Finances, Ben, Poulain, Gaza… un conseil municipal dense à Blois
Ce lundi soir se tenait le conseil municipal à Blois, une séance qui a débuté par une pensée pour Ben Vautier, pilier du mouvement Fluxus, essence de la Fondation du doute. D’ailleurs, une partie de la rue de la Paix, où se trouve l’espace d’art moderne, pourrait être renommée au nom de l’artiste.
Le premier point de friction important est intervenu au sujet des finances, avec une intervention musclée de Malik Benakcha suite aux déclarations du maire, Marc Gricourt, et malgré une situation globalement positive. Comme l’illustre la capacité de désendettement historiquement basse avec 4.4 années. « Blois consacre une somme importante dans l’investissement avec 20.6M€ en 2023 soit 436€ par habitants, contre une moyenne à 345€ par habitant sur des villes de même strates hors Île-de-France en 2022, a observé l’opposant. La question n’est pas le volume des investissements mais bien les choix d’investissements et j’irai même plus loin, les choix d’aller au bout de choses sur certains projets et de beaucoup reculer sur d’autres. Nous pouvons regretter vos faibles taux de réalisation et la faiblesse réelle de vos investissements sur des secteurs clés comme la voirie, la sécurité, l’attractivité de notre territoire ou encore la lutte contre le réchauffement climatique. La situation commerciale et industrielle de la ville est inquiétante et doit obliger à remettre en cause vos choix d’investissements. »
Michel Chassier a également reconnu une situation financière globalement satisfaisante, avec un bémol. « C’est le fait aussi d’une hausse des recettes fiscales de 5,5% », a objecté l’élu RN. « Surtout, il faut pas se réjouir de ce résultat qui est très ponctuel. » Avec un niveau d’endettement de quatre ans, la Ville de Blois est donc un bon élève. « Les comptes sont flatteurs, juge le centriste Etienne Panchout. Et équilibrés. La Ville a largement utilisé ses actifs dans cette perspective. Et cela aura ses limites. Tout est fait pour que les comptes administratifs soient bons, et ils le sont. Ce serait bien qu’une ville avec de tels ratios ait des trottoirs et une voirie au niveau ! C’est un sujet majeur. Je vous propose de déambuler avec moi dans les rues, et pas dans le centre-ville. Il y a beaucoup de choses à dire sur la façon dont on utilise cet argent. Mais les chiffres sont bons, félicitations pour cela ! » Une situation financière saine, une bonne nouvelle, selon l’écologiste Nicolas Orgelet, qui invite à utiliser ces marges de manœuvre désormais.
« Ce compte administratif est bon, les ratios montrent que nous ne sommes pas dans une situation difficile, a rebondi Jérôme Boujot, premier adjoint. On pourrait mieux faire. On ne va pas s’en satisfaire. L’objectif est de travailler sur des investissements lourds. Nous avons la capacité à faire. Nous nous étions engagés à ne pas augmenter les taux d’imposition locaux, c’est tenu, de ne pas nous endetter, c’est tenu, et de conserver des marges de manœuvre, c’est tenu. »
Le Contrat de Ville 2024-2030 a été adopté ce lundi soir. Un contrat, fait en concertation avec les services de l’Etat et les habitants, qui concerne 25 % de la population blésoise, un public jeune. Trois ambitions dans ce plan : « une égalité de droits, une égalité des chances, une égalité des obligations », comme l’a expliqué Benjamin Vételé, adjoint à l’éducation et à la politique de la ville.
Dans une crise démocratique nationale, le niveau local peut sembler l’échelle idoine pour une participation citoyenne. Il en a été question lors du conseil municipal. « Nous avons constaté un désir d’implication ponctuelle. C’est pourquoi nous voulons constituer un réseau citoyen actif », a présenté Pauline Salcedo dans le cadre de la refonte des instances de démocratie vivante et permanente. Ce à quoi s’ajoutera un dispositif de régulation citoyenne, et à terme la mise en place d’une assemblée citoyenne afin de faire toujours de Blois un précurseur dans le domaine. Enfin, la création d’un conseil d’enfants (CM1 et CM2) a été exposée pour recueillir « une parole complémentaire » à leur hauteur sur leur cadre de vie quotidien.
Poulain
La fermeture de l’usine Poulain et la délocalisation de la production ont choqué à Blois, une ville intimement liée à la marque depuis 1848. D’autant plus qu’il s’agit là d’une décision purement financière puisque la structure est rentable. C’est pourquoi la Ville de Blois demande à Carambar & Co et Eurazeo, décisionnaires, de renoncer à la fermeture de l’usine ou de revendre la marque Poulain. Cela tout en lançant un message de soutien comme une expression de la mobilisation de tous les élu.es pour sauver ce site. « Nous le savons, il y a eu de possibles repreneurs de la marque Poulain et de l’usine. Il faut que l’Etat fasse pression, a déclaré Marc Gricourt. « Le site est reconnu comme viable, y compris par Carambar & Co. L’outil de production est certes surdimensionné, il y a une inflation sur les matières premières. Mais là nous sommes dans une caricature spéculative. L’Etat français a une lourde responsabilité et doit réagir. On ne peut plus avoir qu’une approche financière. Il faut marteler que si le capitalisme a des vertus, cela ne peut pas se passer ainsi. Nous allons publier une lettre ouverte région/agglo/ville pour alerter la population. Car il y a de potentiels repreneurs à condition que Carambar & Co veuille bien se séparer de Poulain. »
Gaza
Enfin, Gaza s’est invité au conseil municipal, qui a demandé – entre autres choses – un cessez-le-feu, et invité le président la République à reconnaitre l’Etat de Palestine, comme d’autres pays européens l’ont fait. Un vœu adopté qui a agacé les opposants Mathilde Desjonquères, Etienne Panchout, ou Malik Benakcha qui se sont interrogés sur la temporalité, et qui ont vu là de la « basse politique ». Bref, le conseil municipal s’est achevé sur une touche de tension, liée à l’actualité politique nationale, et une série de joutes. Au sujet de la temporalité, le maire de Blois a tout de même bien précisé que ce vœu datait d’avril et qu’il ne pouvait en conséquence être corrélé à une dissolution décidée en juin par le Président de la République.
Une tension qui s’est finalement envolée, gommée par une belle émotion et des applaudissements liés à la remise de la médaille de la ville à Yann Bourseguin pour tous les services rendus à Blois, un homme de devoir apprécié de tous au conseil municipal et au sein des services.