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Comment séries et cinéma peuvent promouvoir les attraits touristiques

Les séries et le cinéma jouent un rôle de plus en plus palpable dans la promotion des destinations touristiques. D’ailleurs, signe des temps, le terme « ciné-tourisme » désigne le phénomène par lequel des individus sont incités à visiter des lieux spécifiquement mis en avant dans des films, des séries, et des émissions de télévision. Ce concept s’étend au-delà de la simple visite touristique : il s’agit d’une forme de voyage motivée par le désir de vivre une expérience immersive dans des décors qui ont servi à des productions audiovisuelles.

Et Dieu… créa un ciné-tourisme en France

Saint-Tropez est souvent cité comme l’un des premiers lieux en France où le cinéma a eu un impact significatif sur le tourisme. L’essor de Saint-Tropez en tant que destination touristique prisée est fortement lié au succès du film « Et Dieu… créa la femme » (1956), réalisé par Roger Vadim et mettant en vedette Brigitte Bardot. Ce film a non seulement catapulté Bardot au rang de sex-symbol international, mais il a également transformé l’image de Saint-Tropez, qui est passé d’un petit village de pêcheurs à une station balnéaire de renommée mondiale. Avant la sortie du film, Saint-Tropez était déjà apprécié pour sa beauté naturelle et son calme, mais il n’attirait pas encore les foules de célébrités et de touristes fortunés qui viendraient plus tard. Après le film, le village est devenu un symbole du style de vie chic et décontracté de la Côte d’Azur, attirant des artistes, des écrivains, des célébrités du cinéma et une jet-set internationale.

Un pouvoir de métamorphose

On le voit, le cinéma a le pouvoir de créer des mythes autour de certains lieux, transformant souvent la perception et la réalité de ces endroits aux yeux du monde entier. Les films peuvent magnifier, idéaliser ou même altérer l’image de villes, régions, ou pays spécifiques, en leur conférant une aura qui peut dépasser largement leur réalité quotidienne.

Ainsi, le cinéma peut présenter des lieux de manière particulièrement romantique ou mystérieuse, ce qui attire les touristes en quête de l’expérience ou de l’atmosphère vue à l’écran. Par exemple, Paris est souvent dépeint comme la ville de l’amour, grâce à des scènes emblématiques se déroulant sur des sites célèbres. Un endroit comme Beverly Hills (à Los Angeles) a été popularisé par des films et séries qui mettent en scène le luxe et la vie des riches et célèbres, attirant celles et ceux qui cherchent à vivre, même temporairement, le faste présenté. « Le Seigneur des Anneaux » a transformé des paysages naturels de Nouvelle-Zélande en lieux mythiques, attirant les fans du monde entier qui veulent explorer la « Terre du Milieu » (+40% de tourisme dans le pays de 2000 à 2006).

La montée du ciné-tourisme reflète une tendance croissante parmi les voyageurs à chercher des expériences de voyage marquantes. L’impact de cette tendance sur les choix touristiques est significatif, transformant des destinations parfois peu connues en centres d’intérêt majeurs.

Pour exemple, depuis le tournage de certaines scènes de la série Netflix coréenne « Crash Landing on You » au lac de Brienz, un village du canton de Berne est submergé par les touristes. En conséquence, il a été décidé d’imposer des frais (5 francs suisses) pour accéder au ponton emblématique de la série. Car l’idée des fans de la série est de s’approprier la scène en étant à leur tour dans l’image qu’il ont vue à l’écran.

Des études identifient plusieurs motivations psychologiques poussant les personnes à visiter les lieux de tournage de films et de séries. Un facteur prédominant est le désir de s’immerger dans l’univers d’un film ou d’une série aimée, dans une perspective émotionnelle programmée. Cela peut être compris comme un désir de lien tangible avec une histoire et ce à quoi elle associe. En allant au lac de Brienz, on se signale comme à la fois romantique, membre d’une communauté, et disposant des moyens pour aller sur ce site suisse.

Un deal pour le tourisme français

Netflix et Atout France (promotion du tourisme) ont lancé en 2024 une initiative conjointe visant à promouvoir le tourisme et la culture française à travers le monde, suite aux résultats positifs d’une étude réalisée par l’institut Basis (autour desquels il existe un flou). Cette (mystérieuse) étude a révélé que les films et séries tournés en France, diffusés sur Netflix, augmentent considérablement l’attractivité de la France en tant que destination touristique. Les productions telles que « Lupin », « Balle Perdue », et « Emily in Paris » ont un effet notable sur les envies de voyage des spectateurs, nous dit-on.

Les spectateurs de Netflix seraient trois fois plus enclins à choisir la France comme destination de voyage après avoir vu ces programmes. 63% des spectateurs seraient intéressés par la visite des sites culturels français, 61% par les spécialités culinaires, et 58% par l’exploration des villes françaises mises en avant dans les films et séries du catalogue. Autre élément donnée : les productions en langue française encourageraient une proportion significative de spectateurs (32%) à apprendre le français, comparé à ceux non exposés à de telles productions (9%). Enfin, près de la moitié des spectateurs auraient une image plus positive de la France après avoir regardé des contenus français sur Netflix.

