« Carnets de quartier » : un projet culturel qui encourage à sortir
Ce mercredi après-midi, à la Maison de la BD à Blois, se déroulait le vernissage de l’exposition Carnets de quartier. Une initiative, menée par bd BOUM en partenariat avec l’espace Quinière Rosa-Parks, qui a permis à une vingtaine d’enfants du quartier Quinière de s’initier à l’architecture et au patrimoine de leur ville, à travers la création graphique. Ce projet a marqué une étape importante pour ces jeunes participants, mais aussi pour les acteurs sociaux et culturels impliqués dans le projet.
Une semaine de découvertes culturelles
Pendant une semaine cet été, les enfants ont déambulé dans les rues de Blois, carnet de croquis en main, guidés par l’artiste visuelle Stéfanni Bardoux. Le projet avait pour objectif de leur faire découvrir des lieux emblématiques de la ville, souvent méconnus de ces jeunes qui, pour certains, ne sortent que rarement de leur quartier.
Même si l’initiative était menée par bd BOUM, Stéfanni Bardoux, qui a encadré ces balades artistiques, a tenu à sortir des sentiers battus de la bande dessinée traditionnelle pour proposer une approche graphique plus large. « Nous avons travaillé autour de l’idée de l’affiche, de l’impact visuel, en explorant différentes formes d’expression graphique, tout en mélangeant les techniques, » explique-t-elle.
Les enfants ont ainsi appris à mieux utiliser des feutres, des crayons de couleur, et à réaliser des collages grand format à partir de photos prises dans Blois. Le tout en développant leur sens de l’observation face à des bâtiments patrimoniaux, tels que l’église Saint-Nicolas, que plusieurs enfants ont su reconnaître lors de leurs balades. « Cela a vraiment permis à des enfants qui, pour certains, ne sortent pas de leur quartier, de découvrir le vieux Blois, » se réjouit Loubna Daghri, référente de parcours pour le projet Réussite Éducative (PRE), qui a contribué à la mise en place de ce programme.
Un projet d’ouverture culturelle
L’exposition Carnets de quartier s’inscrit pleinement dans la mission du PRE*, un dispositif qui vise à favoriser l’égalité des chances à travers l’accompagnement scolaire et l’ouverture culturelle. « Travailler sur l’ouverture culturelle est un des points fondamentaux du PRE, » confirme Loubna Daghri. Selon elle, le projet a relevé un pari audacieux : faire découvrir aux enfants de Quinière une autre facette de la ville, tout en leur offrant un espace d’expression artistique. « J’avais un peu peur au départ, je me disais que cela risquait d’être compliqué, voire inaccessible pour certains. Mais finalement, grâce à la manière dont cela a été amené, et au super travail de l’équipe, cela a été complètement adapté. »
Une rencontre avec le patrimoine local
Outre la dimension artistique, ce projet a également permis aux enfants de renouer avec le patrimoine local. Pascal Nourrisson, historien blésois, a guidé les enfants lors de leurs balades, leur offrant des explications sur les monuments qu’ils ont croisés et dessinés. « Ils ont ainsi pu acquérir de nouvelles connaissances sur la ville de Blois, des ruelles jusqu’ici inconnues pour eux, » raconte Stéfanni Bardoux. Cette immersion a permis aux jeunes artistes de mieux comprendre l’histoire de leur ville et d’en capturer l’essence dans leurs croquis.
Cet aspect du projet, particulièrement important pour les familles éloignées de la culture française, est salué par Loubna Daghri : « Travailler dans les QPV (quartiers prioritaires de la ville), c’est aussi accompagner des familles qui, bien souvent, ne connaissent pas ou n’ont pas les moyens d’accéder à la culture. »
L’impact du projet et perspectives futures
Le résultat de ces ateliers est visible au sein de la Maison de la BD (entrée libre), salle Annie Goetzinger. Les dessins des enfants, exposés dans des cadres soigneusement disposés, seront visibles ensuite à l’espace Quinière Rosa-Parks. Lors du vernissage, Anne-Lise Pauchet, médiatrice culturelle de la Maison de la BD, a félicité les enfants pour leur créativité : « Deux dames sont venues ce matin voir vos œuvres et m’ont dit de vous féliciter. Elles ont adoré l’exposition, et je suis sûre que d’autres visiteurs seront tout aussi impressionnés par votre travail. »
Pour les référentes du PRE et les éducateurs, ce projet est un succès qui mérite d’être renouvelé. « Ce type de projet est un vrai tremplin pour ouvrir les enfants des QPV à la culture et les encourager à sortir de leur quartier » observe Loubna Daghri.
Bruno Genini, directeur de la Maison de la BD et de bd Boum, a joué un rôle central dans la mise en place du projet Carnets de quartier. Lors du vernissage, il a partagé son enthousiasme et l’importance de ce type d’initiatives pour la jeunesse des quartiers prioritaires, notamment en évoquant le cadre particulier dans lequel le projet a vu le jour. « On travaille régulièrement avec l’Espace Quinière. Il y a une bonne énergie, donc c’était naturel pour nous de solliciter les équipes du quartier pour ce projet, » commente Bruno Genini. Ce partenariat a abouti à un projet riche et fédérateur, malgré les délais parfois longs pour recevoir les financements et validations nécessaires.
Le défi principal pour l’équipe était de concevoir un projet adapté aux enfants, tout en conservant une dimension culturelle significative. « L’objectif, c’était de travailler avec un groupe d’enfants, un groupe le matin et un autre l’après-midi, et de leur faire découvrir une nouvelle facette de leur ville, » précise-t-il. « Comme on savait que le thème des Rendez-vous de l’histoire était « La ville », on a proposé à l’équipe des Rendez-vous d’intégrer cette exposition à la programmation officielle, ce qui est très valorisant pour les enfants, » souligne-t-il. Cette reconnaissance dans le cadre d’un événement aussi prestigieux que les Rendez-vous de l’histoire donne une dimension supplémentaire au projet.
Bruno Genini conclut en insistant sur la pertinence et l’impact de ce type de projets, notamment pour les enfants des quartiers prioritaires. « C’est vraiment important de leur donner accès à des projets comme celui-ci, qui mêlent culture, patrimoine et expression artistique. Nous sommes heureux d’avoir pu mener ce projet à bien et espérons pouvoir le renouveler. »
Carnets de quartier montre qu’avec un accompagnement adapté, la culture et l’art peuvent devenir des vecteurs puissants de découverte, d’expression et d’émancipation pour les jeunes. Ce projet aura été l’expression d’une ville ouverte à toutes et tous, à travers les yeux et les dessins de celles et ceux qui, pour la première fois, en explorent les richesses cachées.
*La mission du projet Réussite Éducative (PRE) est de favoriser l’égalité des chances pour les enfants et les jeunes issus des quartiers prioritaires de la ville (QPV). Il vise à accompagner ces jeunes, ainsi que leurs familles, dans leur parcours scolaire, social et culturel. Le PRE met en place des actions spécifiques pour soutenir les enfants rencontrant des difficultés à l’école ou dans leur environnement, en les aidant à accéder à des activités culturelles, sportives, ou éducatives. L’objectif principal est de lutter contre l’exclusion et d’encourager l’épanouissement des enfants, notamment en facilitant leur ouverture culturelle, en les aidant à sortir de leur quartier et à découvrir de nouveaux horizons.