Entre cire, pierre et couleur : sept artistes investissent la Galerie Wilson

Du 1er au 31 mai 2025, la Galerie d’Art Wilson, au 23 avenue du Président Wilson à Blois-Vienne, accueille à nouveau une exposition collective qui réunit sept artistes : cinq peintres — Élise Pioger, Philippe Moller, William Babret, Janet Biggs, Édith Lanquetin — et deux sculpteurs — Denis Pugnère et Anne Boisaubert. Orchestrée par Michel Bizieux, commissaire d’exposition, cette sélection offre une traversée sensible et engagée de la création contemporaine. Le vernissage public a eu lieu le 1er mai, et le public a répondu présent en masse en ce jour férié.

Élise Pioger, peindre avec la cire et la Loire
Artiste-peintre et apicultrice, Élise Pioger se définit comme une « Artpicultrice » (lire ici). Elle travaille depuis vingt ans avec la cire d’abeille issue de ses propres ruches, selon la technique ancienne de l’encaustique. « Je peins avec de la cire. Avant de peindre, je fais un peu de cuisine : je crée mes couleurs à l’aide de pigments, je fonds ma cire… », explique-t-elle.

Cette matière première, normalement destinée aux ruches ou à la fabrication de bougies, devient pour elle médium de création. Inspirée par la Loire et la Sologne, elle confie : « Je suis complètement immergée dans la nature. Je vais dans la forêt, je regarde le sol, le ciel… » Elle capture mentalement ses observations, parfois en s’appuyant sur des photographies amies. « J’aime y ajouter des brindilles, racines, feuilles… quand c’est plus que de la dentelle. », sourit-elle. Si elle ne peut peindre dehors — « je suis tout de suite envahie par des petites pilleuses attirées par l’odeur de la cire » — elle compose dans le silence de son atelier, entre bleu gris et vert d’eau, des paysages sensibles et organiques.

Philippe Moller, l’abstraction comme exploration harmonique
Autodidacte, Philippe Moller a bâti sa démarche sur l’étude des écrits de Kandinsky et d’Itten, tout en bénéficiant des conseils d’une mère peintre figurative formée aux Beaux-Arts de Paris. Il s’est orienté vers l’abstraction pour « libérer la peinture de la représentation », ouvrant ainsi la voie à une exploration formelle où les rapports de surfaces, de traits et de tonalités construisent des dynamiques rythmiques.

Il s’intéresse à la composition par translations, rotations, jeux de couleurs chaudes ou froides. Le regard circule à travers la toile, s’y engage lentement jusqu’à s’y immerger pleinement. Chaque toile devient un espace de variation et de circulation, où la structure n’exclut pas l’émotion.
William Babret, monochromie florale et rigueur artisanale
William Babret, né en 1988, a décidé de se consacrer entièrement à la peinture à l’âge de 36 ans, après des années de voyage. Inspiré par les hibiscus d’Andy Warhol, il choisit la fleur comme motif central. « Je voulais me baser sur une seule couleur, et jouer avec tout ce qui est nuance. »

Il fabrique lui-même ses châssis en pin, les recouvre d’un contreplaqué tendu, puis y applique acrylique, vernis et résine époxy. Cette surface permet une brillance caractéristique. L’aventure a commencé dans le garage de la grand-mère de sa compagne. Il peint des fleurs en séries, en variant les tonalités au sein d’une même teinte. « À chaque fois, j’essaie de faire ressortir quelque chose de nouveau. »
Janet Biggs, entre inconscient, allégorie et transmission picturale
Peintre et professeure d’arts visuels, Janet Biggs a vécu et travaillé en Angleterre, en Allemagne, aux États-Unis, en Afrique de l’Ouest, avant de s’installer en France. Son œuvre est intuitive, marquée par la mémoire, le rêve, les couches mentales et picturales.

