Nuits des Forêts à Blois : le Houppier nous présente le prochain acte II

Marc Alvarez 4 juin 2025

Du 13 au 15 juin 2025, l’éco-lieu Le Houppier, aux portes de la forêt de Blois, 1 allée de Bury (route de Chateaurenault) accueille une édition particulièrement dense et sensible des Nuits des Forêts. Porté par une programmation foisonnante, le rendez-vous se veut autant sensoriel qu’engagement joyeux pour une forêt partagée et habitée. Tout est pensé pour ralentir, s’émerveiller, comprendre, agir — dans une dramaturgie végétale où le moindre détail compte. Virginie Deville, responsable de la programmation, nous livre un éclairage sur chacune des propositions.

Une ouverture poétique et militante : Komorebi Causerie

La soirée du vendredi 13 juin à 18h30 s’ouvrira par une causerie au nom énigmatique : Komorebi Causerie. « Komorebi », explique Virginie Deville, désigne la lumière du soleil filtrée à travers les feuilles. Mais ici, c’est aussi le nom d’un groupement forestier citoyen. Le collectif viendra partager son expérience : comment ses membres, réunis par amour des forêts, cherchent à acquérir des hectares de bois pour y développer une sylviculture douce, respectueuse du cycle naturel. La causerie inclura également l’intervention d’un invité surprise, « quelqu’un qui connaît intimement la régénération des forêts et pourra répondre aux questions du public ».

Éclosions : deux scénographies végétales signées Pascal Guidicelli

À 19h45, la soirée se poursuivra par le dévoilement d’Éclosions, deux œuvres in situ créées par le paysagiste et plasticien Pascal Guidicelli. « Il cherchait un “terrain de jeu”. Il est venu, et ça a tout de suite matché », confie Virginie Deville. Les deux installations, pensées comme des scénographies végétales, évoquent la naissance d’un lieu, en écho à celle du Houppier. L’une d’elles sera installée dans la grande prairie, entre deux sapins. Ce dévoilement sera suivi d’un cocktail soft et bio, offert au public.

Une buvette rebaptisée « Archipel des saveurs » et un artisanat engagé

Durant tout le week-end, du 14 juin 12h au 15 juin 18h, les visiteurs pourront découvrir l’Archipel des saveurs — la buvette du festival — ainsi que les Curiosités locales à voir et à toucher. Il s’agit d’un espace à part entière, habité par des productions locales, sensibles et parfois étonnantes. Au programme : les pots de miel de l’apiculteur ayant installé trois ruches dans le jardin du Houppier ; les carnets poétiques de Tendre Papier ; Le recueil Dialogue du printemps de Thierry Lemoine, poète local ; les boucles d’oreilles en bois gravées au laser par Numéro 25 ; une exposition-vente de sculptures.

Chantier participatif : un mur en bois cordé

Du samedi matin 9h30 au dimanche soir 17h30, les volontaires pourront participer à la reprise d’un chantier en bois cordé, lancé l’an dernier mais interrompu faute de temps et de matériel. « On espère vraiment pouvoir finir cette année », explique Virginie. L’encadrement est assuré par Thierry, avec la possibilité de ne venir qu’une seule journée. Repas sur place, boissons offertes, vêtements de travail requis.

Racines : une exposition photo entre poésie et enfance

Autre moment fort en continu tout le week-end du festival Nuits des Forêts : l’exposition Racines – Fiançailles d’arbres et d’enfants, imaginée par le collectif Souffleurs Commando Poétique, dont Virginie fait partie. Treize portraits en kakémonos seront suspendus dans les arbres du jardin. Ces images sont l’aboutissement d’un projet mêlant écriture, observation et transformation. « Les enfants choisissaient un arbre, écrivaient un texte, puis étaient transformés par les artistes en “enfants-fleurs”. Ils se donnaient aussi des noms d’arbres inventés, comme Mohamed dit Bouche-Cornichouille. » Ce travail, à la fois drôle, tendre et philosophique, déploie une esthétique propre.

