Une mobilisation pour s’opposer aux fermetures de classes proposées dans le Loir-et-Cher
C’est un chiffre glaçant qui a mobilisé ce samedi matin des élus, des enseignants et des parents d’élève, devant la Préfecture de Loir-Et-Cher : 47 fermetures de classes sont proposées dans le département par l’inspecteur académique dans le cadre de la prochaine carte scolaire.
Concrètement la carte scolaire préliminaire prévoit la suppression de 24 postes budgétaires, auxquels s’ajoutent d’autres postes à créer pour certaines écoles et des projets d’ouverture de postes techniques. En conséquence, 47 fermetures de classes sont proposées pour équilibrer les 24 postes supprimés et les nouveaux postes à créer. Bien que le tableau présente 47 postes à supprimer, heureusement, tous ne seront pas effectivement fermés. Néanmoins, si rien ne change, « un nombre significatif de classes sera affecté, ce qui représente la plus importante réduction de l’offre scolaire depuis 15 à 20 ans », nous fait comprendre Frédéric Besnard, co-secrétaire départemental FSU-Snuipp. Cette réduction touche divers secteurs, y compris les quartiers prioritaires et l’enseignement spécialisé, comme les Ulis, et s’étend au milieu rural, exacerbant les inquiétudes des communautés rurales concernant l’avenir.
La principale justification de ces mesures est la baisse démographique dans le Loir-et-Cher, qui est le département accusant la plus forte diminution du nombre d’élèves dans l’académie. « Ces décisions s’inscrivent dans le cadre d’un projet gouvernemental et d’une loi de financement votée à l’Assemblée, prévoyant la réduction du nombre de postes de fonctionnaires, analyse Frédéric Besnard. En conséquence, les départs en retraite et les démissions ne sont pas remplacés, menant à une diminution annuelle des postes disponibles dans de nombreuses académies, dont 24 dans le Loir-et-Cher pour cette année. »
Les comparaisons internationales, comme celles avec Singapour ou la Finlande, montrent que des effectifs réduits dans les classes contribuent aux succès éducatifs, un aspect souvent omis dans les discussions locales. « Oui, par exemple, dans les zones prioritaires, des efforts ont été faits pour limiter le nombre d’élèves par classe à 12 ou 13 dans les plus petits niveaux, rebondit le syndicaliste. Cependant, cette approche n’est pas généralisée, et la baisse démographique n’est pas utilisée pour améliorer l’encadrement des élèves. Au lieu de cela, des postes sont supprimés et les élèves sont regroupés dans des classes multi-niveaux, avec parfois, exceptionnellement, jusqu’à cinq niveaux différents dans une même classe pour des raisons techniques, en raison des limites imposées par les normes en vigueur. » Chaque année, le Loir-et-Cher perd des postes, reflétant une tendance à long terme.
Aline Pasnon, co-secrétaire départementale de la FSU, a pris le micro pour faire état de la situation : « Cette année, le premier degré est particulièrement touché avec la suppression de 24 postes, représentant plus d’un tiers des 70 postes supprimés à l’échelle académique. Ce déséquilibre entre les six départements de notre académie est sans précédent, a déclaré la syndicaliste. Nous nous interrogeons sur l’efficacité de la défense de notre département par l’inspectrice d’académie auprès du rectorat. »
Les écoles rurales sont particulièrement vulnérables, certaines risquant de fermer, ce qui menace également l’avenir des collèges associés. « Nous ne pouvons pas continuer à sacrifier des écoles sous prétexte de baisse démographique, d’autant plus que les augmentations démographiques passées n’ont pas toujours conduit à une augmentation des ressources, explique Aline Pasnon. Nous devrions saisir l’occasion de la baisse démographique pour alléger et améliorer notre système éducatif, rendre le métier d’enseignant plus attractif et ainsi réduire le manque de personnel. »
Le département risquant de subir un nombre record de fermetures de classes, des élus de Loir-et-Cher ont demandé des ressources supplémentaires au recteur. La carte scolaire finale étant établie fin février, ou mi-mars, il reste encore des latitudes.