Son parcours inclut une recherche poussée autour de L’Allégorie de la Prudence de Titien, conservée à la National Gallery de Londres. Elle y a mené une étude double : dessin contemporain au Royal College of Art, et recherche historique. Elle a pu s’approprier le procédé allégorique et l’intégrer à sa propre peinture. Janet Biggs élabore un langage visuel singulier, à la croisée de l’histoire de l’art et de l’inconscient individuel, et défend une approche allégorique renouvelée dans le champ contemporain.
Édith Lanquetin, palette intérieure et Loire lumière
Édith Lanquetin peint depuis l’enfance. Elle se souvient des boîtes de gouaches, du plaisir d’arranger les couleurs, de la solitude joyeuse de la création. Curieuse et manuelle, elle explore mosaïque, vannerie, tapisserie, théâtre, jardin. Sa formation s’est construite au fil d’ateliers et d’expérimentations. Eclectique, toujours en recherche de nouvelles matières, de nouvelles formes d’expression, de nouveaux thèmes, elle revient ici avec une nouvelle proposition autour de la photographie. C’est à découvrir dans une alcôve de la Galerie d’art Wilson.

Denis Pugnère, la sculpture comme parole taillée
Derrière un humour tranchant, Denis Pugnère construit depuis cinquante ans une œuvre sculptée exigeante. « Si j’écris un jour mon autobiographie, ça commencera par : “J’ai longtemps rêvé d’être écrivain. Un jour, j’ai décidé de fermer ma gueule, et je suis devenu sculpteur.” En fait, je ne l’ai jamais fermée », lance-t-il au public, au micro de RCF.

Formé à Blois comme tailleur de pierre, graveur lapidaire, puis à Orléans et Paris VIII, il développe une sculpture tactile, minérale, expressive. « Je vais à la pêche aux cailloux dans des carrières abandonnées. Pourquoi celui-là plutôt qu’un autre ? C’est l’inconscient. » Il refuse la surpolition. « La sculpture, ce n’est que l’ombre et la lumière. S’il y a trop de poli, on ne voit plus rien. » Son œuvre combine marbres, serpentines, laves, bronzes. « Je ne parle jamais de mon art. C’est mon boulot. Si quelqu’un ne connaît rien à la sculpture, et qu’il trouve ça beau, ça me suffit. »
Anne Boisaubert, la terre pour sonder l’âme humaine
Anne Boisaubert découvre la sculpture par un coup de cœur, un jour de promenade. « J’en rêvais la nuit. Il fallait que je touche la terre. » Ancienne cadre export, elle se forme aux Beaux-Arts d’Orléans, auprès de Colette Grande, puis seule dans son atelier. Elle sculpte avec exigence, en silence, parfois sur musique, cherchant dans la matière une voie vers l’émotion, le sens, l’hommage.

« Mes sculptures sont figuratives, et toutes, je dirais, une quête de l’âme humaine. » Elle puise ses sujets dans la vie, l’écoute, les lectures. Ses œuvres rendent hommage à Beethoven (Hymne à la joie), à Camille Claudel, à la Loire et ses mariniers (Requiem de Loire), à Schiller. « À partir du moment où quelque chose me touche profondément, je sens l’élan. J’ai envie d’exprimer ça. » Elle travaille par immersion : « Pour Beethoven, j’ai acheté une trentaine de livres, regardé des reportages, écouté toute sa musique. » Anne Boisaubert cache aussi des symboles dans ses sculptures : « Si on passe vite, on ne verra pas forcément les corps des morts dans la chevelure de Requiem de Loire, ou la spirale de la fraternité derrière Beethoven. » L’œuvre, pour elle, est une offrande. « Le plus beau cadeau, c’est l’étonnement, l’émotion, le sourire qu’elle dessine. »

Informations pratiques :
Exposition collective du 1er au 31 mai 2025 à la Galerie Wilson
Galerie d’Art Wilson – 23 avenue du Président Wilson, Blois-Vienne
Horaires : mercredi à vendredi 14h–19h, samedi 10h–19h
Entrée libre – galerie accessible aux personnes à mobilité réduite