Victor Hugo et Blois, toute une histoire

S’immerger dans les écrits et la correspondance de Victor Hugo, c’est parcourir des paysages réels et imaginaires où se mêlent histoire, politique et émotions humaines. Blois y figure par des souvenirs attestés : un séjour documenté, des descriptions précises, des échos poétiques. La relation entre l’écrivain et la cité ligérienne se noue à travers des liens familiaux, marqués à la fois par des instants de contemplation et par des épisodes tragiques.
En 1816, le père de Victor, le général d’Empire Joseph Léopold Sigisbert Hugo (1773-1828), s’installe à Blois, dans une maison située 73 rue du Foix. Militaire d’expérience, ancien gouverneur d’Avellino, il y termine sa carrière et y vit jusqu’à sa mort. Malgré une relation longtemps difficile, Victor et ses frères entretiennent avec leur père une correspondance régulière qui évolue, avec les années, vers un respect mutuel.
Le séjour de 1825
Au printemps 1825, Victor Hugo passe environ un mois à Blois, accompagné de son épouse Adèle et de leur fille Léopoldine. Ce séjour est documenté par une lettre autographe datée du 25 avril 1825, adressée au vicomte Alcide de Beauchesne et acquise en 2015 par les Archives départementales. Hugo y livre un tableau lyrique de la ville et de la demeure paternelle : « Tout est plein de poésie : la ville, son admirable site, ses romantiques souvenirs, la petite maison aux contrevents verts que nous possédons et que nous eût enviée Rousseau, le double jardin dominé par le monticule des Druides, l’arbre de Gaston et le château de Blois, mon petit cabinet dont la vue est ravissante et l’épée de mon vieux père. »

Le « monticule des Druides » évoqué pourrait correspondre à la butte des Capucins, promontoire dominant la ville, qu’Hugo décrira quelques années plus tard dans Les Feuilles d’automne (1830) : « Cherchez un tertre vert, circulaire, arrondi, / Que surmonte un grand arbre… »
Drames familiaux à Blois et en Sologne
La cité ligérienne est aussi associée à des épisodes tragiques. C’est à Blois que Eugène Hugo, le frère aîné de Victor, est frappé d’une crise de folie entraînant son internement définitif. Par ailleurs, le premier enfant de Victor et Adèle, Léopold Victor Hugo, meurt à l’âge de trois mois ; il est inhumé en Sologne, dans le Loir-et-Cher.
Blois et la région dans l’œuvre de Victor Hugo
Plusieurs écrits témoignent de l’impression durable laissée par la ville et ses alentours. Dans des échanges épistolaires, Victor Hugo décrit Blois comme « pittoresque et lumineux ». Il évoque aussi « un entassement irrégulier et confus de maisons, des clochers, un château », vision de la ville depuis la Loire. La région apparaît à l’arrière-plan de certaines œuvres : Marion Delorme (1829) et Guerre aux démolisseurs abordent la sauvegarde du patrimoine, thématique qui fait écho à ce qu’Hugo observe dans les cités historiques comme Blois. Dans Le Roi s’amuse (1832), il cite la célèbre devise attribuée à François Iᵉʳ inscrite à Chambord : « Souvent femme varie ». Le poème Fuite en Sologne offre une vision bucolique et pastorale de la région.

Parmi les bâtisses qui retiennent l’attention de l’écrivain figure la Maison des Acrobates, à pans de bois, ornée de personnages sculptés datant du XVe siècle et classée monument historique en 1922. Située place Saint-Louis, elle aurait séduit Hugo lors de sa visite de 1825. Dans une correspondance, il la compare à une mystérieuse « maison des musiciens de Weymouth », bien que l’identité exacte de cette dernière demeure inconnue.