.
Neuf milliards transférés, moins d’un milliard restitué
Depuis l’entrée en vigueur de la loi Eckert, près de neuf milliards d’euros ont été transférés à la Caisse des Dépôts. À ce jour, un peu moins d’un milliard a été restitué. Plus de sept milliards restent donc en sommeil. Chaque année, de nouveaux fonds viennent grossir ce total, issus d’établissements bancaires traditionnels ou de banques en ligne ayant cessé leurs activités. Ainsi, les soldes de nombreux comptes non réclamés ont été transmis récemment par ING, Orange Bank ou Ma French Bank. Dans ce dernier cas, les soldes des comptes ont été intégrés au dispositif à partir du 10 juillet 2025, en réponse à des demandes insistantes de consommateurs inquiets d’une gestion opaque des fermetures.
L’exemple d’Orange Bank est révélateur : seuls 105 000 clients sur 285 000 ont pu récupérer leurs fonds avant le transfert. Les autres sont désormais concernés par la procédure de restitution via la plateforme publique.
Une procédure gratuite mais sous-utilisée
Le portail mis en place par la Caisse des Dépôts est le seul outil permettant de rechercher et de réclamer ces sommes. Il est accessible à toute personne, quelle que soit sa nationalité, et la démarche est entièrement gratuite. Pour initier une recherche, il suffit de renseigner ses données personnelles ou celles d’un proche décédé. Si une correspondance est trouvée, une demande de restitution peut être déposée, accompagnée des justificatifs nécessaires (acte de décès, lien de parenté, pièce d’identité, etc.).
Depuis janvier 2025, les contrats de prévoyance temporaire décès sont également intégrés au dispositif. Ces contrats, souscrits à titre individuel ou professionnel, sont souvent inconnus des proches du défunt. Leur présence dans le système représente une avancée significative pour les ayants droit, qui disposent désormais d’un levier pour vérifier leur éventuelle désignation comme bénéficiaire.
Le site Ciclade, mis à jour régulièrement, centralise toutes les recherches. Aucun intermédiaire privé n’est habilité à traiter les demandes, et aucun frais ne peut être exigé pour accéder aux informations ou déposer un dossier.
Une échéance irréversible
Le temps joue contre les bénéficiaires. Si une demande de restitution peut être faite jusqu’à vingt ans après le transfert des fonds à la Caisse des Dépôts, la loi prévoit qu’au bout de trente ans, ces sommes deviennent définitivement propriété de l’État. En 2025, les montants transférés en 1995 atteindront ce seuil. Passé le 31 décembre, ils ne seront plus récupérables.
Un gisement méconnu
En moyenne, les sommes restituées s’élèvent à 1 749 euros. Ce chiffre, issu des données consolidées de la Caisse des Dépôts, témoigne de l’ampleur des avoirs concernés. Pour certains dossiers, notamment en matière d’assurance vie ou de retraite complémentaire, les montants peuvent être bien supérieurs.
Pourtant, malgré le caractère public du service, son accessibilité en ligne et l’absence de frais, la plateforme reste sous-utilisée. Le dispositif repose sur une logique de démarche volontaire. Or, pour qu’il y ait démarche, il faut d’abord une conscience. L’immense majorité des sommes non réclamées le sont par ignorance, non par négligence.
Ce qu’il faut savoir
- Montant total non réclamé : plus de 7 milliards d’euros au 7 août 2025.
- Montant transféré depuis 2016 : 9 milliards d’euros.
- Montant restitué : moins de 1 milliard.
- Plateforme officielle : https://ciclade.caissedesdepots.fr/
- Procédure : gratuite, individuelle, avec justificatifs.
- Prescription : réclamation possible pendant 20 ans, transfert irréversible à l’État après 30 ans.
- Moyenne des restitutions : 1 749 €.