Samedi 14 juin : pédagogie, jeux, musiques et pique-nique

La journée commence à 10h avec une balade pédagogique intitulée « Une forêt, est-ce que ça boit ? », menée par Luce, de l’ONF. Elle abordera le cycle de l’eau en forêt, ce qu’on appelle « l’eau verte », son absorption par les arbres, son rôle dans la pluviométrie…

À 14h30, place à une invention : le Loto sonore et forestier. À partir d’un livre rassemblant 301 questions sur la forêt, les participants piochent un numéro, assistés par un tambour d’enfants et un lecteur à mégaphone. Récompenses pour les bonnes réponses, et rôles tournants : tout le monde peut devenir animateur. « C’est un format très drôle, très vivant. Une tentative ludique de transmission collective », commente Virginie.

À 16h, l’espace de l’Arbre à vœux ouvre. Les participant·es choisissent une forme de feuille, la reproduisent, écrivent un vœu pour la forêt, et l’accrochent à un arbre. Livres, coussins, chocolat, lenteur : « c’est une dégustation du temps, un moment suspendu ».

À 18h, concert-perfomance Réflexions volatiles, avec David Fricker et Reno Espinasse (chant et orgue de barbarie). Une conférence philosophico-clownesque sur les oiseaux, la liberté, la joie d’être vivant. Un moment rare.

Enfin, à 19h45, les Agapes en panier partagé réuniront les convives autour d’un pique-nique participatif, sur le même site que le concert, dans un vallon protégé de la route, véritable écrin naturel. « Celles et ceux qui n’ont pas assisté au concert peuvent nous rejoindre directement, mais ils doivent impérativement s’inscrire. C’est un festival itinérant, il y a plusieurs points GPS, on ne peut pas improviser », rappelle Virginie Deville.

Dimanche 15 juin : plantes, danse, contes et lectures

À 10h30, retour de Catherine Gruffat (association Fleurs et Vie) pour un atelier Boissons magiques et potions sauvages. Récolte, transformation et dégustation de plantes de lisière : un atelier d’une extrême précision sensorielle.

À 14h30, performance dansée et parlée Silva Mood, avec Virginie Deville et la chorégraphe Rachel Mateis. Inspirée du livre Être un chêne: sous l’écorce de Quercus de Laurent Tillon, cette création donne vie à deux âmes forestières se découvrant, s’apprivoisant, et invitant le public à une micro-rencontre finale.

À 15h, nouvelle session de l’Arbre à vœux au bord de la mare.

À 16h30, balade contée avec le Quatuoraconte : Jean-Claude Botton, Fred Pougeard, Mathilde Van den Boom et Claire Rassinoux, qui alterneront histoires forestières en déambulation.

Enfin, à 18h30, clôture avec le Quatuor Feuillu : une lecture à quatre voix mêlant textes philosophiques, extraits de romans… Aux côtés de Virginie Deville, on retrouvera Emmanuel Faventines (Cie du Hasard), Laurence Boisot (Cie du Divan), et Christophe Faure, comédien multicarte.

Le Houppier : un lieu en éclosion

Derrière cette programmation, un projet plus large : celui du Houppier, lieu éco-culturel en construction. Deux phases de travaux sont prévues pour l’été 2025. L’ouverture officielle est espérée pour fin septembre.

Virginie Deville, qui pilote le projet avec passion, vise une programmation mêlant ateliers créatifs, cours de yoga et théâtre, partages de savoirs, ciné-débats, le tout centré sur la forêt : « Je veux que le Houppier devienne un lieu de référence autour de la biodiversité forestière. » Sans subvention pour l’instant, le lieu repose sur les adhésions (de 5 à 15 euros/an) et des ateliers payants pour les professionnels. Une grille de programmation plus régulière est à l’étude pour la saison 2025-2026. Si une forêt pousse en silence, celle du Houppier bruisse, parle, vibre. Aux curieux de l’écouter — et d’y répondre.