Mélanie Pasteur: « Les femmes SDF sont nombreuses mais restent invisibles »
Avant le vernissage de l’exposition (lire ici) « Tu veux ma photo ? », actuellement à l’Hôte Bureau, Mélanie Pasteur, coordinatrice du Carillon à Blois, nous a expliqué que le femmes SDF étaient nombreuses. Ici comme partout. Comme les hommes.
« Au niveau national, il y a tout autant de femmes sans-abri, nous disait la salariée d’ALEP. Elles sont cependant plus invisibles.« Effectivement le rapport « REML2023 » (rapport sur l’état du mal-logement en France 2023) de la Fondation Abbé Pierre offrait en janvier dernier un aperçu alarmant de la précarité des femmes sans domicile fixe (SDF), une réalité souvent masquée par l’invisibilité de ces femmes dans l’espace public.
Des stratégies de survie invisibles
Contrairement à leurs homologues masculins, les femmes SDF emploient des tactiques pour se dissimuler dans l’espace public, réduisant leur visibilité et donc, leur comptabilisation dans les statistiques officielles. Ce phénomène souligne la difficulté à évaluer l’ampleur réelle de ce problème.
« Au Carillon, notre public n’inclut pas nécessairement ces femmes, mais par exemple, parmi les enfants dormant dehors avec leurs parents, et surtout leur mère, à Blois, il y a beaucoup de personnes en situation de migration, et parmi elles, un grand nombre de femmes. Contrairement à une croyance répandue, les parcours migratoires vers la France ne concernent pas seulement les hommes ; il y a aussi beaucoup de femmes et d’enfants, observe Mélanie Pasteur. Ces femmes ne sont pas visibles en centre-ville, mais elles sont tout autant à la rue, tout comme les enfants. Cependant, ce n’est pas forcément le public que nous accueillons. Nous recevons parfois des personnes en situation de migration, mais la majorité de notre public est constituée de personnes sans-abri qui correspondent davantage au stéréotype entre guillemets du clochard. Ces femmes ne rentrent pas dans cette vision, mais elles existent et restent invisibles. Malheureusement, nous avons du mal à les atteindre, souvent parce qu’elles sont en situation irrégulière et évitent de se faire remarquer à cause des risques d’expulsion. Ainsi, elles se cachent plus que les personnes que nous rencontrons habituellement au Carillon. Lors de nos tournées de rue, nous rencontrons des femmes, mais elles sont moins nombreuses que les hommes. Mais dans l’ensemble, la proportion est presque de 50/50. »
La charge disproportionnée du mal-logement sur les femmes
Le rapport « REML2023 » révèle également que les femmes sont particulièrement touchées par les effets du mal-logement. En raison de leur rôle traditionnel dans la sphère domestique, elles subissent de plein fouet les conséquences de la suroccupation et des conditions de vie précaires. Cette situation est exacerbée pour les femmes monoparentales et celles appartenant à des minorités de genre, confrontées à des défis uniques en matière de logement et d’exclusion sociale.
Violences de genre et exclusion
Les violences de genre constituent une cause structurelle du mal-logement, contribuant à l’invisibilisation des femmes SDF. Le rapport souligne la nécessité d’une approche spécifique pour l’accueil en structures d’hébergement, en tenant compte de la non-mixité pour mieux répondre aux besoins de ces femmes.
Des réponses multidimensionnelles requises
Le « REML2023 » appelle à des solutions plurielles, incluant l’amélioration des ressources financières pour les femmes, la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, la réduction des discriminations dans l’accès au logement et des mesures spécifiques dans le domaine de l’habitat. Ces solutions doivent s’inscrire dans une approche globale, touchant divers secteurs politiques comme l’emploi, la justice et les politiques sociales.
Un appel au bénévolat
II y a un besoin de bénévoles, notamment de jeunes, pour s’engager dans des activités d’aide aux personnes dans le besoin. Alors n’hésitez pas à vous rapprocher du Carillon.
