Dix ans de la Maison de la BD sur un air de fête

En ce premier vendredi de septembre 2025, la cour de la Maison de la BD s’est emplie d’une foule. Les silhouettes découpées en carton noir, posées devant les enceintes et les instruments de musique, donnaient au lieu une allure de décor adapté. Sous le ciel encore clair, habitants, élus, partenaires, auteurs ont écouté, attentifs, les voix qui se succédaient au pupitre, entrecoupées d’applaudissements. Dix ans déjà : l’anniversaire avait l’air d’une évidence, tant cette Maison de la BD est désormais entrée dans le paysage blésois. Il valait bien un concert de Paddy O’Turner et quelques verres…
Avec Jean-Charles Enriquez, un retour aux origines
Premier au pupitre, Jean-Charles Enriquez, président de la Maison de la BD, nous a plongé douze ans en arrière, à l’époque où l’idée d’une Maison dédiée à la bande dessinée surgit pour la première fois. Il se souvint d’une réunion décisive : « Jean-Pierre Baron, alors président de l’association, et Bruno Genini, le directeur, nous avaient fait une sacrée annonce. Marc Gricourt nous proposait d’offrir à bd BOUM un lieu dédié à ses activités, un lieu pour la BD, tout comme la magie avait déjà sa Maison à Blois. » Entre crainte de perte d’identité et enthousiasme devant l’opportunité, il fallut trancher. « Pour ma part, j’étais persuadé que c’était une opportunité unique. » Dix ans plus tard, la conviction est confirmée : « Le défi a été relevé haut la main. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : c’est une totale réussite. »

Bruno Genini : dix ans d’anecdotes
Après ce récit fondateur, Bruno Genini, directeur de la Maison de la BD, choisit une tonalité plus légère. Fidèle à l’esprit de bd BOUM, il décida d’évoquer dix années à travers des anecdotes. Ainsi, 2020, année du premier confinement, marqua une cruelle ironie. Pour les cinq ans de la Maison, tout était prêt : expositions, affiches, cartons d’invitation. Le thème en était Le Grand dehors. Et soudain, le monde entier fut confiné. Autre souvenir, 2015 et l’année de l’ouverture, avec une exposition consacrée à Poulain. Débats houleux : était-ce bien de la bande dessinée ? Peu importait : ce fut un succès. « Cette exposition a permis l’appropriation de la Maison par les habitants de Blois », affirme Bruno Genini.

Brigitte Luciani : la métaphore du terrier
Brigitte Luciani, marraine de la Maison de la BD, choisit une métaphore à la fois tendre et parlante : celle du terrier. En préparant son intervention, elle avait fait le parallèle entre son travail sur La Famille Blaireau-Renard et la Maison de la BD. « Un terrier, c’est un endroit où l’on est en sécurité, où l’on est abrité, où l’on se retrouve et où l’on se réchauffe entre compères. » Elle se rappela sa résidence de deux mois, il y a dix ans, en même temps que l’ouverture : « Je me suis sentie bien accueillie, bien protégé. » Elle évoqua aussi l’Atelier Kraft, refuge pour les auteurs dans la Maison, et la richesse du dialogue entre créateurs et publics. Elle insista sur l’importance des ateliers et des formations, ouverts aux professionnels comme aux habitants. Pour elle, la Maison de la BD est « une maison citoyenne », un exemple de ce que peut produire la culture pour la société.

Marc Gricourt : un rêve devenu réalité
Marc Gricourt, maire de Blois, se souvint lui de ce « rêve » formulé dès son élection en 2008. « Quand on est élu, on fait aussi des rêves. Et ce rêve, il est devenu réalité. » Il exprima sans détour son sentiment : « Je suis très, très fier d’avoir apporté à cette ville un beau projet qui s’appelle la Maison de la BD. » Pour lui, l’institution est désormais une évidence, au même titre que le festival bd BOUM, deuxième grand festival culturel du territoire après Les Rendez-vous de l’Histoire. Puis, il rappela aussi le rôle de la bande dessinée comme art de liberté, essentiel « dans un moment historique où la démocratie et les libertés individuelles sont remises en cause ».

Delphine Benassy, vice-présidente de la Région en charge de la culture, souligna la capacité de la Maison de la BD à être à la fois lieu de découverte, de formation, de résidence et de coopération. « Tous ces aspects nourrissent les valeurs et les objectifs de la politique culturelle régionale, Culture à partager. » Elle rappela combien il était précieux d’offrir aux habitants des moyens d’expression et de débat : « La Maison de la BD est une maison citoyenne, qui participe à la vitalité de notre démocratie. »
Enfin, Faustin Gaden, secrétaire général de la préfecture et sous-préfet de Blois, conclut les interventions officielles. En poste depuis deux ans seulement, il avoua n’avoir découvert l’existence de la Maison qu’en arrivant à Blois. Depuis, il mesure combien elle est devenue une institution reconnue : « Nous sommes fiers, en tant que services de l’État, d’accompagner la Maison de la BD dans cette mission citoyenne qu’elle assume depuis dix ans. »

Comme à la Maison
Ainsi se sont enchaînés les discours, entre souvenirs, hommages et visions d’avenir. Chacun, à sa manière, a souligné ce que la Maison de la BD a apporté à Blois : un lieu d’accueil pour les créateurs, un espace de formation et de partage, une vitrine culturelle ouverte à toutes et tous, un symbole de liberté et de citoyenneté. Dix ans seulement, mais déjà l’impression d’une évidence, comme si la Maison de la BD avait toujours existé. Dix ans, et déjà une maturité qui en fait une institution unique en France. Dix ans, enfin, pour rappeler qu’à Blois, la bande dessinée est un bien partagé. L’accès y est libre, comme BD Boum est gratuit. Tout un symbole.