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Redécouvrir le Loir-et-Cher à travers 111 lieux choisis par Candy Pastre

Lorsqu’elle s’installe à Blois il y a quatre ans, Candy Pastre ne se doute pas qu’un coup de cœur patrimonial va bouleverser sa trajectoire. Médiatrice culturelle, historienne de l’art et archéologue, elle cherche alors simplement à sortir de chez elle, en quête d’un lieu à découvrir avec sa fille de deux ans et demi. Lavardin, et plus précisément son église romane, s’impose comme une révélation. « Je crois que ça m’a vraiment surprise, dit-elle. Je suis restée longtemps à observer ces fresques. Je me suis dit : comment est-ce possible que je n’en aie jamais entendu parler ? »

De cette stupeur naîtra un projet : faire connaître autrement le territoire du Loir-et-Cher. Pas à travers les grands incontournables, mais en donnant à voir ce que l’on ne regarde plus, en révélant ce qui est là, à portée d’yeux, à portée de pas. 111 lieux dans le Loir-et-Cher à ne pas manquer, qui parait ce 13 mai 2025 chez Emons Verlag, est le fruit de ce travail de terrain, d’archives et d’instinct. Un guide, certes, mais dont la logique n’est pas touristique. « C’est une sorte d’application… mais sur papier. On le prend avec soi pour une balade, un week-end. C’est une carte au trésor. »

Un Loir-et-Cher à la fois multiple et intime

Ce livre affirme une conviction : le Loir-et-Cher n’est pas un bloc homogène. Il ne se résume pas à la Sologne ou à Chambord… « Il y a quatre identités dans ce département, estime Candy Pastre. La Beauce, le Perche, la Sologne, le Blaisois… Ce n’est pas du tout la même chose. » Cette pluralité territoriale s’accompagne de strates historiques encore trop peu explorées. « On met souvent l’accent sur la Renaissance, mais il y a un patrimoine antérieur qui est tout aussi riche, parfois plus fragile. »

Au fil de ses pérégrinations, l’autrice découvre des pierres oubliées, des fresques polychromes intactes, des traces d’une culture gauloise ou romane insoupçonnée. Elle cite par exemple le dolmen de Cornevache, « perdu entre deux champs », rongé par les pesticides, ou les mégalithes disséminés aux confins du département. « On va toujours en Bretagne pour ça, dit-elle, mais ici, on a une culture très ancienne, des sépultures, des nécropoles… On le sait grâce aux registres, aux témoignages, aux fouilles de l’Inrap quand elles sont possibles. »

Ce patrimoine discret, souvent qualifié de « petit », n’a rien de mineur. Il nécessite, selon elle, une attention renouvelée. « Tout le petit patrimoine est tenu par des associations de retraités. Qu’est-ce qu’il va devenir dans vingt ans ? »

Écriture de terrain et choix du cœur

L’ouvrage se distingue par sa méthode : lecture intensive y compris d’archives locales, consultation de registres paroissiaux, collecte de légendes anciennes, mais aussi – et surtout – exploration physique du territoire. « J’ai fait une prospection, comme en archéologie. Je partais en voiture et je faisais cinq ou six lieux par jour. » De cette expérience, Candy Pastre tire une matière qu’elle réécrit à sa manière, toujours en lien avec une émotion, un détail humain, une histoire.

« Ce sont mes coups de cœur. J’avais carte blanche, à condition de ne pas citer les lieux trop connus comme Chambord. J’ai essayé d’aller dans chaque coin du Loir-et-Cher. Et j’ai souvent eu du mal à choisir : pourquoi ce lieu plutôt qu’un autre ? » La voie de Jules César, le chafaud à Saint-Viâtre où les habitants venaient gratter un peu de pierre à mélanger dans une soupe pour guérir les fièvres, la grotte (de Lourdes) à La Marolle autrefois peuplé de jeteurs de sorts, ou encore le salon de thé Little Miss Goumard à Cheverny sont autant de jalons du récit qu’elle tisse librement. Chaque page propose une photographie, une notice, une anecdote, parfois un complément ou une suggestion de balade. L’écriture elle-même fut une épreuve de concision. « Résumer un lieu en 2 000 signes, c’est frustrant. J’aurais pu en dire dix fois plus. » Et pourtant, ce format ramassé donne au livre une souplesse d’usage. On le lit, on le relit, on le glisse dans un sac, on s’en sert sur le terrain ou on le partage.

L’élan de Candy Pastre n’est ni passéiste ni muséal. Mais elle souligne toutefois la valeur des églises rurales, souvent ouvertes, désertées, mais dont chaque intérieur réserve une surprise : un Christ en croix du XVe, un retable peint, une fresque oubliée. « Je n’ai jamais été déçue en entrant dans une église ici. Jamais. Il y a toujours quelque chose. » Toutefois, l’un des partis pris du livre est de taire certains lieux, volontairement. « Il y a des sites que je n’ai pas voulu mentionner. Trop fragiles. Trop beaux. Ou alors trop exposés à un potentiel vandalisme. » Elle cite une pièce mérovingienne d’une rareté exceptionnelle, posée dans une église sans grande protection. « Ce genre d’objet attire malheureusement l’attention de personnes mal intentionnées. »

Une culture française vivante, et locale

À travers son livre, Candy Pastre défend aussi un art de vivre. Un rapport au temps, à la langue, à la culture. « Ici, les gens parlent un français incroyable. Sans accent, avec du vocabulaire, une syntaxe impeccable. C’est un plaisir d’écouter les anciens. » Elle aime inviter ses amis étrangers à prendre un thé avec « mamie Janine, 98 ans », pour entendre cette musicalité oubliée. « Je leur dis : écoute, tu entends la différence ? »

Ce qu’elle aime ici, dit-elle, c’est « la simplicité, l’authenticité, une vraie identité qui se mérite. » Car le Loir-et-Cher ne s’offre pas d’emblée. Il demande un regard. Une attention. Un effort, parfois. Mais il donne en retour un accès rare à une culture encore vivante.

111 lieux dans le Loir-et-Cher n’est pas un guide comme les autres. C’est une œuvre patiente et affective. À l’image du département qu’il célèbre, l’ouvrage ne mise pas sur le spectaculaire, mais invite à une découverte en profondeur d’un territoire discret, riche de trésors que l’on ne voit qu’en prenant le temps de les approcher.

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