Statistiques d’impact en France

L’attraction des lieux de tournage comme catalyseurs de choix touristiques est quantifiable à travers diverses études et enquêtes. Une étude de début 2024 réalisée par l’Ifop pour le CNC (Centre National du Cinéma et de l’Image Animée) en France illustre l’impact significatif des productions cinématographiques et télévisuelles sur le tourisme. Selon cette enquête, 86 % des touristes étrangers à Paris se souvenaient avoir visionné au moins une production française avant leur visite, ce qui a joué un rôle crucial dans leur décision de voyager en France.

Effets sur la durée des visites

Cette influence ne se limite pas seulement à l’augmentation du nombre de visiteurs. Les données montrent également que ces touristes sont susceptibles de dépenser davantage lors de leur séjour. En moyenne, les visiteurs influencés par le cinéma dépensent environ 1700 € par individu (contre 700€), hors billets d’avion. La première explication étant une durée de séjour bien plus importante. Les touristes attirés par les lieux de tournage tendent à prolonger leur visite (une semaine ou plus) pour mieux explorer.

A relever, le ciné-tourisme en France bénéficie d’une richesse particulière en raison de la diversité des productions tournées dans le pays. Des films internationalement reconnus comme « Le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain » et « Midnight in Paris » jusqu’aux séries populaires telles que « Lupin » et « Emily in Paris », chaque œuvre contribue à façonner l’image culturelle et touristique de la France. 10% des touristes auraient décidé de venir en France suite au visionnage spécifique de fictions comme « Emily in Paris » et « Lupin ».

Zlatan à Paris
Le ciné-tourisme, tout en étant bénéfique économiquement, pose des défis significatifs en termes de gestion des flux touristiques qui peuvent menacer la préservation des sites historiques et naturels. La sur-fréquentation peut entraîner une dégradation de l’environnement et une détérioration de l’expérience touristique.

Soft Power : l’exemple de la Corée du sud

La Corée du Sud a remarquablement exploité ses films et séries pour renforcer son influence culturelle mondiale, un concept connu sous le nom de « soft power ». Ce terme, défini par Joseph Nye, reflète la capacité d’un pays à influencer d’autres nations par l’attraction plutôt que par la contrainte, utilisant des ressources culturelles, politiques et sociales pour atteindre des objectifs de politique étrangère.

La Corée du Sud a mis en place une politique d’État stratégique pour promouvoir son soft power à travers la culture populaire, notamment les films, les séries, et la musique K-pop. Cette politique comprend plusieurs initiatives et lois destinées à soutenir l’industrie culturelle du pays. Comme la Loi de promotion du cinéma de 1997 qui a marqué un tournant significatif en remplaçant le système de révision préalable par un système de classification par âge similaire à celui des États-Unis. Cette loi a facilité une plus grande liberté créative, permettant la production de films aux récits plus audacieux et réalistes, comme on peut le voir dans des œuvres telles que Parasite et Squid Game. Elle a aussi joué un rôle crucial dans la libéralisation culturelle du pays, en contribuant à l’essor de l’industrie cinématographique sud-coréenne sur la scène internationale​.

…qui inspire l’Arabie Saoudite

L’Arabie Saoudite s’est lancée depuis quelques années dans un soft power à travers des films et des séries. Avec la levée de l’interdiction des cinémas en 2018, le pays a rapidement commencé à investir dans cette industrie pour renforcer son influence culturelle globale.

L’Arabie Saoudite a lancé le Festival international du film de la mer Rouge en 2019. Ce festival vise non seulement à présenter des talents saoudiens et arabes, mais aussi à offrir une plateforme pour les artistes des pays en développement. Cette initiative montre une volonté de développer une industrie cinématographique nationale et de soutenir un narratif local​.

L’Arabie Saoudite utilise aussi le sport comme un outil de soft power, avec des investissements significatifs dans des événements sportifs internationaux et des clubs sportifs. Ces actions incluent l’acquisition de stars internationales telles que Cristiano Ronaldo, Karim Benzema ou Neymar pour jouer dans la ligue saoudienne, augmentant ainsi la visibilité et l’attractivité du pays dans le domaine sportif​.

En parallèle, le royaume investit massivement dans son secteur touristique, avec des plans pour développer des destinations touristiques et augmenter le nombre de chambres d’hôtel disponibles. L’objectif est de transformer le pays en une destination de choix pour les visiteurs internationaux, ce qui comprend également la promotion de sites du patrimoine mondial de l’UNESCO comme la vieille ville de Jeddah​.

    Ces efforts montrent que l’Arabie Saoudite est en train de diversifier ses stratégies de soft power, en intégrant des aspects culturels, sportifs et touristiques pour améliorer son image à l’échelle mondiale et influencer d’autres nations grâce à des moyens plus subtils que les voies traditionnelles du pouvoir économique et militaire.

    Bref, avec l’extension du pouvoir de l’image, les stratégies d’attractivité se développent.

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