Thierry Benoist, président de l’Association des Maires ruraux du Loir-et-Cher, était présent pour apporter une « forte adhésion au mouvement de contestation actuel ». Et il a argumenté : « Nous avons observé que 93 communes ont subi des fermetures de classes au cours des quatre dernières années, que ce soit directement ou à travers des regroupements pédagogiques intercommunaux (RPI). Cette situation est pour nous totalement inacceptable. Nous devrions, à notre avis, saisir l’opportunité offerte par la baisse démographique pour améliorer les conditions d’enseignement et d’apprentissage dans nos écoles. Il est incohérent de déplorer constamment le déclin éducatif en France tout en continuant à affaiblir le service public d’éducation nationale, particulièrement dans les zones rurales, juge Thierry Benoist. Nous soutenons l’idée qu’il ne faut pas opposer le milieu rural au milieu urbain. Nous applaudissons les initiatives de dédoublement de classes dans les zones sensibles et prioritaires, mais nous soulignons également l’existence de difficultés majeures dans le milieu rural. Les familles rurales peuvent être en grande souffrance et leurs enfants rencontrer de sérieuses difficultés. Il est donc essentiel de veiller également à des effectifs réduits dans les écoles rurales. »
Le président de l’AMR en a profité pour souligner des incohérences : « Une analyse des données transmises par l’académie révèle une contradiction : pour les ouvertures de classes, la taille moyenne des classes passerait de 25 à 21 élèves, améliorant ainsi les conditions d’enseignement. Cependant, pour les fermetures, nous voyons souvent la taille des classes augmenter de 21 à 25 élèves, ce qui dégrade la qualité de l’enseignement. Les justifications fournies pour ces changements nous paraissent obscures et peu convaincantes.« En conséquence, « nous restons mobilisés et tenons à affirmer que notre opposition persistera, même si des modifications mineures sont apportées à la carte scolaire, a prévenu Thierry Benoist. Le 22 février, lors du Conseil Départemental de l’Éducation Nationale (CDEN), nous exprimerons une fois de plus notre désaccord avec cette politique, qui, pour la quatrième année consécutive, s’apparente à un affaiblissement de l’école publique en milieu rural. »
C’est ensuite, Laurent Brillard, maire de Vendôme et vice-président de l’association des maires de France du département (AD41), également hostile à la proposition actuelle de carte scolaire, qui a pris la parole en ces termes : « Nous réitérons notre appel à considérer la baisse démographique non pas comme un handicap, mais comme une opportunité d’améliorer le ratio élèves par classe dans nos écoles, au bénéfice tant des enfants que des enseignants. Transformons ce que l’académie perçoit comme une faiblesse en un atout, a clamé l’édile. Notre avis n’est actuellement pas suffisamment prise en compte. Pour illustrer notre propos, prenons l’exemple de la ville de Vendôme. Les deux classes proposées pour fermeture ne souffrent d’aucune baisse d’effectifs. Elles semblent avoir été rayées de la carte sans aucune justification valable, d’un simple trait de plume. Cette approche indique clairement que la carte scolaire n’a pas fait l’objet d’une réflexion approfondie ni d’une concertation adéquate, ce qui est regrettable mais malheureusement fréquent. Nous devons cesser de porter atteinte à notre dynamisme et à notre attractivité. L’école représente un symbole fort de notre société, et il est essentiel de concentrer davantage nos efforts sur ce secteur. »
C’est enfin Magali Marty, maire de Naveil, qui a enfoncé le clou, également au nom de l’association des maires, par l’exemple. « Je tiens à partager notre expérience. Il y a quatre ans, l’Éducation nationale a sollicité notre mairie pour l’installation d’une classe dédiée aux enfants autistes, soulignant la difficulté de trouver un emplacement adapté. Mon conseil et moi avons répondu favorablement à cette demande, réalisant les travaux nécessaires pour accueillir cette classe qui requiert des aménagements spécifiques en raison de ses besoins en infrastructure, a expliqué la maire de Naveil à l’auditoire. Aujourd’hui, nous avons huit élèves autistes dans cette classe. Le dispositif a prouvé son efficacité, permettant aux deux premiers élèves de rejoindre leur école d’origine à Vendôme en juin, illustrant ainsi une réussite en termes d’inclusion. Cependant, la nouvelle carte scolaire nous confronte à un défi majeur : elle propose des classes à double niveau en maternelle, comptant 28 à 29 enfants, y compris huit enfants autistes. Nos enseignantes, malgré leur dévouement et leur compétence, se retrouveront face à un défi quasi insurmontable : gérer des groupes d’âges différents tout en s’occupant individuellement de quatre à cinq enfants autistes. Cette situation est d’autant plus frustrante que ces enfants, qui nécessitent une attention particulière, risquent d’être les premiers affectés par ces changements. Il est important de souligner que ces places ont été financées par la MDPH (Maison Départementale des Personnes Handicapées) dans le cadre d’un projet que l’Éducation nationale nous avait encouragés à entreprendre. Aujourd’hui, il semble que ces efforts et ces investissements pourraient être compromis. Face à cette situation, notre communauté est unie dans sa détermination à lutter contre ces propositions. L’engagement des enseignants et des parents d’élèves est fort, comme en témoigne notre rassemblement de 300 personnes hier. Cette cause dépasse le cadre éducatif pour devenir un enjeu majeur pour notre commune. Après s’être investie dans l’établissement de ces six classes, notre volonté est ferme : nous ne les laisserons pas fermer sans réagir. »