Vincent Grappy : « L’orgue et moi on s’accorde assez bien »
Blois Capitale aspire à être votre web magazine, une référence pour toutes les nouvelles culturelles de notre belle ville de Blois. Nous sommes très heureux aujourd’hui de vous présenter une interview de Vincent Grappy, le célèbre organiste blésois, dans le cadre magnifique de la Cathédrale de Blois
Reconnu pour sa maîtrise de l’orgue, Vincent Grappy s’est formé auprès de grands maîtres. Lauréat des prestigieux concours internationaux d’orgue, il a captivé des publics variés à travers l’Europe, les USA et le Brésil avec son répertoire diversifié et son talent exceptionnel. Vincent Grappy nous ouvre les portes de son univers musical.
Blois Capitale : Comment-êtes vous devenu organiste ?
Vincent Grappy : J’ai commencé le piano à 7 ans. Mon père connaissait le titulaire de l’ordre de la cathédrale qui s’appelait Raymond Guillot. Je pense qu’en parlant, il a dû me proposer de monter à l’orgue, moi j’étais enfant de chœur à la paroisse. Donc je suis monté pour découvrir l’instrument et prendre mon premier cours à 11 ans et demi. Alors je dis 11 ans et demi parce qu’en fait je suis venu prendre mon premier cours et puis après le professeur Raymond Guyot m’a dit : « Bon bah tes pieds touchent pas encore par terre, ils touchent pas encore le pédalier, tu reviendras me voir dans 6 mois »… donc voilà, c’est ce que j’ai fait. Là a commencé une histoire qui ne m’a pas quitté. Après le choix de devenir musicien professionnel, c’est fait petit à petit, je ne dirais pas par défaut, parce que ce serait une manière de qualifier cette décision de manière un peu négative. J’ai fait une année d’université où je me suis terriblement ennuyé et là je me suis dit « Bon bah essayons la musique pendant un an »; et donc j’ai passé une année à prendre des cours uniquement en conservatoire. J’étais à Orléans, un peu en à Paris également, et là j’ai eu une année formidable. Donc voilà ce qui m’a incité. La décision était d’une évidence, d’une très nette évidence, ce qui fait que j’ai continué la musique.
La particularité de l’orgue ?
Vincent Grappy : Peut-être la solitude de l’instrument pour un tempérament un peu solitaire comme le mien, ce qui fait qu’on s’accorde assez bien et puis après, un intérêt patrimonial. On a des instruments qui varient selon les pays, selon les époques, ce qui fait que l’instrument de Blois ne va pas ressembler à l’instrument de la cathédrale de Poitiers, qui sera très différent des instruments qu’on pourra retrouver en en Espagne ou en ou en Allemagne. Et puis il y a un répertoire très étendu. Quand j’étais encore étudiant, je faisais du clavecin et de l’orgue. A l’heure du choix je me suis dit qu’avec le clavecin, j’allais vers la musique ancienne. Avec l’orgue je ne choisissais pas puisque on a un répertoire qui commence au 15e siècle, qui est très riche, évidemment, au 18e qui est très riche, au 19e qui est très riche, au 20e… et avec la possibilité aussi de création puisqu’il y a une école contemporaine française qui est très dynamique.
L’orgue est en premier lieu puissant ?
Vincent Grappy : Non pas forcément. La qualité d’un orgue ne se mesure pas forcément au nombre de décibels, ni à la taille des tuyaux, ni à la taille des jeux. La première qualité d’un instrument, c’est sa capacité à remplir un espace. Ce qui ne veut pas dire de la puissance. C’est simplement occuper tout un espace, la nef de l’Église, qui en fait une une grande boîte de résonance de l’instrument. Et puis après la qualité d’un orgue se mesurera aussi à sa personnalité. Longtemps, on a essayé de faire des orgues à tout jouer, musique ancienne, musique romantique, musique contemporaine, et ça marche rarement. Il y a quelques exceptions qui sont assez séduisantes, mais un bel orgue a du caractère. C’est celui sur lequel on va pouvoir jouer un répertoire spécifique de manière vraiment authentique, enfin, aussi authentiquement que possible.
Quel est le caractère de l’orgue de la Cathédrale de Blois ?
Vincent Grappy : C’est le caractère symphonique, symphonique romantique. C’est un instrument qui date de 1701, ce qu’on voit en tout cas. C’est un orgue qui a été construit sous l’Ancien Régime. Mais ce qu’on entend date de 1880 puisqu’il y a eu une restauration en 1880 par un facteur d’orgues allemand qui s’appelle Joseph Merklin. Il a fait du Façadisme, c’est à dire qu’il a gardé la façade 18e mais derrière cette façade, il a mis un orgue tout neuf. C’est un orgue qui est vraiment adapté à la musique de la fin du 19e, et du 20e siècle.
Quels ont été vos professeur.es et mentors ? Que vous ont-ils transmis ?
Vincent Grappy : Mon premier professeur était mon prédécesseur ici, Raymond Guillot, qui a occupé cet endroit pendant 61 ans, de 1937 à 1998. Enme transmettant les claviers, il m’a dit : « Mon petit Vincent, je te souhaite de de de battre mon record ». Donc ça fait bientôt 25 ans que je suis titulaire de de cette tribune. Et puis bon, le bac en poche, avec la décision de faire des études musicales, cela m’a fait aller à Orléans, chez François-Henri Houbart, puis chez Marie-Claire Alain à Paris, et j’ai terminé les études d’orgue à Lyon chez chez Louis Robilliard; et parallèlement donc le clavecin avec Olivier Baumont à Paris et Bob van Asperen à Amsterdam. Voilà, dans le métier de musicien on voyage beaucoup. Depuis les troubadours et trouvères… mais, on ne marche plus maintenant, on prend le train, l’avion ou la voiture, mais on voyage beaucoup. L’apprentissage musical est le partage d’une expérience. Donc chacun m’a transmis une part de son expérience. Marie-Claire Alain m’a transmis son professionnalisme. C’est quelque chose que j’ai beaucoup, beaucoup admiré chez elle. Louis Robilliard m’a transmis cette manière d’aller au fond des œuvres musicales, de connaître vraiment chaque chaque mesure, chaque note, et puis de les penser par rapport à celles qui précèdent et celles qui suivent. Sans plus détailler, chacun m’a apporté une part de ses propres expériences, des transmissions qui font que je suis le musicien que je suis aujourd’hui.
>> L’intégralité de l’entretien est dans la vidéo ci-dessus.